jour 344.

La grille de sa cellule est ouverte. Et pourtant, Emy ne souhaite pas sortir. Toujours couchée sur un tapis de mousse, elle observe attentivement de ses yeux verts les quelques prisonniers restant.

C'est finalement Sueño, de son corps massive, qui se dessine dans son champ de vision. Il se lève, encore et encore, pour admirer l'extérieur et cette sensation de liberté qu'elle procure. Elle le comprend, il doit avoir envie de se dégourdir. Et surtout de rentrer chez lui ; mais ça, Emy ne le comprend pas. Parce qu'à présent, depuis de très long mois, c'était ici, chez elle.
Tu as faim ?
Demande-t-elle, comme tout les jours.

Ce n'est pas la réponse positive qu'il lui offre qui surprend la jument, mais plutôt ce ton de voix très calme qu'il emploi. Il s'était enfin apaisé ; ou prépare-t-il un coup monté ? Peu importe de toute manière, ce n'était pas son problème mais celui des gardiens du cachot. Elle regarde à gauche, puis à droite. D'ailleurs aujourd'hui, elle se demande où ils sont passé. Quittant son lit douillet, Emy observe sa gamelle. Vide. Mince, elle va devoir fouiller dans le garde manger.
Euh.. je t'apporte ça.
A pas de loup, la captive ouvre doucement la porte de sa cellule, s'assurant qu'il n'y avait vraiment personne. Elle s'engouffre dans le fond des cachots, trouvant une pomme qui traînait là, pour l'apporter à Sueno comme si de rien n'était, la faisant rouler sous les barreaux.

Non.
Dit-elle dans un soupire, n'appréciant pas de lui donner une réponse si courte.
J'espère pour toi que les tiens ne partirons pas.
Puis elle repart dans sa cellule, observant l'extérieur, se laissant bercer par le doux son de la pluie. Pour elle, il a fallut que les siens partent, pour qu'elle ne soit plus relâchée. Enfin, à moitié.

Sa question ne l'étonne pas. Après tout, fallait tenter le tout pour le tout. Elle secoue sa tête de gauche à droite.
Même avec de la bonne volonté.

La jument grise coucha ses oreilles, ne supportant plus de tous les voir ainsi. Elle regrettait aussi le temps où elle était seule, entre ces murs.
Tu seras libéré, un jour.
Dit-elle d'une voix calme.
Mais si je te libère, c'est ma vie qui est en jeu.

Non, vous risquez rien, c'est que des paroles en l'air.
Dit-elle, l'air sincère. Pourtant, même elle, avait du mal à croire à ses paroles. Même si Emy n'avait personne se faire exécuter, elle se doute bien qu'ils en étaient capable.
Je suis désolé pour ta famille.

Son coeur se gonfle, encore et encore de le voir dans cet état. Elle se revoit, des années en arrière, espérant atteindre la porte sortie. Elle avait frappé sa cage jusqu'à en perdre la tête, se blesser jusqu'à l'os, ne plus savoir qui elle était. Et puis, ils sont tous parti..
Non, elle ne voulait pas qu'ils partent, sans qu'il puisse revoir sa fille.
Sueño, si ils le savent, je serais tuée..
Dit-elle en se remettant sur ses quatre sabots, alternant entre la porte de sa cellule et l'extérieur. Son regard resta fixe sur la pluie. Puis, après de longues minutes de silence, elle reprit la parole.
Tu devras écouter ce que je te dis, de disparaître de la circulation, toi et ta fille. Car si tu es capturé de nouveau, je ne pourrais plus rien faire.
Car à ce moment là, elle sera sûrement morte.