Une chanson joyeuse

Adàgio chantonnait doucement une chansons joyeuse. Le nez en l'air, il observait la faune marine qui frôlait le tunnel. Il était trop heureux pour s'émerveiller outre mesure du spectacle. Son cœur battait au rythme de celui des anges, son esprit, avec la lune.

Fenrir regardait le sol. Il avançait en regardant le sol comme pour se punir, pour se priver de ce qu'il y avait au dessus de sa tête, se convainquant que cela ne l'intéresserait pas. Et à travers la pénombre, le sol lui révéla la trace de petits sabots, son odorat lui indiqua un parfum qui reconnaissait vaguement, et ses oreilles une petite voix fragile. Levant son regard noir, il sourit à moitié, continuant d'avancer vers ce qu'il pensait être une fabuleuse occasion de se venger.

Un chuchotement intérieur le prévint, et Adà s'arrêta pour regarder en arrière. Il continua à susurrer sa chanson, tout bas, tout en écoutant ce qui venait, là-bas derrière. Il n'y avait pas de vent pour lui dévoiler l'identité de celui qui approchait, mais il était persuadé que ça serait une belle rencontre. Le jeune cheval affichait donc un doux sourire sur ses lèvres roses, quand l'image de son oncle se discerna enfin de l'ombre.

(Oh il est adulte, mince )

Il contourna une paroi argileuse, et s'arrêta, laissant apparaître sa déception. Le petit poulain frêle qu'il avait espéré trouver avait été remplacé par un jeune adulte, mince et peu musclé mais grand, entrain de se former. Il ressemblait à Fenrir, quelques années plus tôt. Surmontant sa surprise, il s'avança lentement vers ce qu'il supposait être son neveu, essayant de se rappeler de son prénom. Aga ... Ada ...

hinhin

Adàgio lui-même fut surpris. À la fois parce que soudain l'image qu'il avait dans un coin de sa tête de son oncle se vivifiait. Et à la fois par effet miroir, suivant la surprise qu'affichait Fenrir. Le pie fit lentement tinter ses sabots sur le sol tandis qu'il se tournait maladroitement vers le doré. " Agadir ? Ada... Adàgio. Je m'appelle Adàgio " tâtonne-t-il, aussi confus et hésitant que l'autre akhal face à lui. Il ressent une drôle de sensation de le rencontrer vraiment. Une fébrilité, une crainte et une impatience. Il se sent vaguement résonner avec l'étalon, il a l'impression que... Ils se ressemblent. Comme avec sa Mère, une sensation, plus lointaine, d'être un peu la même personne.

Ils se toisent pendant un moment, et Fenrir détaille le petit, un étau se refermant sur son cœur lorsqu'il se rendit compte que cet être était le fruit concret de l'amour de Ruyn et Almageste, et qu'il n'avait rien à voir avec Fenrir. Et pourtant il lui ressemblait tant. Tu sais qui je suis. C’était plus une affirmation qu'une question. Il ne savait toujours pas s'il était furieux ou terrassé.

" Bien sûr. " Les mots lui sont sortis de la bouche avec l'évidence qu'ils décrivent. Mais il n'ajoute rien, ne prononce pas son nom, le contemple juste. Jusqu'à ce qu'un léger sourire fleurisse innocemment sur ses lèvres. " Tu es beau. " Et s'efface. " ... Tu étais triste. " Il se rappelle leur venue, à lui et à la grande jument pâle.

Fenrir demeure de marbre devant ce jeune, encore incapable de décider ce qu'il ressent. Reconnu, il se tait à la première remarque du pie, étonné, ne sachant pas réellement comment réagir. Mais il Adagio ne lui laisse pas le temps de réagir. Et cette fois-ci, le doré est d'accord avec sa remarque. Je le suis encore. dit-il, avant de se reprendre, se demandant d'où venait cette franchise extrême devant ce jeune qui était la raison pour laquelle sa vie avait déraillé. En quelques sortes, en tous cas.

Il fait un pas en avant. " Il n'y a pas besoin. " Mais sa voix s'éteint. Il n'y a pas besoin d'être triste. Il le pense, mais ne saurait l'expliquer. Il croit avoir compris les tourments de son oncle, mais sans les embrasser entièrement. C'est peut-être là leur différence principale. Adàgio a appris à partager son amour, et à n'en recevoir qu'une part de ceux qu'il aime.
Un instant déchiré par cette révélation, le pie se reprend soudain, et s'élance joyeusement vers Fenrir. " J'ai une idée ! " Il le frôle, tout sourire, profitant de cette proximité éphémère pour humer l'essence de ce membre de sa famille qu'il n'a encore que trop peu connu. Et le dépasse, se dirigeant vers un bord du tunnel où l'eau suinte depuis des décennies. " Viens voir... " chuchote-t-il avec une excitation non dissimulée. Là poussaient quelques végétaux très particuliers.

Longtemps, Fenrir toise son neveu, le regardant hésiter et balbutier comme lui le faisait aussi. Et il avait beau haïr l'idée d'Adagio, et ce qui l'avait créé, en quelques secondes, le jeune lui avait apporté plus de réconfort que toutes les autres personnes dont Fenrir essayait de s'entourer. Lorsque le pie bondit en l'air et détala, cela ne surprit qu'à moitié le doré, qui le suivit avec ses grands pas de loup, plissant ses yeux pour regarder les herbes que lui désignait Adagio. Qu'est-ce que c'est ?

Moh
" Collema fuscovirens. Un lichen. Je l'ai repéré ici la dernière fois que je suis passé. " Adàgio baisse le nez tout près de l'étrange formation noirâtre, pour le sentir. Son léger sourire s'élargit. " Ah, il est parfait. Si tu en manges, tu te sentiras bien. Si tu te sens trop triste, tu n'auras qu'à essayer. Dac ? " Son regard plein d'espoir cherche celui du doré tandis qu'il redresse l'encolure.

Le regard de Fenrir suivit celui du pie, et il fronça ses sourcils de cheval en voyant la tête du truc qu'il lui proposait, noir, tordu et apparemment odorant. T'es sur de toi ? dit-il en s'approchant a son tour pour le sentir, adressant un regard intrigué à Adagio.

" Moi oui, mais c'est toi qui dois être sûr de toi si tu en prends, parce que ça peut donner un peu la nausée la première fois, et puis ça peut durer un peu longtemps. Ah oui c'est un psychotrope j'ai oublié de te dire. " Proposer de la drogue à son oncle un peu toqué, la bonne idée

(un perso toco, on aura tout vu )

Fenrir demeura silencieux, son regard ahuri passant de son neveu à la plante, avant de revenir. Bon ... d'accord ... Lentement, il étendit le nez, prenant quelques bouchées de l'étrange truc noir.

(au fait comment ça se fait que y'a un compte "Fenrir" et un compte "Imo" ?
et ça veut dire quoi toco ? )

" Ohlala pas trop, c'est super puissant. Mais ça met un peu de temps à agir. " Du coup Adà était content, ils avaient un peu de temps pour discuter, et il avait plein de questions à lui poser. Il se sentait désormais assez à l'aise avec Fenrir pour se lancer. " Et donc heu... t'es le frère de ma mère... " Non en fait il n'osait pas trop, ne savait pas par quoi commencer. Son regard se fit timide et il tritura le sol de ses sabots, ayant du mal à regarder son homologue dans les yeux. Il voulait simplement qu'il lui parle de lui, mais le connaissait trop peu pour trouver une question adéquate.