◉ never let it go

La mer enfin. Aslaug l'avait cherché depuis son arrivée. Le contact de l'eau, malgré sa température, lui réchauffait le coeur. Ce petit retour au source lui donna le sourire, les vagues souvenirs d'enfance qui n'étaient pas entachés d'une lutte mentale ou physique lui embaumèrent l'esprit.
Doucement elle longea la plage, cherchant un moyen d'en avoir plus, de découvrir une immensité de sable doux qui n'attendait que ses pas.

Caelis, quant à elle, était perchée sur une corniche de pierre. Le sable était une texture qui était devenue familière, pour elle. La mer, avait toujours été une étrangère. Mais elle lui évoquait des souvenirs: ceux de sa mentor morte, qui était une pirate. Ceux de sa fille adoptive Iwa, qu'elle avait trouvée ici même. Soufflant de l'air par ses naseaux, elle hennit doucement, puis remarqua la silhouette grise un peu plus loin. Intriguée, elle abaissa sa tête et ses oreilles, puis descendit de la corniche, sautant à terre, se cachant derrière le caillou. Caelis venait de trouver un cobaye.

N'ayant jamais été bien forte pour sentir les présence étrangère, Aslaug ne pouvait se rendre compte qu'il l'épiait. Même le saut de son espion ne la fit pas sursauter ou bouger le moindre poil de sa moindre oreille.
Tâtant la roche de ses naseaux, elle cherche un passage. La plage ne pouvait pas s'arrêter là. Elle éternue, le froid de la pierre lui remonte jusque dans la gorge. C'est sans nostalgie qu'elle se rend compte qu'elle a perdu l'habitude du froid.

Caelis, à pas de loups, s'approche d'Aslaug. Elle la contourne, passant derrière de grosses roches sémantiques. Sa robe grise apparaît parfois entre deux, l'espace d'une fraction de seconde. Elle s'arrête, silencieuse, étonnée de ne toujours pas avoir été repérée. La grisette rabat ses oreilles, l'encolure basse, tapie à l'ombre d'un bloc de pierre. Cachée par celui-ci. Mais, elle reste proche de sa cible. Bien, la discrétion, c'était ok. Maintenant, le talent de comédienne. Brusquement, Caelis se déporte sur le côté, et fait claquer ses dents près de la croupe d'Aslaug. Elle gronde, avance de quelques foulées, se retourne et feint un air craintif, soufflant fortement par ses naseaux.

Aslaug commence à avoir envie de se retourner, de vérifier si personne ne la suit mais sa parano lui a tellement joué de tour qu'elle continue d'avancer.
Malheureusement pour elle, aujourd'hui était un jour nécessitant la plus grande prudence. Les naseaux de l'autre grise l'ont frôlé. Elle se retrouve bousculée contre la roche, prise de surprise.
« Qui êtes-vous ?! » Crie-t-elle, apeurée comme une souris face à un tigre.

Apparemment, ça marchait. Toute contente - sans le montrer - que sa manœuvre ait marché, Caelis se détendit un peu, la tête restant néanmoins haute portée, légèrement inclinée et les oreilles couchées dans sa crinière. Son ventre s'arrondissant doucement avec la grossesse, elle avait au moins une excuse. La grisette soupira par les naseaux. Pardon, je...croyais que vous étiez une ennemie. Sa queue fouetta ses jarrets. Elle ne se présenta pas. Vous n'en êtes pas une, hein? La grisette regarda les environs d'un air inquiet.

Aslaug ne comprend pas la scène qui se déroule devant elle et dont elle est personnage principal. Le comportement de la grise semblait étrange, mais notre petite Aslaug n'en était pas à sa première rencontre bizarre. Aussi, comme à son habitude, elle resta fortement sur ses gardes.
« Je ne suis l'ennemie que de ceux qui me veulent du mal. » Fit-elle pour toute réponse, d'un ton neutre mais qui transportait bien trop le soupçon qui planait quant aux intentions de sa nouvelle rencontre.

Caelis passa outre les suppositions d'Aslaug. Elle soupira, se détendit, ramena ses oreilles en avant, posa ses naseaux au sol pour montrer qu'elle "se rendait", et montrait par là, un signe de respect également. Et vous avez bien raison. Je m'appelle Caelis, Caelis d'Egypte. Et sourit, gênée. Il arrive que des ennemis me suivent, je vous ai prise pour l'un d'eux.

Aslaug ne saisit pas les phrases que lui débitent l'autre grise. Tant pis, elle reste sur ses gardes et l'écoute prudemment. Elle redresse pourtant vivement les oreilles.
« Y-a-t-il une guerre ici ? » S'enquière la petite grisette, apeurée par cette nouvelle.

Non. Fit-elle, neutre. Puis elle ajouta, reculant une de ses oreilles quand l'autre restait pointée. Mais la guerre arrive. La grisette souffle bruyamment de l'air par ses naseaux.

Telle une flamme renaitrait doucement, l'évocation d'une éventuelle guerre semblait provoquer une certaine excitation chez Aslaug, sûrement les veines qui parlaient.
« Vous accepteriez de m'en dire davantage ? » S'enquière-t-elle, d'un coup plus confiante.

J'ai pas de raison de dire non...que voulez-vous savoir? La grisette allongea son encolure, sa curiosité piquée. Elle aussi, avait envie que le combat arrive. Après qu'elle ait accouchée. Caelis posa ses naseaux contre son ventre tendrement, puis s'en rendant compte, rabattit brusquement ses oreilles. Elle contempla son renflement ventral d'un air méfiant.

Aslaug observe la grise qui semble en constant combat contre sa maternité. Notre grisette du nord hausse les épaules, elle ferait tout pour que cela ne lui arrive jamais. Juste responsable pour que ne s'occuper que d'elle, comment imaginer prendre soin d'un plus petit. Et puis, qui voudrait faire naître quiconque dans un monde en guerre ? Les séquelles ne se rattrapent jamais.
Elle secoue la tête, ses vieux souvenirs n'ont rien à faire ici. « Qui s'oppose à qui. Pour quelles raisons. » Elle marque une pause avant de reprendre. « De quel côté se situer également.. »

La futur mère renâcle, reposant un regard plus qu'intrigué sur la Nordique. L'Egypte contre les trois autres territoires. Elle lâcha un petit rire. C'était grotesque. Quoique, à une époque, les grecs n'avait-ils pas vaincu les Turcs, alors que ces derniers étaient là aussi, trois fois plus au moins? Les dominants d'Egypte tyrannisent les trois autres. Alors ils se révoltent. Pendant le silence d'Aslaug, Caelis se focalisa sur les bruits de l'océan. Sa mentor naviguait-elle sur un bateau fantôme, à présent? Je ne saurai quoi vous conseiller...les alliances se font, les complots aussi...le résultat est plus qu'incertain.

Aslaug se raidit, elle observe toujours la grise, attentive au moindre mot.
« Et vous venez d'Egypte, c'est bien cela ? » S'enquière-t-elle tranquillement, le rictus un peu forcé.
Cette histoire l'impressionne, comment cela pouvait-il se produire ? Qu'une guerre éclate en de si tendres terres ? Aslaug se rend bientôt compte que la violence n'a pas de frontière et que la haine s'épand aussi loin que la vie va.