Parce qu'il est des douleurs qui ne pleurent qu'à l'intérieur ▬ A

Elle s'arrête ici, au bord de l'océan et son regard mélancolique se pose sur l'horizon. Sur l'île qui se dessine au loin. L'île qui fut la maison de Azel, renommée Toundra à son arrivée là-bas. Pour elle, son nom restera Azel. Elle ne s'est jamais fait à son nouveau nom. Tout comme elle ne s'est jamais faite à son existence, à vrai dire. Elle l'avait toujours considérée comme un fardeau, malgré elle. Parce qu'elle n'avait jamais pu l'aimer. Pour plusieurs raisons. Et aujourd'hui, malgré ce lien rompu, elle pleure sa disparition. Parce qu'elle sait que, quelque part sur l'île, les ossements de sa fille sont enterrés. Si proche... Et pourtant si loin.

La brise qui se lève lui fait du bien. Elle lui apporte un peu de fraîcheur ce qui n'est pas désagréable vu la chaleur qui sévit ici. Son regard fixe toujours l'île. Elle se demande si une cérémonie en mémoire de sa fille a eu lieu. Une voix la tire de ses pensées mélancoliques. Une voix masculine. Son regard se détache enfin de l'île pour glisser sur l'inconnu qui se trouve à quelques mètres. Respectable. Elle apprécie le geste.
- En effet. L'océan est toujours sublime, répond-elle en affichant elle aussi un léger sourire.

Son sourire s'agrandit légèrement lorsqu'il lui donne raison. En même temps... Comment ne pas être d'accord avec cette vérité ? Qu'importe son humeur, l'océan a toujours été somptueux.
- Elle semble si loin, répond Absinthe dont le regard n'a toujours pas quitté la fameuse île.
- Les restes de ma fille reposent quelque part sur cette île, ajoute-t-elle après une poignée de secondes d'hésitation.
Ce n'est pas vraiment le genre de nouvelles qu'on aime partager. Et encore moins avec un parfait inconnu. Mais c'est plus fort qu'elle ; elle a besoin de le dire tout haut. Comme pour se l'avouer.

Le cœur d'Absinthe est serré. Elle n'a jamais ressenti pareille douleur concernant Azel. Ce qui ne fait qu'amplifier sa douleur ; elle ne l'a jamais autant aimée qu'à l'heure de sa mort. Rien que pour cette raison, elle s'en veut. On ne prend conscience de notre amour uniquement lorsque la personne nous est arrachée.
- J'imagine qu'il ne faut pas l'être... Elle est certainement bien plus heureuse là où elle est désormais, répond la palomino en détournant enfin son regard de l'île.

Absinthe serre si fort les dents qu'elle sent rapidement un goût métallique lui monter en bouche. Les paroles du mâle se veulent surement réconfortantes et pourtant, elles ont l'effet inverse. Parce qu'elle sait que peu importe où Azel se trouve, elle ne sera jamais à ses côtés, pour la simple et bonne raison qu'elle la détestait.
- J'espère pour elle, souffle-t-elle malgré tout.
Bien qu'à vrai dire, elle doute qu'Azel eut aimé quelqu'un sur cette terre, hormis elle-même... Et peut-être Faucon.

Un maigre sourire glisse sur ses lèvres. De l'espoir, elle n'en a plus tellement alors ça lui fait un bien fou de le ressentir chez les autres. Et elle se sent un peu réconfortée aussi.
- Merci, souffle-t-elle dans un murmure en glissant son regard sur lui.

Et pourtant, Absinthe se sent reconnaissante. Il avait su trouver les mots pour la réconforter. Et même si elle savait que ce n'était que temporaire, c'était assez pour lui donner envie de le remercier.
- Il me semble qu'on ne s'est même pas présenté... Je m'appelle Absinthe, souffle-t-elle finalement.

- Ravie de faire ta connaissance Eclipse, souffle-t-elle en lui offrant un petit sourire.
Elle aussi se sent un peu honteuse d'avoir fait cette gaffe mais l'important est de l'avoir réparée. N'est-ce pas ?
- On pourrait peut-être marcher ? Lui demande-t-elle.
Ainsi elle pourra s'éloigner de cette île qui lui brise tant le cœur.