La marche

* Il est tard, la nuit est déjà là depuis un bon moment. Tout le monde dort dans la stabulation. Je suis couchée mais je n'arrive pas à m'endormir. Aujourd'hui ils m'ont séparé de ma mère. Je me retrouve dans un nouvel élevage, je ne connais personne. Ils m'ont attaché dans un coin pour ne pas que je rue dans tous les sens. Me voilà donc couché au fond de la stabulation.
Soudain, un bruit attire mon attention. Des sabots martèlent le sol et des hennissements résonnent de toute pars. Je ne fais pas vraiment attention. Cela doit être deux jeunes mâles qui se battent. Mais une forte odeur commence à se propager. Elle me prend la gorge et me fait tousser, j'en ai les yeux qui piques. Tout le monde cours pour tenter de sortir.
De grandes hombres rouges rentrent par le toit. Je me lève et tend le cou pour mieux les observer. "Au feu! Au feu! Fuyez!" Le feu. C'était donc ça. C'était fascinant de le voir danser sur les poutres.
Un bruyant craquement se fit entendre. Le silence était revenu. Mais le temps que les chevaux réagissent, un morceau du toit tomba. écrassant des chevaux et laissant se propager le feu sur la paille. Les hennissements emplifièrent. Certains frappaient les murs pour les faire tomber. Beaucoup tombèrent au sol et se firent piétiner par nos congénères. D'autres ruèrent pour faire dégager de leurs membres les flammes grimpantes.
Pendant que j'observais cet enfer, un craquement sourd résonna au-dessus de ma tête. La peur s'empara de moi, je me mis à tirer le plus fort possible sur ma corde. Cette dernière ne céda pas et le bois tomba à une quarantaine de centimètres de moi. Le feu s'emplifia. Il allait s'attaquer à ma jambe! Je m'acharnais sur la corde, encore et encore. Le feu monta sur ma jambe Il va me manger! Je vais mourir ici! m'écriais-je intérieurement.*
NON! mon cris se heurta à la brume. Quelques oiseaux s'envolèrent. Un silence de mort, perturbé par mon souffle saccadé. Je repris mes esprits et regarda mon postérieur droit. encore ce rêve... pensais-je. Je me leva avec peine et tenta de scruter les environs. Mais comment surveiller les environs alors que l'épaisse brume mange le moindre repère? Je levais les yeux aux ciels pour tenter de me repérer. En vain, la cime des arbres était beaucoup trop haute.
Je me mis en route, ayant pris le soin de choisir une destination à l'aveugle. pourquoi je suis venue ici déjà? Depuis un certain temps, je ressentais le besoin de voir des chevaux. Il faut que je sache si je suis la dernière de cet élevage. où a bien pu partir l'étalon? Ma jambe me fait mal, je ne pourrais pas marcher longtemps aujourd'hui. Encore une journée qui s'annonce longue et douloureuse.

La jument continuait son chemin, essayant d'être la plus discrète possible. Complètement perdue dans ses pensées: y-a-t'il des êtres vivants sur ces terres? L'endroit me semble désert. Un peu désorientée et un peu apeurée, elle tentait de se rassurer. En vain. Si je ne vois personne, personne ne peut me voir. C'est déjà un bon point. Ce n'est que lorsqu'elle sentit une autre odeur qu'elle s'arrêta de marcher. Un animal passait non loin d'elle. Les sens en alertes, elle tournait doucement sa grosse tête et plissait les yeux pour mieux scruter à travers la brume. Sa respiration se coupa lorsqu'elle vit une forme plus grande qu'elle. Les oreilles en arrière, elle attendit. L'ombre devint une forme qu'elle avait connu par le passé. Une autre jument. Ce signe de vie dans un lieu peu accueillant ralluma l'espoir de la jument. Même si l'excitation était grande elle ne laisserait rien transparaître. Qu'allait lui apporter cette rencontre? Elle décida de ne pas parler avant l'inconnue. Elle redressa les oreilles afin d'être le plus à l'écoute de ce qui l'entourait. Est-elle venue seule?

Lotza ne se laissa pas intimider par la taille de l'inconnue. Pendant un moment elle cru même que c'était un mirage. Mirage qui se dissipa lorsque l'autre jument pris la parole. Surprise, la jument resta silencieuse durant quelque seconde. Peut-être un fantôme? ça ne m'étonnerai pas... La folie allait-elle enfin la prendre? Elle se décida tout de même de répondre.
- Bonjour, on m'a prénommé Lotza. elle restait sur ses gardes. Je suis une âme de la brume qui s'amuse à tourmenter les chevaux qui passe dans le coin. dit-elle avec une lueur d'amusement dans le regard. En quatre ans c'était la première fois qu'elle voyait un autre équidé. Et vous? Puis-je savoir qui vous êtes?
Son caractère s'était forgé au fil du temps. Préférant se moquer gentiment que de parler froidement. ou même de ne pas répondre. La solitaire fixa la jument. Elle n'était pas sûre que sa petite plaisanterie allait amuser la galerie. Si il y avait un affrontement, elle serait dans de beaux draps.

Guide? Wiha? Parle-t-elle une autre langue? Ces mots se répercutèrent dans le crâne de la jument.
- De même. Elle fut surprise d'entendre ce mot: groupe. Elle s'empressa donc de lui demander: tu as dis que tu est la guide d'un groupe? Mais où veux-tu qu'il y ait un troupeau de chevaux dans cet endroit?! La solitaire commençait à perdre patience, agitant les oreilles. ça doit faire quelques lunes que je suis arrivée dans cette forêt et pourtant je n'ai croisé personne.
Certes, sa présentation était médiocre, voire très enfantine. Mais elle ne pouvait pas laisser quelqu'un dire qu'il y avait un troupeau de chevaux alors que cela faisait 3ans qu'elle n'en avait pas vu un seul. Sous l'effet de l'énervement, elle tapa nerveusement le sol d'un seul coup. Comment était-ce possible?

Un peu surprise par cette question elle répondit finalement:
- Apparemment oui. Même si cela fait un bon p'tit moment que je suis perdue ici. D'ailleurs tu sais comment on sort de là?
La jument n'en pouvait plus de cette forêt. Aucune visibilité, pas d'endroits cachés pour se coucher... De plus, elle commençait vraiment à être fatiguée. Se dandinant une jambe à l'autre. Elle finit par penser que cela agacerait la Jiyuu.