Lumière blanche #P

À savoir:

On dit que la vie est un cadeau de la nature. Un beau cadeau que l'on apprend à avoir, un beau cadeau que l'on apprivoise au fil des années. Certains le verront parfois comme un lourd poids à porter, trop lourd même, mais il ne faut jamais oublier que vivre est la plus belle chose que la Terre Mère a pu nous offrir. Qu'il faut en profiter pleinement avant que cette étape ne se termine. Car le cycle continue, la roue tourne encore et encore. Dans une vie, on a toujours la possibilité d'attraper le bonheur. Il y a certes des hauts et des bas, mais lorsque l'on saisit de bonnes opportunités, on apprend à voir le positif à travers un drap noir qui semble parfois nous étouffer.

Tant de croyances nous guident dans ce monde, dans ce bas-monde, toujours plus étonnantes l'une que les autres. Mais ce qu'il ne faut jamais oublier, c'est que le respect doit être présent partout. Autant le respect de soi que le respect des autres, autant le respect de cette Terre qui nous accueille que le respect de l'eau qui nous permet la vie.

Il est parfois difficile de savoir si on est bon ou mauvais, mais il faut voir la part de noir et de blanc dans chacun pour accepter vraiment une vision juste de ce monde. Car il est bien impossible de voir que de la lumière ou que de l'ombre. Il suffit de balancer le tout pour devenir ce qu'on souhaite.

C'est en se remémorant ses leçons de morale de son ancien peuple que l'alezane se laissait envahir par les bruits de la jungle, plusieurs instants plus tôt. La Terre Mère offrait aux habitants de Luanera des présents que sans doute plusieurs ignorent. Les plantes médicinales, la faune, la vie. Si seulement ils pouvaient tous voir cela de la manière dont elle a appris à le voir... Ou alors si elle avait pu voir tout ça de la manières des autres, pour une fois. Arrêter de chercher de nouveaux remèdes et voir les dangers en face. Ça lui aurait été bien utile, plusieurs instants plus tôt.

Mais, là, il était trop tard. Le mal était fait, il lui fallait faire avec. Étendue dans le sable qui signifiait beaucoup pour elle, elle sentait l'effet du venin agir dans sa jambe. Les grains lui collaient à sa peau humide de sueur. Son corps brûlant de fièvre reposait entre l'océan et les dunes dorées. Elle avait réussi à se traîner jusque là en boitant pour de pas rester dans cette si jolie jungle à la fois salvatrice et destructrice. Il ne lui avait fallut qu'une seule seconde d'inattention pour que le serpent ne plante ses crocs empoisonnés dans son antérieur avant qu'elle ne l'achève. La respiration sifflante, elle n'avait plus trop la force d'hennir pour appeler à l'aide, la fièvre troublait son esprit qui commençait à délirer. Alors elle se concentra sur le son des vagues qui la berçaient tranquillement. Sa jambe engourdie qui lui avait semblé si douloureuse avait enflé, sans qu'elle ne puisse être en capacité de se soigner seule. On dit que la vie est un cadeau prêté. Et qu'un jour, il faut la rendre. Mais quand ?

Il s'est passé quelque chose. Il le sent, il le sait. Sans qu'il ne sache pour autant quoi, qui, où, quand, pourquoi. Hook déambule dans les dunes de sables, avec un sentiment désagréable de mal être intense. C'était d'autant plus déstabilisant qu'il n'avait jamais ressenti ça auparavant, lui qui était toujours à l'aise en tout et en tout temps. Viens avec moi ! Un ordre. Il grimace. Mais cette voix ne lui est pas étrangère, c'était cette même voix qui l'avait guidé dans son combat contre la paria. Il ne connaissait toujours pas le nom de cet étalon, mais peu importe, il lui avait fait confiance une fois, il pouvait encore se laisser tenter.

Xander guide son père. Il aperçut la silhouette inerte d'une jument au loin, alors qu'il surplombait plusieurs dunes en étant au sommet de l'une d'elle. X allait se rendre jusqu'au corps mais il avait vu Enja arriver à vive allure et lancer des hennissements désespérés. Lorsqu'une seconde jument arriva, il décida de partir chercher Hooker plutôt que de les rejoindre directement. Heureusement, ce dernier était déjà sur les lieux, ce qui ne leur fit pas perdre trop de temps. En quelques minutes, ils arrivent tout deux auprès des trois juments, dont Phoenix gisant au sol. Il peine à avaler sa salive, n'osant pas poser LA question. Mais il aperçoit ses flancs se lever faiblement. L'étalon pie se tient légèrement en retrait, inquiet pour sa belle mère qu'il avait rencontrer, et pour laisser les guérisseuses pouvoir faire leur travail, ne pouvant s'empêcher d'observer Enja à l'oeuvre.

Avant qu'ils n'arrivent, il avait senti cette odeur âcre et très - trop ? - bien connue du sang. Mais il avait une odeur particulière, comme s'il était souillé. Hook pince ses naseaux sensibles, le mâle qui le guide semble presser, et sans trop savoir pourquoi, il ne lui a même pas demandé ce qu'il se passait. Peut être une part de lui se doute t-il ? Toujours est-il qu'il n'est pas prêt. Pas prêt lorsqu'à l'odeur du sang se mêle celle d'Enja, de Phoenix et de celle qui avait participé à ses soins avec Céleste, Fiona c'est ça ? Inconsciemment son allure ralentit. Qu'est ce qu'il se passe ? Putain qu'est ce qu'il se passe ? Sans que les mots ne franchissent ses lèvres pour autant. Il est étrangement silencieux, trop silencieux.
Ils semblent se rapprocher, il entend des voix féminine au loin, plus de plus en plus distinctes. Il semblerait qu'on parle de serpent. Enja. Fiona. Phoenix ? Pourquoi Phoenix reste t-elle muette face à l'inquiétude des deux autres guérisseuses ? Et puis il entend ces mots : ... seul plante qui peut la sauver. Son sang ne fait qu'un tour. Il se précipite en avant, sans délicatesse, arrivant au chevet de sa douce, se laissant guider par son odeur. Toujours aucuns mots. Aucuns. Ses naseaux viennent avec appréhension la toucher, de peur de la découvrir froide comme une nuit sans lune dans le désert. Mais au contraire, elle est aussi brulante que le soleil à son apogée dans les cieux. Le sang, l'odeur s'accapare son odorat. Elles avaient parler de serpent, il ne tarde pas à comprendre. Mais il sent trop de sang, sans doute a t-on fait une plaie pour tenter de la purger, mais c'est trop lent, ça la tuera avant qu'elles ne lui ait administrer quoi que ce soit. Il faut qu'il lui donne plus de temps. Il connaissait ce genre de blessure, ce n'était pas une chose rare, pour lui roi déchu du Sud. Une fois de plus, il se laisse guider par l'odeur du sang empoisonné, et lorsque ses lèvres trouvent la plaie, il y verrouille sa bouche et aspire, profondément, puissamment. Hook crache, puis aspire de nouveau, et il recommencerait tant qu'il n'aura pas le gout doucereux habituel qu'avait le sang pour lui. Il répète ce geste quatre fois avant d'enfin recevoir sur la langue du liquide pur, non contaminé. Mais elle était loin d'être tirée d'affaire pour autant. Il recule, haletant. Enja, la plaie, il faut la refermer. souffle t-il, parlant enfin. Pour la suite, il ne connaissait pas la marche à suivre, il ne pouvait que s'en remettre aux deux guérisseuses, et c'était avec difficulté qu'il le faisait.
Il enjambe Phoenix et se place derrière elle, venant déposer délicatement son visage bouillant sur ses antérieurs. Il penche ses lèvres ensanglantées vers son oreille. Phoenix, Bébé, c'est moi. Tu peux pas mourir, t'as pas le droit, j'te l'interdis tu m'entends ? Tu dois vivre. Pour Enja, pour Aulia. Il marque une pause, sa gorge se serre. Et pour moi.

La mélodie régulière des vagues s'échouant sur le sable chaud berçait son esprit dérangé par la fièvre. Il y avait au moins ça pour la guider doucement, malgré la solitude qui la pesait à ce moment qu'elle pensait être dernier. C'était comme si tout se mélangeait, elle ne savait plus où elle était et elle en avait presque oublié qui elle était. De toute façon, dans pas longtemps, elle ne sera plus, pas vrai ? Tranquillisée et apaisée par le son de la mer près d'elle, elle se sentait déraper, glisser. C'était lent et douloureux, mais doux. Elle n'avait pas envie de s'en aller, elle n'avait pas envie de sombrer dans ce sommeil qui l'appelait, mais le venin avait aspiré ses forces. Elle était complètement désarmée et sans défense, elle ne pouvait plus se battre. Autant en finir tout de suite. Elle ferma les yeux et se mit à attendre, attendre que son heure vienne avec le soulagement qui vient avec. Elle n'en pouvait plus, elle souffrait trop.
Une voix, un cri de désespoir finit par la tirer de son état de semi-inconscience. La rouquine cligna faiblement des yeux, ses flancs se soulevant un peu plus. Ce fut la silhouette de sa fille aînée, sa fille bien-aimée qui se dessina au-dessus d'elle à travers ce voile flou qui l'empêchait de la voir correctement. Elle referma les yeux. Elle n'eut pas la force de lui dire quoique ce soit, mais elle aurait tant aimé lui dire à quel point elle l'aimait et à quel point elle était fière d'elle. Oh oui, si fière. Sa petite fille était devenue une belle grande jument, une merveilleuse guérisseuse. Si ses débuts avec elle dans son ventre avaient été difficiles et imprévus, Enja avait été l'une des plus belles choses qu'elle avait eu dans sa vie et pour rien au monde elle n'aurait changé le fait de l'avoir. Au fond, peut-être devait-elle remercier Winterfell de la lui avoir donné, bien que les circonstances de sa naissance avaient été stressantes pour elle. Sa famille avait toujours été sa plus grande force et le simple fait d'avoir sa première fille à ses côtés semblait lui insuffler l'étincelle de vie qui lui aurait presque manqué. Fiévreuse et bien vulnérable, Phoenix s'abandonna aux soins de sa fille, lui faisant entièrement confiance pour prendre soin d'elle. Les rôles étaient inversés, pour une fois. Honnêtement, elle ne se sentait pas capable de déterminer si elle allait s'en sortir ou si elle allait finir par se laisser entraîner vers le fond du gouffre. Mais si elle restait, ce serait pour les siens.
Ne tarda pas à arriver Fiona. L'alezane en eut brièvement conscience, toujours à deux doigts de l'inconscience. Elle sentit au fond d'elle que l'arrivée de son amie et apprentie allait apaiser la panique d'Enja. Ça la rassurait de savoir que quelqu'un d'autre était là pour sa grande fille si jamais elle s'en allait. D'autant plus qu'au fond de son être déboussolé et presque endormi, cela faisait poindre un peu d'espoir. L'espoir de peut-être enfin pouvoir s'accrocher à la vie qu'elle aimait tant.
La plaie ouverte de sa jambe la lançait et le sang contaminé coulait lentement. Elle-même ne saurait plus guider les deux guérisseuses si elle avait eu la force de le faire. Elle avait l'âme trop embrumée pour ça. Elle ne saurait dire si la tentative de décontamination de son sang l'aidait ou si elle l'affaiblissait. Probablement était-ce les deux en même temps.
Vint ensuite d'autres présences. Connues. L'une plus que l'autre, mais quand même. Elle n'avait pas trop conscience de ce qu'il se passait et elle n'arrivait pas à déterminer de qui il s'agissait, trop déconcentrée pour tenter de les reconnaître par l'odeur. Elle gémit faiblement lorsqu'elle sentit la succion d'une bouche sur sa jambe pour assainir le sang. Semblait-il que ce fut quelqu'un pour l'aider. Elle se laissa faire alors que son souffle se saccadait et qu'elle se sentait perdre pied... Mais cette voix, cette voix qu'elle connaissait et qui la faisait vibrer à chaque fois. Malgré son état, son coeur se gonfla un peu plus. Il était là. Comme toujours, il était sa bouée de sauvetage encore une fois. C'était lui qui avait tiré le sang ? Elle ne saurait dire et en fait, ça lui importait peu à cet instant. L'important, c'était qu'il était là, avec elle. Elle ouvrit légèrement les yeux, juste assez pour lui permettre de voir son visage à contre-jour. Elle aurait voulu le remercier pour tout ce qu'il avait fait, d'être là, d'être lui. Mais elle en était incapable. La gueule entrouverte, aucun son, aucun mot ne sort. Elle la referma, tout simplement. Elle s'affaiblissait alors que le sang continuait de couler de la plaie encore ouverte. Ses yeux se fermèrent et elle se laissa faire aux soins que les deux jument lui apportait. Elle tremblait légèrement. Elle avait froid, si froid. Mais l'ordre de l'appaloosa résonnait dans sa tête. Elle ne devait, ne voulait pas mourir.

désolée de la réponse hyper caca

Enja n'avait pas calculé grand chose, entre la venue de Fiona qui la soutenait dans ses soins, et Hooker qui venait de rejoindre le petit comité. Elle avait toujours le coeur qui battait trop rapidement, et son souffle lui échappait. Elle avait parfois des quintes de toux, parfois la tête qui tournait. Des sueurs coulaient le long de son dos, tandis qu'elle regardait ceux qui l'entouraient d'un regard absent, soit la vision rendue floue par les larmes ou par une sorte d'état fiévreux incontrôlable. Le sang s'écoulait de la jambe de sa mère, et Enja, écoutant la voix de son beau-père, s'attela à panser la plaie, mais ses propres jambes tremblaient tellement que ses mouvements étaient rendus moins précis.

Chacun de ses muscles, chaque parcelles de son corps, tout se contracte à l’unisson, en un bloc rigide, en la sentant ainsi trembler contre lui. Son front était si brûlant, et elle semblait avoir si froid à la fois. Ce n’était pas bon signe. Mais il devait prendre sur lui, ne pas lui faire ressentir son inquiétude, se montrer encourageant. Il lui caresse délicatement l’encolure, allant jusqu’à la moitié de cette dernière, puis remontant jusqu’à sa joue et ainsi de suite. Il lui murmurait des choses à eux, rien qu’à eux, oubliant les guérisseuses et l’étalon qui l’avait guidé, jusqu’à ce que Fiona approche, lui donnant des consignes de soins. Il redresse l’encolure et hoche la tête, s’empare délicatement des plantes que la jument guide vers lui. Il se renferme dans sa bulle avec Phœnix, même si elle n’est pas consciente ou qu’à moitié. Il tend sa massive encolure vers sa tête en suivant le chemin que celle de la rouquine lui offrait, guidant les plantes médicinales jusqu’à sa bouche. Bébé il faut que tu manges. Je sais, c’est douloureux, mais il le faut. Tiens, prends. Il pousse encore un peu plus les plantes jusqu’à ses lèvres, pour qu’elle fournisse le moins d’efforts possibles.


X se sent effroyablement inutile, observant la scène avec raideur. Il n’avait rencontré Phœnix qu’une fois mais il n’était pas indifférent à son sort, loin de là. Il tentait de ne pas se focaliser sur son visage agonisant, se concentrant sur Enja exclusivement. Elle semblait perdue, trop atteinte par le fait de voir sa mère ainsi. L’autre jument essaie de la faire se ressaisir, et elle finit par s’adresser à lui avant de disparaître chercher d’autres plantes. Les sens affûtés du pie étaient déjà en éveil, il guettait le moindre bruit suspect, la moindre odeur dérangeante. Il finit par approcher d’Enja, dont les jambes tremblaient. Si tu as besoin d’aide je suis là, dis moi quoi faire. souffle t’il avec douceur.

Phoenix n'entendait pas ou peu les voix autour d'elle, ça ne se résumait qu'à un écho cacophonique qui parvenait à ses oreilles sans vraiment avoir de sens où du moins sans qu'elle ne soit en mesure de le comprendre. Mais elle ressentait les choses comme des ondes qui rajoutaient à ses sentiments. L'angoisse d'Enja, l'inquiétude de Hooker, la persévérance de Fiona et l'impuissance de Xander. Tout se mélangeait en elle alors qu'elle luttait pour rester en vie alors qu'il serait si simple, si libérateur de se laisser aller à cette lumière blanche qui lui tendait les bras. Elle y fut tentée à chaque fois que les naseaux de l'appaloosa quittait sa peau brûlante pour recommencer ses gestes doux. Mais elle se ressaisissait bien vite. Ce serait si facile d'abandonner et de tout laisser derrière elle, devenir poussière et souvenir d'antan. Ce serait si facile, oui. Mais ce ne serait pas Phoenix.
Elle se concentrait le plus qu'elle le pouvait à travers ses pensées nébuleuses sur les gestes de son amant. Elle s'y accrochait comme on s'agripperait sur le bord d'une falaise. Retiens-moi. Garde-moi avec toi. Ne me lâche pas. C'étaient des mots, des impressions, des sentiments qui se bousculaient en elle. De vagues traces de pensées qui persistaient. Elle ouvrit ses yeux vitreux pour voir à travers de la lumière qui lui agressait les yeux, voir ce qu'il lui tendait. Des plantes. On tentait donc de la soigner. Par instinct, elle obéit. Son corps semblait si douloureux et engourdi à la fois. Mais elle essaya jusqu'à la réussite. Elle ne s'arrêta lorsqu'elle sentit les remèdes en train de descendre vers son estomac. Elle laissa sa tête retomber sur les jambes de son conjoint en soupirant faiblement. Il n'y avait plus qu'à attendre, plus qu'à espérer. Mais pour l'instant, elle referma les yeux et offrit à son corps un instant de repos. Elle avait fait ce qu'elle avait pu, maintenant elle se donnait un instant de répit, ses flancs se soulevant plus régulièrement, mais faiblement.