‹ the ghost will scream that i'm alone ›

Oroszlàn.

i don't know if this song is a surrendel or a revel
i don't know if this one is about me or the devil

Tapi dans le coin d'une pièce, on ne l'entend pas. Pas même respirer. À croire qu'il est sur pause. Ou peut-être mort. Ou simplement ailleurs. On n'en sait rien ; lui non plus. Il secoue régulièrement la tête, pour chasser les bestioles invisibles. Les voix, en réalité. Dans la pièce où il se trouve, noire et moite, on n'entend que le bruit caractéristique des gouttes qui s'écrasent, toutes les minutes, sur le sol où se forme une petite flaque.

Ses oreilles pivotent. Deux girouettes au sommet d'un crâne bien trop travaillé, elles s'inclinent, se redressent, s'abaissent. Elles hésitent.
Les pas résonnent jusque dans sa mâchoire qu'il tient serrée, plus fermement encore depuis qu'il a senti l'odeur. De sa veuve noire. Son plus beau cauchemar. Il se souvient difficilement du début. Quand il n'était qu'un gamin, et qu'il voulait grandir pour l'impressionner. Qu'il voulait lui plaire. Qu'il s'est pris lui-même dans le filet de sa toile. Il la laisse approcher, les muscles légèrement tendus.
Il a beau sentir et sentir plus fort encore, l'odeur la plus tenace reste celle, rance, de l'humidité stagnante. Alors, le Lion se décolle de la paroi humide qui a laissé sa trace sur son flanc droit. Une trace qui sèchera, disparaîtra. D'autres, notamment sur son poitrail, étranglant son encolure, remontant jusqu'à son chanfrein puis filant directement entre ses côtes, ne disparaîtront plus jamais. Il fait claquer ses dents dans le vide et c'est alors qu'il l'aperçoit.
Il tressaille, sans savoir pourquoi. « Tiens donc, la veuve noire est encore en vie ? »

Elle montre ses cicatrices, et il hausse simplement les épaules, nonchalant. Ses yeux ne la quittent pas, grands ouverts et pourtant déjà si fermés, si sombres, si murés. « Cette collection-là ne m'intéresse guère, même si elle s'agrandit, c'est vrai. » Ce qu'il n'a jamais confié, c'est que certaines blessures sont presque volontaires. Dans ses crises de colère, lorsqu'il se défoule et se jette lui-même contre un objet tranchant. Mais ça, c'est notre petit secret, n'est-ce pas mon Lion ?
Il secoue la tête. Chasse les voix – pour quelques secondes seulement. Elles ne le quittent désormais plus. « Mais j'ai agrandi une autre collection. » Il s'avance d'un pas, et son sourire s'étire. « J'ai trouvé pire que toi. »

Il sent son regard sur lui et loin de le déranger, cela attise le feu qui brûle en lui. Ses démons sont là, et s'ils étaient encore jeunes et faibles lorsqu'ils l'ont pourtant poussé à commettre le pire avec elle, ils la reconnaissent. Et se réjouissent de ces retrouvailles, maintenant qu'ils savent prendre les rênes encore plus rapidement. Maintenant qu'ils se sont endurcis, qu'ils ont accaparé chaque pore de ses souffrances pour en faire des forces.
Il plonge soudainement dans son regard, s'y enfonce, y creuse. Avec témérité, avec audace, avec délice. « J'ai rencontré une créature.. » commence-t-il d'une voix qui s'est rendue basse, malicieuse.
Que le jeu commence. Laisse-nous faire, garçon.

Il voit bien qu'elle commence à être intriguée, à déjà prendre son pied de le retrouver. De retrouver enfin celui qu'elle espérait tant, depuis qu'il est gamin. Il n'a jamais oublié leur première rencontre. Quand ses pouvoirs étranges et surnaturelles avaient fait parlé son père à sa place. Quand il avait entendu sa voix entre les lèvres de la veuve noire. Décidément, on dirait que dès qu'il y a un soupçon de magie noire sur GS, c'est spécialement pour lui. Il la regarde avancer, sans bouger. Une tension électrique commence à l'habiter, à tournoyer autour de lui comme une aura supplémentaire. Ses yeux noirs cherchent les siens, en permanence. « Elle a des cornes. Je crois qu'elle vient directement... des enfers. » susurre-t-il, un fin sourire mesquin aux lèvres.

Il hausse les épaules, prenant un air désinvolte. Comme pour lui prouver son comportement, il détourne même son regard empli d'ombres, qu'il vient projeter sur les murs dégarnis et suintants. « Peut-être. Dans tous les cas, elle s'est faite bien plus présente que toi, ces derniers temps. Bien plus attractive, aussi. »

Un rire étrange s'échappe des lèvres du doré. Un rire mi-narquois mi-démoniaque. Il braque ses yeux sur elle et s'approche d'un pas, sortant de l'ombre qui enveloppait son corps musclé. « Crois-tu que je puisse lui en faire un, même si elle vient directement des enfers ? » susurre-t-il doucement, à la limite de la provocation.

Il ne s'attend pas à tant de douceur de sa part et le Lion est si décontenancé qu'il se laisse faire, paralysé. Tu serais bien un menteur que d'avouer que tu n'aimes pas ça, mon garçon. Ils ricanent déjà de toutes les questions qui vont lui remuer la cervelle, après ça ! Il détache ses lèvres des siennes, la fixant d'un regard dévorant. « C'est vrai. Mais tu ne faisais plus partie de leur monde, toi. » relève-t-il en laissant ses lèvres courir le long de l'encolure noueuse de la veuve noire, avant de la mordre brièvement.