Poison Ϟ plum

Malheureusement - heureusement ? - la silhouette qui se déplace avec lenteur à travers l'épais brouillard en se début de soirée fraîche, n'était pas un mâle. Ni un père, ni un frère. Ce corps qui se faufile entre les décombres, pouvait être une sœur, une fille. Un esprit tout aussi tourmenté cependant, par des démons dévoreurs qui ne cessent de lui rappeler qu'elle est seule dans ce vaste monde. Abandonnée, adoptée, incompréhensible.
Son dernier passage ici remonte à son entrevue avec Leio. Petit frère qu'elle ne souhaite partager avec personne. Depuis, plus rien. Peut-être avait-il eu peur d'elle. Plum s'est alors décidée a retourner aux ruines, dans l'espoir de le revoir, mais aussi de comprendre ce qui n'allait pas.
Au lieu de ça, son regard abyssal heurte le corps massif d'un étalon brun, inconnu de ses souvenirs. Immobile et seul tel un esprit. Comme elle. La jument noire se contente de s'arrêter, et de laisser ses yeux glisser sur les formes de l'inconnu.

La politesse. Une chose, parmis tant d'autres, qui n'existe pas dans le vocabulaire de la louve. Elle se contente de rester là, laissant son regard vagabonder sur le corps de l'étalon aux allures ibérique. Il ne semble pas menaçant. Mais les évènements récents lui ont appris à se méfier de l'eau qui dort.
Tu t'appelles ?
Sa voix s'élève comme un murmure d'outre tombe, sans mesquinerie, tout naturellement. Elle ne passe pas par quatre chemins ; bonjour, bonsoir, de la salive utilisée pour rien. Tandis qu'un nom, c'est plus précieux. Pouvoir en mettre un sur un visage, plutôt que : l'étalon, l'inconnu, toi, lui.

Zurik. A l'entente de ce nom particulier, la jument se laisse noyer dans le regard sombre de l'étalon brun, comme un typhon dont il est difficile de s'échapper. En lui régnait une étrange lueur attirante, un feu brûlant de souvenirs cachés, que l'on tente de faire disparaître. Mais sa contemplation s'arrête brusquement alors que son interlocuteur lui pose une question à laquelle elle ne s'attendait pas. Une question tout aussi particulière que lui.
Une louve ou un corbeau ?
Répète-t-elle sur un ton un peu évasif, ne trouvait pas réellement de réponse appropriée. Mais à choisir, elle connaissait la réponse idéale.
Une louve. Plum, officieusement.
C'est sûrement le trait qui lui correspond le mieux. Indéchiffrable, sauvage. Elle glisse facilement entre les doigts et de fond à merveille dans la foule. Et même si il ne lui a pas posé directement la question, la jument préfère mettre les points sur les i en précisant son nom. Du moins, celui qu'on lui a donné. Sans réellement savoir pourquoi, la demoiselle imite les faits et gestes de Zurik, arquant son encolure en col de cygne, les naseaux dilatés. A présent, elle avait un visage, un nom, et un parfum. Enivrant, soit dit en passant.

Lorsqu'il se décide enfin à s'approcher, la jument noire redresse peu à peu son encolure au fil des pas de Zurik, ne voulant en aucun cas rentrer en contact. C'était bien là quelque chose qui ne l'intéresse pas. Cependant, elle ne bouge pas lorsque ce dernier semble dessiner un cercle autour d'elle, d'un pas lent et calculé.
Je cherche mon petit frère.
Dit-elle, sincère, allant droit au but ; même si se dévoiler aussi facilement ne faisait pas parti de son caractère, peut-être pourra-t-il lui dire si il a vue, ou non, l'adolescent.
Et toi ?
Car elle n'était pas dupe, elle voyait bien que celui-ci ne venait pas de GS. Un membre de la Tribu, alors ? Cette pensée lui hérisse le poil, d'excitation.

Zurik a écrit:

zurik

La jument noire ne bougea pas d'un poil, mais avait cette mine glaciale. L'étalon s'arrêta devant elle, averti par l'expression de l'inconnue. Il avait l'impression d'avoir entré dans sa bulle, peut-être trop rapidement. Après tout, ils ne se connaissaient point. Une inconnue tout droit sorti de la brume de ces ruines. Il ne pouvait lui faire confiance. Du moins, pas dans l'instant présent. Le bai détourna son regard vers les colonnes de ces lieux, ces pierres pâles remplies d'histoire qui les entouraient. Lorsque l'ébène lui avoua qu'elle était à la recherche de son frère, il reposa son regard sur celle-ci. Était-ce bien vrai? Ou était-ce un mensonge inventé de toute pièce, une attrape. Une louve rusée aurait fait de même, selon l'étalon. Il décida donc de se détacher un peu d'elle, reculant de deux ou trois pas. « Désolé je n'ai pas vu personne par ici. Seulement des roches et de la poussière. » Zurik regarda autour de lui, méfiant. La jument mystérieuse était la première forme de vie qu'il avait trouvé depuis son arrivée sur ces terres. Il resta donc surpris à l'idée qu'il y aille d'autres équidés dans les parages. L'inconnue lui demanda à son tour ce qu'il faisait ici. Surpris de sa franchise, Zurik détourna son regard, de sorte à regarder le vide. Il se posait la même question. Que faisait-il ici? Était-il, lui aussi, une âme vagabonde? Le bai eu l'impression à son tour d'être à la recherche de quelque chose, mais impossible de savoir quoi. Certainement pas son cruel père. « Ça n'a pas d'importance. » lança-t-il à la jument noire, d'un ton neutre. Il ne savait pas lui-même pourquoi il était ici et moins encore pourquoi il devrait donner ces informations à la ''louve''. Il devait se méfier. Après tout, elle semblait tout droit sortie d'un conte de fantômes. Cependant, elle portait une odeur enivrante et l'étalon voulait tout de même en savoir plus sur elle.

(c) DΛNDELION

La louve hausse un sourcil imaginaire, très peu emballée par la révélation que l'étalon bai lui offre, encore moins lorsque celui-ci recule de quelques pas comme pour lui laisser de la place. Ou être mal à l'aise de savoir quelque chose, et de ne pas avoir envie de lui dire. Elle se méfie encore plus lorsque ce dernier dernier détourne le regard. Il doit avoir fait quelque chose, ou savoir quelque chose, pour être aussi étrange. Peut-être est-elle folle pour penser à de telles choses, mais lorsque le sujet tourne autour de son petit frère, Plum pouvait parfois être enfermer dans un asile. Sa deuxième déclaration ne lui plait pas, vraiment. Vers lui, lorsqu'il a la tête tournée, la louve fait un pas ; non pas avec l'idée d'attaquer, mais l'irrésistible envie de savoir rongeait les entrailles de la jument, qui serre les dents. Ça n'a pas d'importance. Ces mots continuent de tournoyer dans l'esprit de la femelle, qui pousse finalement un profond soupire d'insatisfaction, après un long silence pesant.
Très bien. lâche-t-elle finalement, calquant le ton neutre du mâle. Elle pivote sur ses membres pour s'approcher des ruines, empruntant un couloir étroit. Un semblant de rictus survole ses lèvres quelques secondes, pendant lesquelles la jument jette un dernier regard perçant un l'inconnu, avant de disparaître de son champ de vision.

Le brouillard devient plus dense, s'épaissit, apportant avec lui une désagréable - ou le contraire ? - sensation de froid, d'avoir passé la porte des enfers. Que, à tout moment, un démon pouvait surgir de nul part. Un mauvais rêve. Une mauvaise chose faite dans le passé. Mais ici, pas de tremblement de terre, pas de glissement de terrain. Alors pour la silhouette noire, ce fut simple de se deplacer entre les dénombre à vive allure sans craindre de trébucher, et se retrouver comme une idiote sur le sol en pierre. Elle grimpe quelques marches sur sa gauche, après avoir bifurquée à droite, puis à gauche. Ces dernières n'étaient pas hautes, et menaient à un couloir effondré, juste au-dessus de Zurik. Attends moi ! Un sourire presque carnassier étire les lèvres charbons de la demoiselle, qui plisse ses membres et étire son encolure vers le bai à travers la brume opaque.
Pourquoi ? souffle-t-elle alors à son oreille, son corps en hauteur se discernant légèrement à travers la fumée glaciale. Ce petit jeu, d'être pour une fois la chasseuse et non la proie, fait naître chez la louve un sentiment étrange. Comme un feu ardent, incontrôlable, qui envahi la totalité de son corps.

Démasquée. Plume s'empresse de reculer, ne voulant prendre aucun risque de se retrouver attrapée et attirée vers le sol. Face à l'empressement de l'étalon chocolat, un sourire fier vient se creuser dans les lèvres charbons de la demoiselle, qui se lève pour faire demi-tour, sans prendre la peine de lui répondre. Aux pieds des escaliers, elle l'attend. Elle le sait, le sent, il ne restera immobile bien longtemps. Bingo.
Elle se mit à rire. Étrangement. Jusqu'à aujourd'hui, seul Yume avait réussi cet exploit. Et ce n'est pas un rire d'outre tombe, mauvais, glacial. Mais bien quelque chose de presque mélodieux, enfantin, amusé par la situation. La grande noire s'empresse de le rejoindre, se laissant porter par ses sabots à travers la brume. Elle lui mordille parfois une épaule, change de côté, afin de faire de même avec l'autre.