Chant d'espoir du loup

Allie déambule, l'esprit plein, sans pour autant torturé. Il y aurait pourtant de quoi, mais les épreuves endurées lui avaient appris à se forger un mental d'acier et à ne plus se laisser aussi facilement atteindre. Tout du moins, c'est ce qu'elle tente de se persuader.

Elle aimait venir ici, enfant. Elle a l'impression que c'est si lointain et pourtant, pas tant que ça. Boréale laisse ses yeux bicolores arpenter la cime des arbres, les contemplant quant les autres détournent pourtant le regard.

L'ombre qui erre non loin d'elle n'avais, à la base, pas prévu de la suivre. S'il était ici, c'était uniquement pour satisfaire sa curiosité naturelle et découvrir ces nouveaux territoires. Ce pays où il avait décidé de rentrer était, comme son père le lui avait dit, plein de surprises. D'ailleurs cela faisait un certain que l'odeur de la jument l'entêtait, se rapprochant puis s'éloignant brusquement. Certainement devait-elle être un peu plus en avant de lui, sur sa droite. Bifurquant alors en sa direction, Raziel fit en sorte de rejoindre le chemin qu'elle prenait, de manière à arriver devant elle.

Boréale est une fille de la terre, de la mer, du ciel. Son peuple lui a appris a faire qu'un avec la Nature. Si bien qu'elle est une alliée loyale et redoutable au quotidien. Alors la présence d'un individu lui est dévoilée avant même que son odeur inconnue se faufile dans ses naseaux. Allie n'est jamais contre une nouvelle rencontre, au contraire, et certainement que cela sera une parfaite distraction, elle en a bien besoin.

Elle fait mine de rien, continue de déambuler de sa démarche naturellement chaloupée. Bientôt une silhouette nacrée se dessine sur le sentier qu'elle arpente. Allie continue son chemin, avance vers lui, rive son regard vairon au sien. Et alors qu'elle aurait du ralentir en arrivant à sa hauteur, elle ne s'arrête pas, passe à côté de lui et continue son chemin l'air de rien, mais un éclat espiègle pointe dans son regard lorsqu'elle le dépasse.

Elle est là, devant lui. Petite. Tachetée. Et mignonne avec ça. Retenant un ronflement de naseaux, le grand doré l'observe venir à sa rencontre et ... lui passer devant en l'ignorant royalement. Pire encore, c'est limite si elle ne le bouscule pas, comme s'il n'avait jamais existé. Un instant, le pic de colère dans les entrailles de Raziel explose les compteurs : jamais personne ne lui avait fait le déshonneur de l'ignorer ! Mais, la seconde suivant, alors qu'il capte son regard en arrière, il y surprend un éclair de malice. Hin hin hin. Le Colosse ricane intérieurement.
you want to play ? ok, let's play ...

Alors qu'elle l'a dépassé, Boréale laisse un sourire mutin et amusé pointer sur ses lèvres alors qu'elle prend le trot. Elle connait cette forêt comme sa poche, c'était son repère lorsqu'elle était enfant alors que tout le monde craignait de se rendre ici, elle trouvait au contraire le lieux rassurant et réconfortant. Elle disparaît au détour d'un sentier, en empruntant un plus escarpé, à peine tracé au sol, faufilant son corps svelte entre la cime des arbres. Elle frôle de temps en temps délibérément un tronc, pour le marquer de son odeur et créer un jeu de piste. A voir si le mâle nacré se laisserait tenter par l'invitation.

Silencieusement, Raziel observe la petite bicolore s'éloigner, dans la profondeur du bois. Son odeur est toujours présente, puissante. Se léchant alors les babines, ravit, l'étalon prend le trot, calmement, sa longue queue cuivrée venant fouetter l'air avec force et les naseaux aux aguets.

Allie continue son petit manège, l'air frivole et espiègle peint sur son visage, bien que personne ne puisse le voir. Elle frôle, s'appuie, caresse, danse. Jusqu'à marquer un dernier tronc, une dernière cime, avant de sembler s'envoler, disparaître. Mais légère et habile, elle avait atteint une tanière dont peu avait connaissance de son existence. Et de là, elle pouvait observer le mâle sans être vue.