/ rider

/ LOV


La lionne sent ses muscles s'apaiser. Se détendre. Ça en est presque douloureux, comme si elle les avait contractés des années durant sans jamais s'arrêter. L'eau tiède bout à ses côtés, et les bulles viennent caresser ses flancs souillés par les cicatrices de ses derniers combats. Elle est pourtant attentive, toujours méfiante, toujours sur le qui-vive.
En vérité, elle ne sera peut-être jamais détendue, comme si une épée de Damoclès lui pendait toujours au-dessus de la tête.

¤ ALCANTARAZ ¤

L'étalon gris faisait le tour du royaume des ombres, comme à son habitude. Il s'approchait tranquillement des sources quand une odeur étrangère vint lui chatouiller les naseaux. Il pointa ses oreilles en arrières, redressa son encolure et tendit ses muscles avant de s'avancer vers la source où l'odeur était présente et entêtante. Il ronfla, les naseaux pincés quand il vit une jument à la couleur bizarre. Il l'observa quelques instants. "Qui es-tu et que fais-tu au Royaume des Ombres ? Tu veux nous rejoindre ?", dit-il avec un haussement de sourcil mi-intrigué, mi-méfiant.

Elle le sent arriver, car il n'y a rien d'autre ici que l'odeur de la source, l'odeur de la neige, l'odeur du Nord qu'elle connait si bien. Et la sienne, bien sûr. Alors, lorsqu'une odeur un peu musquée se pointe à ses naseaux, elle sait qu'elle a fait un bon appât. Lov ne sort pas du bassin, tournant simplement la tête et son regard sombre vers l'étalon ibérique qui s'approche d'elle. Elle incline la tête sur le côté, lui donnant un air malicieux, presque fou. « Chez moi, on commence par dire bonjour. » fait-elle avec un sourire carnassier, toutes dents dehors. Ses iris s'enfoncent dans ceux de l'étalon comme deux pieux. Elle perd son amusement pour se façonner un sérieux mi-hésitant mi-assuré. « Peut-être, oui. Tu es le chef ? »

Al' plante ses yeux dans les siens sans gêne et renâcle silencieusement. "Ouais bonjour", siffla-t-il en levant les yeux au ciel. Il avance vers la jument palomino et met ses pieds dans l'eau chaude. "Tu n'es pas chez toi", dit-il avec un sourire amusé. "Peut-être, oui", répondit-il en l'imitant avec un rire moqueur.

Le comportement et les réponses mesquines de l'étalon pourraient l'agacer ; mais au contraire, à cet instant, ça l'amuse. Jouer avec le feu, c'est sa spécialité. Elle hausse les épaules, comme si rien n'avait d'importance. Avant, ça l'était. Si j'avais voulu, j'aurais pu reprendre le Nord. J'étais héritière. précise-t-elle. Elle se dit que pour eux, ça serait peut-être bien intéressant d'avoir dans leur rang quelqu'un d'ici, certes, mais de plus, quelqu'un d'important – façon de parler, bien sûr. Puisqu'elle n'est qu'une erreur, un nom tabou, un enfant qui n'aurait jamais dû voir le jour. Malgré sa haine contre ses parents, elle n'a jamais renié ses origines. Donc si t'es le chef, c'est à toi qu'il faut s'adresser pour le recrutement ? J'veux faire partie des vôtres.

Elle le laisse entrer dans le bassin, sans bouger. Elle le fixe toujours. Comment peux-tu être sûr de ça pour chacun des tiens ? Tu ne peux pas savoir si je ne te trahirai pas, tout comme si d'autres ne le feront pas. C'est une question de confiance. Malheureusement, ici, elle doit être aveugle.

Elle le fixe, sans ciller. Ses crins blancs passent un instant devant son regard noir, elle les rejette avant de s'avancer dans le bassin pour se rapprocher de l'étalon. Même dans l'eau, sa démarche est féline, à la fois provocatrice et séductrice. Bien. Comment ? demande-t-elle d'une voix ferme.

Elle n'a que faire des signes qui décourageraient n'importe qui. Le danger, la menace, son allure rendue peu avenante par ses oreilles couchées en arrière. Elle le laisse s'approcher et ne recule pas. Elle le fixe toujours, comme un défi. Si c'est toi le chef, c'est à toi de me le dire. N'inverse pas les rôles trop vite. Elle tourne autour de lui, comme si c'était une proie.

elle arrête ses cercles pour vriller son regard profond et endommagé là, tout contre le sien, comme si elle voulait s'emparer de ses pupilles. il rit, elle reste silencieuse. alors tu ne peux rien pour moi ? demande-t-elle, inclinant la tête sur le côté, pour le titiller un peu.

des serpents, elle en a connu. surtout un.
un serpent qui l'a menée là où elle ignorait qu'elle pouvait aller. elle se rapproche de nouveau de lui, le frôle presque. je veux faire partie des vôtres. sa voix est assurée, lisse et vibrante à la fois.