Pure morning | Absalom

Caelis, non loin, jouait au foot avec une noix de coco. Cette dernière, trop mûre, finit par lui éclater entre les sabots. Elle hennit longuement, tristement. Un vrai cri de désespoir. Parce que c'était la seule qu'elle avait trouvé et qu'elle se sentait un peu folle ce matin là.

La grisette se reprit et regarda la noix de coco d'un air courroucé. Plus Mara grandissait, plus il lui semblait reprendre de sa jeunesse, devenir à nouveau une jeune adulte un peu délurée. Ce qu'elle était, d'ailleurs. Fixant la noix de coco éclatée avec un certain mépris, Caelis sursauta, les quatre jambes écartées, en apercevant ce poulain à la robe familière, aux traits connus. Mais ce n'était pas le jeune qui lui faisait cet effet, non, c'était le fruit au sol, comme un cadeau. Souriant d'un air doux, elle s'approcha, et lui lança en gloussant: Votre altesse, c'est bien généreux tout ça! Effectivement, Mara lui avait bien parlé du fils de Ramsès et de sa mentor. Si elle n'avait pas peur de Ramsès, ce ne serait pas un yearling qui l'effraierait, et surtout pas un ami de Mara. Tout du moins, les traits qu'il partageait avec sa mère la poussèrent à le dévisager. S'en rendant compte, elle camoufla sa gêne en abaissant la tête dans une révérence exagérée. Je m'appelle Caelis. Je suis la mère de Mara.

Caelis sourit. Bien sur, elle savait qui il était, son prénom et ses origines, mais ne lui en fit pas part. La grisette hocha la tête. De même. Paraître cordial, c'était primordial, elle fit donc un effort, non sans que son sourire se tende un peu. Comment va ton cher père?

La grisette se détendit à nouveau. Si Ramsès va bien, alors tant mieux. Il ne viendra au moins pas se défouler sur elle. Il ignorait sans doute tout de la vérité, Caelis le supposait. Une lueur de tristesse passa dans son regard. Oui...oui...elle va bien. Encore un peu troublée par le départ de sa mentor, Caelis se détourna de lui et alla plonger ses lèvres dans l'oasis. Espérant qu'il ne l'entende pas, elle murmura, plus pour elle-même que pour lui: Ta mère était quelqu'un de formidable.

Caelis secoue la tête, puis fait volte-face. Ses yeux pétillaient, et on aurait pu y lire: "Je te dirai tout ce que je sais, mais patiente!". Finalement, elle se redressa, et sa queue fouailla l'air. Elle piaffa d'un air joueur. Dis-moi, est-ce que tu t'y connais un peu en combat? La grisette faisait à peu près sa taille, d'ailleurs. Miu aurait comprit où elle voulait en venir.

Caelis sourit à l'intérieur. Extérieurement, ses oreilles frémirent légèrement. Rien de plus. La grisette s'ébroua et s'approcha un peu plus de lui, en gardant une distance de quelques mètres. Une distance mesurée. Bien...j'ai eu un très bon maître du sait...veux-tu que je t'apprenne un peu? Ce serait un peu comme un jeu! La dame se met à piaffer. Elle mettrait un point d'honneur à le former aussi bien que sa mentor l'avait fait pour elle. Aussi bien qu'elle l'aurait fait pour lui. Si tout du moins il acceptait. Pour rehausser la chose, elle ajouta: Et, si tu parviens à me surprendre, je te révélerais un secret. Elle n'en doutait pas qu'il y arrive, d'ailleurs. Bien que Miu ne lui ait pas tout appris son savoir, Caelis restait une adversaire non-négligeable, ayant amélioré sa propre technique depuis le temps.

Caelis, ayant l'habitude des entourloupes de son père, ne fait qu'esquisser un mouvement de recul. Elle dresse ses oreilles, cligne des yeux, souffle des naseaux. La grisette le dévisage calmement, puis soudain, se cabre à demi, projetant ses antérieurs en avant tout en hennissant fougueusement. Elle secoue sa crinière, retombe et pose ses naseaux au sol. Caelis renâcle, comme un taureau, le fixant d'un œil joueur et amusé. Pas mal!