≈ i see fire.

n e o s.
Le soleil frappe fort sur mon corps parsemé de tâches noires. C'est désagréable, je n'aime pas beaucoup la chaleur comme ça. Peut-être que c'est depuis que Poséidon a laissé son fragment en moi. C'est récent, pourtant, mais il me semble vivre avec depuis toujours. Bon, j'exagère. Je m'approche du Nil, en fais trembloter sa surface, ça me fait sourire. Je relâche ma concentration à cette tâche dès que j'entends des pas discrets derrière-moi.

Il devait lui parler. Il devait le trouver. C'est pourquoi, ne sachant trop pourquoi, Azlander était venu se perdre au beau milieu de l'Egypte. À la recherche d'une des rare personnes en qui il pouvait avoir confiance. Et c'était tout naturellement que zeus s'était dirigé vers le Nil. Car, il le savait, Neos était insatiablement attiré par l'eau depuis qu'il avait reçu son fragment. C'est pourquoi, après avoir repérer la trace du jeune appaloosa, l'ébène l'avait tout bonnement suivit, attendant patiemment que son ami et bras-droit de repère.

Alors même que j'entends un bruit derrière-moi, je me retourne. J'avise la grande silhouette noire et souris discrètement. Je m'approche de mon dominant et ami proche, avec un pas hâtif. « Azlander. » le salué-je en hochant la tête, toujours très respectueux avec lui quand bien même le connaissais-je depuis longtemps.

Et lorsque Neos se retourna et que leurs prunelles se croisèrent, Azlander sentit ses lèvres s'étirer en un sourire chaleureux et amical. Il connaissait ce jeune mâle depuis qu'il était tout poulain. C'était, pour ainsi dire, lui qui l'avait élevé. Seulement, l'appaloosa se bornait depuis toujours à garder une certaine distance respectueuse dominant-dominé avec lui et cela dérangeait quelque peu le grand noir. Ainsi, lorsque son ami le salua poliment, il ne peus s'empêcher de ronfler des naseaux en secouant son épaisse crinière sombre. « Allons Neos, pas de ça entre nous, je te l'ai déjà dit. » Le réprimanda gentiment le frison, en s'approchant du fleuve, pour le frôler du bout des naseaux. Puis, se redressant, As' jeta un rapide coup d’œil à son bras-droit, un petit sourire au coin des lèvres. « Comment vas-tu ? » Lui demanda-t-il, soucieux du bien être de sa horde. Car après tout, s'ils étaient dans cette galère à présent, c'était entièrement de sa faute.

J'adresse un sourire franc à mon dominant. Même si je ne devrais pas, c'est plus fort que moi. Même si je l'ai longtemps considéré comme le père parfait de substitution, qu'il m'a élevé, il reste mon dominant, à ce jour. Je m'approche avec lui du cours d'eau, me retenant d'agir dessus, comme si c'était devenu une obsession.
Bon, ok. C'est ce que c'est devenu. « Bien. » Et c'est la vérité. Rien ne me rattachait vraiment à notre précédent lieu de vie, et si certains déplorent cette malédiction, elle me va à merveille. Même si j'évite de m'en vanter. « Et toi ? » lui demandé-je en l'observant, me demandant si le poids de tous ces changements ne pesaient pas trop sur ses épaules, bien qu'elles soient solides.

Bien. Encore une barrière, qui fit rouler des yeux à l'étalon, avec un petite sourire contrit. Quoi qu'il puisse lui dire, Neos semblait convaincu que sa place de bras-droit malgré le passé qui les liaient l'obligeait à tenir son père adoptif, son protecteur, en si haute estime qu'il se mettait lui même des barrières. De ce fait, un simple soupir accueillit ce mot, tandis que l'ébène regardait maintenant le ciel, lui aussi quelque peu ... subjugué par l'élément sur lequel son fragment avait effet. « Hm. Si tout ceci n'était pas en partie lié à mon erreur, peut-être que je le prendrait bien. Sans parler de cette puissance qui grandit en moi, déferlant dans mes veine dès que le relâche ne serait-ce qu'un peu la pression. » Confia Azlander, tandis qu'au dessus d'eux, de nombreux cumulus se formaient et se déformaient en quelques instants. Signe qu'en effet, l'ébène venait de relâcher une partie du pouvoir que lui conférait son fragment.

J'observe le ciel. Son pouvoir est plus bien dur à contrôler que le mien. Il ne le fait pas volontairement, et c'est ce qui change tout. Dès son moindre changement d'humeur, le ciel change et l'orage se déchaîne. Moi, il faut que je le veuille pour déplacer le moindre cube d'eau. Quoiqu'en fait, j'ignore aussi beaucoup de mon pouvoir, encore. Comme nous tous.
Je remarque qu'il a l'air préoccupé. Ou est-ce moi qui ne le suis pas assez ? « Ce n'est pas de ta faute. » soufflé-je d'abord en recommençant à jouer distraitement avec l'eau. « Tu penses que ça s'arrêtera un jour ? » La malédiction, je veux dire, mais je ne précise pas. Je pense qu'il a compris. Je pense que, comme nous tous, il n'a que ça en tête.

Lui aussi observe le ciel. Aussi perturbé que lui même. Azlander à tenu jusqu'ici, mais aujourd'hui, il a de plus en plus de mal à cacher l'ombre et les doutes qui voilent son cœur. Cacher la puissance du fragment de Zeus lui coûte énormément de temps et d'énergie. Un jours viendra où il perdra le contrôle, où tout dégénérera, où il les condamnera tous, à nouveau. Et un bref soupir lui échappe, tandis qu'il repose les yeux sur son protéger et ami. Son confident. Le fils qu'il n'a jamais eu. « Si, justement. C'est moi qui ai ordonné l'invasion de ce territoire. C'est à cause de moi s'ils sont tous mort. Et donc, c'est de ma faute si l'on se retrouve ici avec ces problèmes. » Confie-t-il, tandis qu'au dessus d'eux, de grand et gros nuages gorgés de pluie se forment. Image même de l'état d'esprit de l'ébène. Et à la question de Neos, il serre les dents et quelques gouttes viennent s'écraser sur leur dos. « Je ne sais pas ... je m'efforce de trouver une solution, mais rien ne fonctionne. Même en déversant la totalité du pouvoir que je ressent en moi, le fragment ne disparaît pas ... »

Je l'écoute s'accuser tout seul. Certes l'ordre était venu de lui, puisqu'il était notre dominant. Mais nous avons suivi, n'est-ce pas ? Nous ne sommes pas encore devenus des moutons. Si nous avions voulu refuser, nous aurions pu. Mais nous l'avons fait, tout autant que lui. Pourtant, je ne dis rien de tout cela, ne voulant pas le contrarier. « Cesse de t'accuser. » murmuré-je seulement en battant l'air de ma queue. Mes yeux sont rivés au ciel qui s'agite. Je ne dis rien. Je ne suis pas en mesure de calmer quoi que ce soit. Mes yeux, sérieux, observent maintenant Azlander. Je m'approche de quelques pas, et prends une voix qui se veut rassurante, malgré mon jeune âge comparé au sien. « Je ne crois pas qu'il faille aller à l'encontre de ces pouvoirs. Nous devons les accepter. »

Les oreilles de l'étalon pivotèrent plusieurs fois, d'avant en arrière. Ne pas s'accuser ? Comment le pourrait-il ? « Chacun de vous est libre de ses choix. Mais n'oublie pas que l'ordre venait de moi. L'idée de base elle même émanait de moi. Je suis responsable de ce qu'il nous arrive. » Répondit-t-il un peu plus durement qu'il ne l'aurait voulu, tandis que la pluie au dessus d'eux ne faisait que s'intensifier. À la mesure même des regrets qu habitaient le grand frison. Lui d'ordinaire si calme, si droit. Lui qui ne laissait jamais rien transparaître. Mais là, à cet instant, face à son ami, Azlander se permettait une petite faiblesse. Un long soupir lui échappa et il leva à nouveau les yeux vers le ciel. La proposition de Neos n'était ni totalement insensée, ni totalement la solution. « Ne pas aller à l'encontre ? » Lâcha l'ébène, en regardant son ami droit dans les yeux. « Pour toi et moi, peut-être. Mais regarde Björn. Observe June. Crois-tu réellement que faire corps avec leur fragment leur apportera quelque chose de bon ? » Oui, Az' se souciait réellement de ses compagnons. Peut-être pas de tous - Rowena et Sweeney ayant été entre autre mis à l'écart - comme il le devrait. Mais il s'en souciait. Réellement. « J'ai croisée June il n'y a pas plus tard qu'hier. Elle était poursuivie pas un mâle du Nord. Tombé dans le piège de son pouvoir. Imagine un peu si mon frère décide d'y succomber lui aussi ? » Mais ce que l'étalon ignorait, c'était que le mal était déjà fait. Et ce, depuis longtemps déjà.

La discussion m'agace. Nous ne sommes pas d'accord, et je n'ose pas le contredire comme je devrais le faire étant donné qu'avant qu'il soit mon dominant, il est aussi mon ami. Je renâcle et reste un moment silencieux, pensif. « Je sais bien que ça ne nous réussit pas à tous, merci. » lâché-je avec une légère pointe d'agacement, blessé qu'il puisse penser que moi, je ne me soucie pas de mes congénères. Que je ne me soucie même pas de Björn ou de June. Est-ce que je lui donne l'impression d'être si égoïste ? Je soupire, las déjà. « Je n'ai pas de solution miracle, tu sais. J'essaie juste de trouver de petites solutions aux problèmes qu'on a. Mais visiblement, ça ne convient pas non plus. Je ne sais pas quoi te dire, alors. » reprenais-je en observant l'horizon et le Nil, immobile, poursuivant sa course sans équivoque. Je ne veux pas le blesser, mais il n'aime aucune de mes répliques depuis que nous avons entamé la discussion, alors que j'essaie juste de l'aider – de nous aider. Préfère-t-il peut-être que je lui dise qu'il a raison, et que nous sommes perdus ? Je peux aussi, mais ça ne nous avancera à rien. Vexé, je n'ouvre donc pas plus la bouche après ça. Il me connait bien, il sait que mon tempérament est changeant, et que mon humeur reviendra sûrement à la normale dans quelques minutes seulement.

Cette fois, Azlander comprend bien qu'il à été trop loin dans ses mots. Mais la pression était tellement forte qu'il commençait à avoir du mal tout gérer. Et, se sentant totalement responsable de tout cela, il n'arrivait plus à décharger. Il n'arrivait plus à penser correctement. Essayer de contrôler la puissance nouvelle qui l'habitait lui occupait plus de la moitié de l'esprit. Il lui restait donc très peu de place pour ses propres pensées. « Désolé Neos, je ne voulais pas te froisser ... » Soupire-t-il alors, alors que la pluie commence à se calmer. Invitant son ami à l'accompagner, d'un simple signe de tête, le frison entame une courte ronde le long de la rive du fleuve, tout en surveillant les crocodiles, posté à quelques mètre de là, sur l'autre rive. Une attaque de ce genre de prédateurs ne faisait pas partie des choses que l'étalon avait envie de subir. « Apprendre à contrôler nos fragments serait une bonne chose. Mais qu'en serait-il pour celles et ceux qui ne peuvent faire corps avec eux ? June, Björn ... Dazzle, ou même Ekla, qui n'était même pas présent lors de l'attaque ... » Demanda-t-il finalement, montrant à son ami qu'il n'était pas totalement contre l'idée qu'il lui avait soumise. / J'ai peur que cela aide Rowena et Sweeney à semer le trouve un peu partout ... / Lui confia enfin le dominant, mettant des mots sur la plupart de ses troubles.

J'apprécie qu'il me fasse part de ses troubles les plus sincères. De me faire voir que je suis « dans la confidence ». Je hausse les épaules. Pourquoi me pose-t-il toutes ses questions ? J'ai moins de la moitié de son âge. S'il n'a pas les réponses, je ne les ai pas non plus. « Je reste persuadé que de toute façon, essayer de faire avec sera toujours mieux que de s'escrimer à vouloir les faire taire. » Puisque ça n'est pas possible de les faire taire, il en est le premier témoin, non ? Alors pourquoi de toute façon partir de tout ça en se disant que c'est mal et que c'est contre nous et... et tout ça ? Je ne suis pas de cet avis. Pourtant, je n'suis pas très optimiste niveau vie de tous les jours. Mais là, je le trouve clairement défaitiste. Ceux qui ont du mal s'en remettront, apprendront à faire avec. De toute façon, s'ils n'ont pas le choix, que veut-il que je lui dise ? Qu'ils se suicident, peut-être, pour y mettre fin ? Je soupire, ne lui faisant pas part de toutes ces pensées là. Ma réponse lui suffira, et si ce n'est pas le cas, je n'irais de toute façon pas plus loin. Il est trop ancré dans son point de vue. Peut-être que moi aussi. J'en sais rien, pour tout vous dire. Après tout, j'suis encore « un gamin », même si il ne m'a pas nommé à ce rang pour rien. « De toute façon, ils le faisaient déjà avant. Ils ont peut-être quelque chose en plus pour foutre le bordel dans nos rangs, mais nous aussi. » soupiré-je à propos des deux omégas. Je ne le regarde pas, marchant à ses côtés en fuyant un peu son regard, craignant qu'il ne me trouve trop insolent. Mais après tout, c'est ce qu'il veut d'un bras-droit, non ? Quelqu'un de confiance qui lui donne un avis franc. Si j'allais toujours dans son sens, ça ne servirait à rien.

Il était vrai que l'étalon avait souvent tendance à s'enfermer dans ses penser. À n'écouter que lui, à tout prendre sur lui. En réalité, plus le temps passait et plus se dire que tout ceci était de sa faute l'aidait à expier le fait qu'il ne comprenait pas réellement ce qui lui arrivait. Ce qui leur arrivaient. Il en connaissait la raison. Mais le fondement ? Quant au aboutissant ... l'ébène avait peur de les connaître. « J'ai surtout la crainte qu'en apprenant à nous en servir, cela ne nous mène qu'à notre perte. Cela pourrait permettre à Khaos de se proclamer roi. Pousser Björn à devenir le dangereux guerrier qu'il n'est pas. Ou que sais-je encore ? La puissance est bonne, dans une certaine mesure. Mais à trop en user ... la soif devient mortelle. » Répondit Azlander, le regard rivé droit devant lui, tandis qu'il continuait à exprimer ce qu'il pensait tout bas depuis qu'ils étaient arrivés ici. Unis, leur clan pourrait certainement avancer et passer outre la malédiction. Désunis, c'était leur survie même qui était en jeu. « J'aurais du agir les concernant lorsqu'il en était encore temps. » Osa-t-il jurer, conscient que ce genre de mot n'était pas ce à quoi il avait habitué Neos. Mais les choses étaient telle que ces deux fauteurs de troubles ne l'aidaient en rien dans sa quête de solution. « Quoi qu'il en soit, nous devons nous réunir. Chacun devra, dans les semaines qui viennent, apprendre à contrôler son fragment. » Décida finalement le dominant, en marquant un temps d'arrêt. « Ensuite, chacun devra veiller sur son prochain. » C'était la seule solution. S'ils voulaient que leur secret soit gardé, la horde entière devait agir. Même ces foutus Oméga, qui ne méritaient rien de plus qu'un exil pur et dur.

En effet, ses mots me surprennent. Je frissonne tout entier et pose un regard profond sur mon dominant. Je sais qu'il peut parler de toutes les choses à coeur ouvert avec moi. Et il le sait aussi, c'est sans doute pour ça qu'il l'a toujours fait. Mais ses paroles ont quelque chose de choquant. De violent, qui ne ressemble pas à Azlander. Pas à celui que je connais en tout cas, pas celui qui m'a élevé, dans la douceur d'un foyer alors que je n'étais qu'un orphelin abandonné et démuni. « Ne dis pas ça. Ils font partie du troupeau, comme les autres. Si tu les avais tué, c'est toi qui aurais été mal vu. » J'ose dire les choses comme elles le sont, parce que c'est bien ça qu'il voulait dire, n'est-ce pas ? Je n'aime pas spécialement Sweeney et Rowena. Mais ils font le tout que nous sommes. Sans eux, il y en aurait d'autres qui seraient classés au rang désobligeant d'omégas. On ne peut pas vivre dans un groupe parfait. « Je suis d'accord. » murmuré-je simplement en hochant la tête, continuant de marcher à ses côtés. Mes yeux se posent sur le Nil. Un crocodile nous observe avec véhémence, et je me concentre assez pour faire jaillir du fleuve un fin cours d'eau qui vient s'échouer sur son corps reptilien. Surpris, il se retourne et plonge dans l'eau, à couvert. Je lâche un rire. Un peu enfantin, un peu mesquin, un peu moqueur. Mon pouvoir m'épuise lorsqu'il est utilisé trop longtemps ou que les masses d'eau sont véritablement conséquentes. Mais sinon, je dois bien avouer qu'il me plait, moi. Qu'il n'est ni trop dur à maîtriser, ni à double tranchant. Ou peut-être que je ne connais pas encore ses aléas.