My love is your disease.

Elle sirotait sagement son cocktail, assise au bar. Perdue dans ses pensées, elle faisait abstraction de tout le reste. Les verres s'enchaînaient, peut-être un peu trop rapidement. Les yeux perdus dans le vague, elle se laisse emportée par ses souvenirs. De temps en temps, un sourire étire ses lèvres. Et, de temps en temps, sa mâchoire se crispe. Myosotis tourne finalement la tête et ses prunelles bleues s'arrêtent sur une silhouette connue. Automatiquement, son échine se hérisse et ses oreilles se couchent sur sa nuque. Elle marmonne quelque chose d'incompréhensible avant de fuir le bar à toutes jambes. Que fuit-elle ? Rien, pourtant. Une fois dehors, elle se laisse glisser le long de la devanture du bar. Peut-être que ce dernier verre était le verre de trop...

La tête lui tourne et elle manque de tomber à plusieurs reprises. Non pas parce qu'elle est trop soûle - bien qu'effectivement elle soit complètement torchée - mais plutôt parce qu'elle se sent réellement pas bien. Elle a le cœur au bord des lèvres. Pourtant, Myosotis fait l'effort de se redresser, notamment lorsqu'elle entend une voix qui semble lui être adressée. Elle relève les yeux avec une certaine lenteur et bien qu'elle voit légèrement trouble, elle reconnaît immédiatement Sueño. Son cœur loupe un battement et... Elle s'évanouit. Et voilà un gros cachalot lamentablement échoué en pleine ville.

Vaguement consciente, elle sent le souffle chaud de quelqu'un se poser sur son corps endolori. Elle pousse un léger grognement lorsqu'on se met à la pousser, sans doute pour tenter de la réveiller. Puis elle entend des bruits de pas qui s'éloignent... avant de revenir vers elle. Quelque chose de frais est appliqué sur son front et ça lui fait un bien fou.

Bon sang, qu'est-ce qu'il avait à la secouer comme un prunier ? L'eau lui dégouline le long du visage et elle finit par ouvrir un œil, paresseusement.
- Je ne suis pas entrain de mourir, je te rassure, grommelle Myosotis entre ses dents.
Aujourd'hui, il n'avait pas besoin de sortir sa cape de super-héros. Enfin du moins pas pour elle.

Il lui lâche la serviette sur la gueule et elle pousse un petit soupir. Décidément, ils étaient vraiment incapables de se comprendre. La dorée secoue légèrement sa tête pour faire tomber la serviette. Ses prunelles bleues se posent ensuite sur l'horizon. La silhouette de l'espagnol se fond presque dans le paysage.

Elle n'avait pas détaché ses yeux de l'étalon isabelle. Il semblait pas vraiment dans son assiette. Plusieurs blessures marbraient son corps. Qu'avait-il fait, encore ? La voix de la dorée s'élève de nouveau dans les airs ;
- Sueño... ? Souffle-t-elle, se demandant s'il se retournerait ou pas.
Il était si froid, si distant. C'était gênant comme situation... C'était comme si rien n'avait existé. Comme s'ils ne s'étaient jamais aimés... Et c'était terriblement blessant.

Qu'il se rassure, ce n'était pas au programme. Myosotis n'avait pas tellement envie de repenser à tout ça également... Même si elle ne cessait d'y penser au final. Elle ne pouvait pas s'empêcher de penser au passé. De penser aux bons moments et aux mauvais... Et surtout, elle n'arrivait pas à se convaincre d'arrêter de l'aimer. Au début, elle pensait pouvoir être forte. Elle pensait que ça lui passerait avec le temps, que ce serait comme sa séparation avec Kieser. Sauf que là, rien n'était pareil avec Sueño.
- Je... Merci pour la serviette, lui souffle-t-elle avant de détourner son regard de lui.
Elle ne sait pas comment s'y prendre. On dirait une gamine qui cherche à demander quelque chose à ses parents. Elle soupire. Peut-être que si elle écrivait une lettre, ce serait plus simple.

Myosotis serre les mâchoires en sentant Sueño si gêné. Elle regrette presque de l'avoir appelé. Peut-être aurait-elle dû le laisser s'en aller, finalement. Après tout, aimer c'est aussi savoir laisser l'autre partir, n'est-ce pas ?
- Qu'est-ce qu'il t'es arrivé ? Elle demande enfin, peinée de le voir si amoché.
Et c'est drôle parce que si ses blessures sont externes et donc visibles, les siennes à elle, elles sont internes et loin d'être visibles...