The dead are talking... and she is listening ▬ S

Dans la brume matinale se découpe la silhouette de la candide Séléné. Aujourd'hui, c'est son jour de repos et elle compte bien en profiter au maximum. Depuis une bonne quinzaine de minutes elle arpente le massif, dans l'espoir de trouver deux ou trois plantes aux vertus médicinales qu'elle compte tester sur elle même. Bah oui, puisqu'elle n'a plus le droit d'apprendre avec les guérisseurs, elle compte le faire elle même, cette petite sotte.
La petite jument à la robe étoilée s'arrête finalement devant un gros rocher couvert de mousse. Ici, il n'y a rien de plus végétal. Mauvaise pioche. Elle reprend alors sa route, concentrée sur son objectif, mais pas sur le reste. Son imprudence risque de la mettre en danger, à un moment ou un autre, c'est certain. Et le pire, c'est qu'elle ne semble même pas s'en rendre compte. Elle commence tout juste à descendre le massif lorsqu'une meute de loups l'encercle. Immédiatement, elle réalise son erreur et se fige. Son premier réflexe, c'est de coucher ses oreilles contre sa nuque pour adopter une posture plus menaçante qui n'effraie pas le moins du monde les loups. Séléné n'a jamais croisé de loups auparavant alors elle ignore tout d'eux et surtout le comportement à adopter face à une meute. Les grognements gagnent en intensité, la forçant à reculer. Tout ses muscles se tendent. Tu pourrais les charger pour t'enfuir, dit Hécate, inquiète. Pour risquer une morsure ? Mieux vaut directement attaquer ! La meilleure des défenses, c'est l'attaque ! Rétorque aussitôt Artémis. Séléné aimerait bien avoir le choix mais elle se sent incapable de bouger. Sa seule option, c'est de se recroqueviller sur elle même et d'encaisser les coups. Peut-être se lasseront-ils ? Séléné s'attend à un impact imminent et à sentir les crocs des prédateurs s'enfoncer dans sa chair. Mais, étrangement, ce moment n'arrive pas. Et, même si elle est curieuse, elle n'ose même pas se redresser pour comprendre ce qu'il se passe.

Les grognements des loups arrachent quelques frissons à Séléné qui n'ose toujours pas se redresser. Le regard rivé sur le sol, elle reste malgré tout attentive aux bruits qui l'entourent. C'est ainsi qu'elle reconnait le bruit typique d'une arrivée au galop. Là, une once d'espoir la gagne. Quelqu'un arrive, et il arrive vite. très vite. Le bruit qui suit, c'est celui d'un choc sourd suivit d'un couinement d'agonie. Rassemblant tout son courage, Séléné finit par se redresser. Son regard tombe alors sur une imposante silhouette qu'elle reconnait immédiatement. Snow ! Son cœur se met à battre frénétiquement, mais cette fois ci, ce n'est pas à cause de la peur. C'est parce qu'elle est heureuse. D'un rapide coup d’œil, elle analyse la situation. Les loups restants sont devant son père, qui fait office de barrière de protection pour les empêcher de l'approcher de nouveau. Curieuse, la tachetée observe les environs, à la recherche d'Artémis et Hécate. Bien étrangement, ces deux là ont disparues. Par contre, une autre présence attire son attention. Sa mère est là. Elle se tient aux côtés de Snow, l'entourant d'un mystérieux halo bleu. Séléné cligne plusieurs fois des paupières, comme pour s'assurer d'être bien éveillée et de ne pas halluciner. C'est la première fois qu'elle voit ça. Quelle est l'utilité de cet halo ? Elle n'a jamais fait ça avec elle. D'ailleurs... Elle ne s'est tout simplement jamais autant approché d'elle. Alors... Pourquoi le fait-elle avec Snow ?

Pour le moment, la meute ne semble pas décidée à abandonner la bataille. Les grognements s'intensifient encore et pourtant, aucun d'entre eux n'ose se rapprocher. Visiblement, Snow représente une assez grande menace pour qu'ils hésitent à s'y frotter. En même temps, ça parait logique... Il vient tout de même de tuer l'un des leurs et sans forcer en plus de ça.
Le halo bleu gagne en intensité, lui aussi. Et là, les loups se mettent à reculer. C'est comme s'ils étaient capable de le voir, eux aussi. Ce n'est très certainement pas le cas mais peut-être peuvent-ils le ressentir. En tous cas, ils finissent par s'éloigner. D'un pas léger, la jeunette vient se placer à côté du grand frison.
- Heureusement que tu n'étais pas loin, souffle-t-elle d'une petite voix en levant timidement son regard vers lui.

Séléné enfouit ses naseaux sous la longue crinière ondulée de son père. Depuis combien de temps n'ont-ils pas eu de temps à s'accorder, rien que tous les deux ? Beaucoup trop, dirait Séléné. Alors elle profite de sa proximité en pressant son corps contre le sien.
- Comment tu fais pour être si fort ? Demande-t-elle, les yeux brillants d'admiration.
Pour elle, Snow est le plus fort ici. Personne ne peut rivaliser avec lui. Il est parfait.

Séléné ne s'est jamais sentie aussi bien qu'en cet instant. Lovée contre son père, elle se sent en sécurité. Bien qu'en vrai, elle ne se sente jamais réellement en danger. C'est son côté candide qui veut ça. Parfois, elle est imprudente. Comme ce matin, avec la meute de loups.
- Tu m'as manqué, déclare-t-elle en humant à son tour le parfum du grand frison.
Avec les récents changements du clan, il avait été très occupé et puisqu'elle avait récemment quitté les Wiha, ils ne se croisaient plus tant que ça. Peut-être qu'un jour ça changera. Séléné n'exclue pas de retourner un jour à ses origines et donc chez les Wiha.

Séléné se laisse bercer par la voix grave de son père. Il lui a vraiment beaucoup manqué, durant tout ce temps. Et forcément, elle a énormément de choses à lui dire.
- Je pense que Jiyuu te l'as dit mais je suis partie du clan pour devenir l'apprentie sorcière de Belzé, commence-t-elle. J'ai rencontré ses autres apprentis, ils sont sympas. Je pensais que ma formation serait vraiment cool... Mais Belzé est mort il n'y a pas longtemps. Du coup je ne sais pas si je dois continuer... Lui confie-t-elle, hésitante.
Elle marque une courte pause. Elle a encore beaucoup de choses à lui raconter. Elle décide de commencer par ce qui la travaille le plus.
- J'ai un ami, Saturne. Il m'a proposé de rejoindre la tribu. Je ne sais pas si j'en ai envie, souffle-t-elle.
Peut-être qu'elle préfère revenir chez les Wiha... Elle est perdue.
- J'ai revu Gryffon aussi. Je sais pas si tu te souviens de lui.
Elle lui avait vaguement raconté qu'elle se sentait bizarre lorsqu'il était avec elle. Son seul secret, le concernant, c'était lorsqu'il lui avait confié avoir envie d'elle. Ce sujet là était bien trop délicat pour qu'elle en parle à son père.
- Je me suis fâchée avec lui et je suis un peu triste, avoue-t-elle finalement.
Elle fait maintenant mine de réfléchir pour voir si elle n'a rien oublié. Si, évidemment. Elle a consciemment oublié des choses mais parce qu'elle ne peut pas le dire à son père.
- J'ai vu maman, souffle-t-elle comme première esquisse pour introduire ce sujet si délicat qu'est son don.

Son petit geste fonctionne ; il apaise Séléné. Si bien qu'un sourire glisse sur ses lèvres. Et puis ses paroles lui font plaisir aussi. Avec Snow, elle se sent toujours capable de faire mieux. Juste pour le rendre fier.
- Merci papa, souffle-t-elle, le cœur plus léger.
Elle sent son père sur la retenue lorsqu'elle lui parle de la tribu. Elle est un peu intriguée, surprise aussi, mais elle fait comme si de rien n'était. Si son père n'est pas enthousiaste à cette idée, c'est qu'elle ne doit pas être si bonne. Séléné l'efface aussitôt de ses préoccupations. Elle n'ira pas.
- Je pense que je vais revenir chez les Wiha. J'ai appris que Jiyuu et Yume n'étaient plus là... Alors ils ont peut-être besoin d'un guérisseur ! S'exclame-t-elle, ravie à l'idée d'aider son ancien clan. Son clan de cœur.
Pour ce qui est de Gryffon... Elle aimerait bien être aussi optimiste. Ses oreilles se couchent contre sa nuque.
- C'est pas juste une discorde là. Il a couché avec Foudre. Avec ma meilleure amie, gronde-t-elle, incapable de se maîtriser.
Puis elle revient à elle. Ses oreilles se redressent et elle dégage de ses pensées Gryffon et tout le reste.
- Au cimetière. Je l'avais déjà vue avant mais elle ne restait jamais me parler. Là, elle m'a parlé. Je peux la voir parce que j'ai... Un don. Je peux voir les personnes mortes, lui explique-t-elle calmement, même si dans le fond, elle a peur qu'il la trouve folle voir même complètement dérangée.
Peut-être qu'elle l'est, après tout.