Ψ Il arrive toujours un moment où le choix s'impose

Et dieu ce qu'il pouvait détester ça ! Choisir. Car au final, quoi qu'il fasse, il y avait toujours quelqu'un qui en souffrirait. Et l'isabelle détestait faire souffrir ses proches. Même s'il ne lui en restait que très peu. Robin partie, il se retrouvat à nouveau ici, face à ce chemin, face à ses choix. Arrêté à deux pas du début du chemin, le regard rivé dans le vide, il hésitait. Que devait-il faire ?

La rouquine s'était mis en tête de redécouvrir les terres de son enfance. De son pas impatient caractéristique -et en même temps, le seul leg de sa mère- elle parcourait le territoire du midi, son regard furieux balayant les alentours.

Pour la première fois depuis longtemps, H n'était pas vraiment à l'écoute de ce qui l'entourait. Ainsi, il ne remarqua même pas la présence de la petite jument alezane.

A contrario, Aelwënn peut difficilement manquer l'étalon, tout imposant qu'il est, arrêté à un embranchement. Autrement dit, il bouche le passage. La rouquine sent son sang bouillonner, et sait par avance que son manque flagrant de retenue la poussera à faire une esclandre. Elle se stoppe à la hauteur de l'étalon dans un boucan impossible, et le toise froidement. -Tu gênes.

Il l'a entendue arriver. Il l'a vue aussi. Et il aurait pu se décaler. Mais non. Il reste là, droit comme un i, à la regarder, sa prunelles mordorée flambant de colère. Comme celles de sa mère. J'en ai strictement rien à carrer. Répondit Hönir, d'une voix qui ne permettait pas la sur-enchère. Ignorant jusqu'alors qu'il avait devant lui sa petite sœur perdue.

Oh, mais quelle amabilité ! Le sang de la rouquine ne fit qu'un tour, et ses oreilles s'aplatirent sur son crâne, alors qu'elle faisait claquer ses dents dans le vide. Puis elle sembla se calmer, s'astreignant à afficher une indifférence de surface, sans se soucier le moins du monde du fait que son attitude contrastât méchamment avec son agressivité passée. -Vraiment, je ne me souviens pas d'avoir croisé de personne aussi aimable et avenante que toi ! Ironisa -t- elle, un brin méprisante. -Sauf peut-être ma mère !

Continuant de la regarder sans ciller, le grand mâle ronfla des naseaux, mécontent. Lui aussi bouillait de l'intérieur. Il ne s'était que trop retenu depuis son retour. Et sa part d'Harmonie n'aspirait qu'à une chose : ressortir. Heureux de l'entendre. La mienne serait heureuse de le savoir. Claqua-t-il, adoptant exactement la même mauvaise fois et le même mauvais caractère que sa bicolore de mère.

Le voir réagir de la sorte la fit sourire intérieurement. Elle n'en restait pas moins bien agacée, mais ce genre de joute verbale, qu'elle aimait provoquer sciemment, n'était là que pour l'amuser, au final. -Oh vraiment ? Et comment elle s'appelle, ta maman ? Que j'aille lui dire à quel point son fils est charmant !

La question le fit tiquer. En général on demande aux gens comment ils s'appellent au lieu d'en référer à leurs parents. Commença-t-il en la toisant. Plus les instants passaient et plus elle lui rappelait quelqu'un. Quant à ma mère tu pourra toujours la chercher, tu ne la trouvera pas. Mais tu peux toujours aller le dire à mon père, il sera content de t'envoyer manger ta propre arrogance. Il se fait appeler Chao. Fit-il, en avançant d'un pas, obligeant la petite rouquine à reculer. Car dans tous les cas, elle ne faisait pas le poids.

La réprimande la fit rire. -Mon dieu, je n'en ai tellement rien à faire des bonnes manières ! Rétorqua -t- elle avec désinvolture. Lorsqu'il avança, elle se força à rester immobile, ne cédant pas face à l'imposant étalon. Par fierté. Ou parce qu'elle en avait décidé ainsi. Mais la suite la fit tiquer. -Attends, Chao tu dis ? Comme dans Chaodence ? Et Harmonie, ta mère c'est Harmonie ?

Qui te dit que mes manières sont bonnes ? L'accusa-t-il en s'approchant dangereusement d'elle, bien décidé à passer ses nerfs sur cette gamine malpolie. Hönir n'était pas d'humeur aujourd'hui et la rouquine allait bien vite comprendre son malheur. Jusqu'à ce qu'elle cite le prénom de ses parents. Plaquant les oreilles, l'isabelle renâcla, tout en reculant d'un pas. En quoi cela te regarde-t-il ? Commença-t-il, avant de pousser un soupir : elle ne lâcherait visiblement pas l'affaire. Oui, mes parents sont Chaodence et Harmonie. Et alors ?

Il se rapprocha encore, l'écrasant par sa taille, et l'obligeant à lever un peu la tête afin de maintenir le contact visuel. Mais elle ne céda pas plus, et ignora royalement sa première question. Car autre chose la préoccupait à présent. Etait-ce lui, son grand frère qu'elle n'avait que très peu connu ? Lui, l'enfant chéri, que sa mère avait aimé dès la première seconde ? Elle se sentit jalouse, soudainement. Quoi ? Mais non ! Non, elle n'était pas jalouse, elle n'avait que faire de l'amour de sa maudite mère ! Secouant la tête, elle riva son regard sombre dans celui de son frère, puisque c'était lui. -Il se pourrait qu'on ait les mêmes parents. Salut grand frère !

Se rendant alors compte de qui il avait devant lui, l'étalon se redressa d'un coup, la toisant de haut en bas, choqué. Ainsi, cette gamine impromptue et irrespectueuse était sa sœur ? Aelwënn ? Lâcha-t-il alors, sous le coup de la surprise. Mais bordel où est ce que tu étais passées ?! Et la surprise fit place à la colère. Longtemps contenue, longtemps écartée, elle explosait maintenant.

-Il paraît, oui. Finit-elle par laisser tomber, assez froidement. Assez déçue en fait. Quoi, maintenant des reproches ? -Quoi, en quoi ça t'intéresse ? Ça n'a inquiété personne à l'époque. Ce n'était pas totalement faux, du moins de son point de vue. Sa mère et elle s'étaient éloignées sans en informer personne, et personne n'était venu les chercher. -Si tu veux tout savoir, Maman a voulu partir. J'étais trop petite pour rester sans mère, je suis partie avec elle, fin de l'histoire.