les pousses d'hier

**Messages :** 19280 **Inscription :** 29/03/2013 **Age :** 24 **Pseudo :** boo

/NYVEÈN
A petites foulées, elle écrase la neige délicate de ses sabots. Un petit bruit presque sourd et crépitant la satisfait. Jusqu'à ce qu'un accord rompt la mélodie. Curieuse, l'akhal à la robe d'onyx fouille de ses naseaux ce qui pouvait fausser la chanson de la neige écrasée.

/ OROS

Une vieille chanson. Une mélodie qu'il avait cru oublier à jamais. Il aurait préféré mourir que de ne plus jamais l'entendre. Peut-être pour ça que t'es revenu, gamin, pour crever ici. Ils rient, là dans son crâne. Ça devient assourdissant. Le Lion frappe le sol de son antérieur encore solide et sa carcasse poussiéreuse se fige pour observer une silhouette, un peu plus bas. Posté en contrehaut du gouffre, il l'observe. Il la détaille, la dévore. Encore une fille d'elle, à coup sûr. Décidément, vous faîtes bien partie de la même espèce, elle et toi ! Encore des rires.
Ils n'ont pas tort, au fond. Des gosses par-ci et par-là. Pas tous droits, pas tous bien réglés. Des marginaux, des bancals, des étranges. Des noms tabous. Sans un mot, il emprunte le sentier descendant jusqu'au fond du gouffre. Peut-être jusqu'en Enfer, garçon.

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Elle s'empressa d'abandonner ses recherches qu'elle venait d'entamer pour se concentrer sur un bruit entendu plus bas. En contre-bas, voilà un vieux. Il lui rappelle quelqu'un, croisé de nuit, une fois dans sa vie. Vous souhaitez un suicide assisté peut-être ? Dit-elle en empruntant à son tour un autre sentier, moins tracé, pour rejoindre le vieux plus rapidement.

Il s'est arrêté, la laisse venir à lui. Elle a la même allure reptilienne, la même voix sinueuse. Il ne peut pas s'en empêcher. Il voit Rowena partout où son sang a laissé quelqu'un. En entendant sa phrase, il lâche un rire bref. Rauque, bancal. Oh, ne t'en fais pas pour moi, j'ai pas besoin d'aide pour ça. Il la dévisage, son regard est insistant, il veut savoir. Qui es-tu ?

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Nyveèn apprécie ce qui sort du commun, non pas forcément ce qui est totalement hors du commun; mais ce regard lui plaît, il est insistant et sans retenue. Nyveèn, et vous ? Je crois connaître quelqu'un qui vous ressemble.

le Lion essuie un frisson. quelqu'un qui lui ressemble ? une lueur s'allume dans ses yeux chargés d'émotions vides. un de ses enfants est encore là, peut-être ? s'agit-il de red, ou d'un autre ? il tressaille et remet son cerveau en place. oroszlàn. sans doute n'a-t-elle jamais entendu parler de lui, il l'espère en tout cas. moi aussi, je crois connaître quelqu'un qui vous ressemble. ses yeux se rivent au sol. la plus belle ombre de sa vie.

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Lövojka dit-elle avec un brin de questionnement. C'était forcément de la même famille, tout lui criait cela. Vous avez sûrement connu ma mère, Rowena. Il n'y a personne d'autre à qui elle puisse ressembler.

Il tressaille. En effet. C'est ma fille. Il ne lui dit pas le reste.
Il ne lui dit pas qu'il ne la connait pas. Qu'il l'a abandonnée aux griffes de sa mère le jour de sa naissance, que pour elle, sûrement n'est-il qu'une ombre floue. Que son nom est une absence pour son propre enfant. Il ne peut s'empêcher de frissonner à l'entente du nom. Rowena. Son araignée. Son regard fuit un instant sur le côté avant de revenir se river dans les yeux de l'akhal. Elle lui ressemble beaucoup trop. Son esprit s'emmêle, à certains moments, il se croie devant elle. Il doit faire un rude effort de concentration pour garder à l'esprit que ça n'est pas elle. En effet, je l'ai connue. Assez bien pour avoir eu un enfant avec elle, en tout cas. Son ton est un peu moqueur, parce qu'il se moque de lui-même. Même si Red est sa plus belle fierté, il admettra toujours que c'était une erreur. Elle était sa plus féroce et sa plus belle faiblesse. Il détourne le regard, ne supportant pas les images qui reviennent à lui quand il la regarde, elle, sa fille.

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Avec qui as-tu eu Lövojka et quel est l'enfant que tu as eu avec ma mère ? Elle était franche, mais elle n'en perdait pas sa subtilité. Il avait l'air de dire ce qu'il avait sur le coeur, alors donner des noms ce serait une chose aisée. Elle ne savait pas grand chose sur sa famille si ce n'est le nom de son père et de sa mère. Elle savait qu'ils avaient une soif d'élitisme et noblesse couplée à la vengeance. Qu'ils avaient eu beaucoup d'enfants, ensembles, et séparément. Mais ni le nombre, ni les noms n'étaient connus de Nyveèn. Elle dévoile un nom à son tour, le seul qu'elle connaisse hormis Rowena. Sweeney, c'était mon père.

Et il n'a aucune raison, en vérité, de lui cacher le nom de ses enfants. Il n'en a pas honte, n'est-ce pas, mon Lion ? Il tressaille pourtant légèrement face à la fermeté des paroles de la jument, à laquelle il y oppose la sagesse de sa voix et le calme de son timbre. Sa voix en impose, plus par sa dextérité que par sa fermeté. La mère de Lövojka s'appelle Hel. Fille de Sweeney et Septenrê. L'enfant que j'ai eu avec ta mère s'appelle Redjim. Il ignore si les noms qu'il cite lui disent quelque chose ou non. Peu importe. La jeune akhal devant lui semble vouloir dresser un arbre généalogique, si cela est possible dans ces deux familles complètement fracturées et décomposées de partout. Il ne précise pas, lui, que Septenrê était aussi sa propre mère et que Hel et lui étaient en réalité demi-frères et soeurs. Que Lov est le fruit d'un inceste tabou. Pas besoin de le savoir. Il frémit au nom de Sweeney, même s'il vient lui-même de le prononcer. La rage qu'il a conservé de l'étalon bai est toujours présente au fond de lui. Quelque part, peut-être vient-elle d'une part de jalousie. J'imagine bien, oui. Je suis désolé de parler de ton père ainsi, mais c'était pas franchement quelqu'un de bien.

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Merci souffle t-elle après la révélation des noms. Alors en réalité ... Hekâ et elle avaient un lien de parenté. Nyveèn était une sorte de tante. Bon, pourquoi pas. Je l'ai vu le jour de ma naissance, c'est vrai qu'il portait en lui bien des malheurs ... et cette plaie par l'humain. Elle fait une pause, puis reprend, en regardant cette fois-ci le vieil étalon (eh oui faut l'admettre) du plus profond de ses abysses noires. Ma mère a toujours eu un penchant pour le grandiose, l'art et la beauté du fragile ainsi que la mort. Mon père avait tout cela. Si tu lui as fait un enfant, tu dois avoir aussi tout cela en toi.

Il ne dit rien de plus sur Sweeney, car cela lui rappelle trop de mauvais souvenirs. Et dieu sait comme aujourd'hui les souvenirs sont puissants, chez lui. Il l'écoute toujours, avant de cesser de l'observer pour distraire son cerveau qui manque de ne plus faire la différence entre elle et sa mère. Ses mots écorchent ses pensées et le sourire qui nait sur ses lèvres se tord un peu. Oh, ça, il n'y a qu'elle qui pourrait le dire. Elle est toujours en vie ? demande-t-il d'un ton qu'il s'efforce de garder neutre, ignorant totalement si Rowena s'est enfuie loin d'ici ou si elle a périt.