homeland

Dim 15 Nov 2020 - 21:41

NARVAL

Il lui aura fallu plusieurs heures pour rejoindre l'Île, mais enfin, il foulait la terre sacrée. Même si l'impatience de revoir Faucon le tiraillait, il avait pris son temps en traversant la Forêt Etoilée pour rejoindre la Falaise. Le bruit de la mousse sous ses sabots, les plantes pour ses remèdes lui murmurant un doux appel, le bruit de l'eau de la Source au loin. Il aurait bien pris un bain pour ne pas se présenter si crasseux à Faucon, mais l'heure n'était pas aux manières, bien que cela lui coutait de voir sa robe de nacre entachée et ses crins emmelés.
Il lance un puissant hennisement, dont l'appel surpassera le bruit du fracas des vagues en contre bas.

Dim 15 Nov 2020 - 21:44

Lun 16 Nov 2020 - 21:19

Posté non loin du bord de la falaise, le Rapace revient tout juste d'une ronde, son corps humidifié de sueur. L'appel résonne et Faucon sait, immédiatement. Narval. Est-ce vraiment possible ? D'un pas assuré malgré sa vue déficiente, il s'approche du bord, se dévoilant ainsi à la vue de la plage. Il ne le voit pas, mais son odeur qui se mêle à l'air marin semble soulager, déjà, une partie de ce poids intenable qu'il a senti s'abattre sur ses épaules. Il lui hennit en retour et attend, patient, que son frère le rejoigne. Qu'il rentre à la maison, enfin.

Lun 23 Nov 2020 - 22:31

La réponse de Faucon ne se fait pas attendre, elle est presque instantanée, comme s'il savait qu'il rentrait, comme s'il l'attendait. Narval lève ses yeux si clairs vers les hauteurs de la falaise où la silhouette sombre du chef Nayati se dévoile. Le visage du blanc est dur, ses sourcils froncés de manière sévère en observant l'étalon en contre haut. Même d'ici, il voit qu'il a perdu de sa superbe. Les récents évènements ne l'ont visiblement pas épargné, et il en est physiquement marqué. Le fantôme n'attend pas de voir si il descend, il prend d'office l'initiative de le rejoindre au sommet. En peu de temps, les kilomètres puis les mètres qui les séparaient s'envolèrent définitivement et complètement. Narval n'avait jamais été très tactile, mais Faucon dérogeait à nombreuses de ses règles frigides. Il vient placer son chanfrein contre le sien et souffle un air chaud contre ses naseaux. Je pensais retrouver mon frère. souffle t-il en reculant lentement son visage du sien, pour capter son regard. Ce qu'il en reste du moins. Pas uniquement son ombre. Ce n'est pas réellement un reproche. Cela pourrait sonner comme tel si il ne le connaissait pas, mais c'était simplement un constat. Un insoutenable constat, certes.

Jeu 26 Nov 2020 - 10:55

Faucon se laisse faire, appuyant un peu lui aussi son chanfrein contre celui du blanc. Puis, il se décale, comme s'il voulait mieux l'observer alors qu'il le distingue à peine. Sa silhouette pâle lui est presque invisible, dans le brouillard épais qu'est devenue sa vision.
Et, contre toute attente, malgré qu'il le connaisse mieux que personne, le Rapace le prend comme un reproche. Mais cela ne se voit que dans son oreille gauche qui s'abaisse vers sa nuque lentement. Il ne répond pas tout de suite et s'il avait encore eu au moins un oeil en état de marche, celui-ci aurait été sévère. Peut-être que tu n'aurais pas eu à le retrouver si tu n'étais pas parti, cingle-t-il froidement. Il sait que Narval ne sera pas atteint pas la dureté de sa voix, à laquelle il est habitué depuis toujours. Pourtant aujourd'hui, peut-être cela est-il encore plus perceptible, encore plus réel, encore plus frappant. Il fouette l'air de sa queue. L'idée qu'on le voit comme une ombre lui déplait. Ce n'est pas ce qu'il est.
Assommé, certes. Blessé, certes. Révolté, certes. Mais toujours debout là où tant d'autres auraient déjà fini à genoux. Toujours vaillant et déterminé là où d'autres auraient abdiqué. Toujours féroce là où d'autres se seraient ratatinés. Toujours vivant, là où tant d'autres auraient choisi la mort. Tout lui était tombé dessus sans aucune pause et il est presque déçu que son frère ne puisse peut-être même pas le savoir. Décidément, Faucon semble bien plus seul qu'il ne le croit et plus les jours passent, plus l'absence de Boréale lui est cruelle. Tu as été voir Hirondelle, souffle-t-il, simple constatation pour lui aussi, sans provocation aucune car cela serait inutile. Il l'observe, attendant ses réactions, attendant... son soutien ?

Ven 27 Nov 2020 - 13:47

Il connait le ton ferme et rude de son frère, tout comme le sien est froid et et tranchant, mais il perçoit l'intonation différente, les émotions particulières qui s'y mêlent. Il déchiffre aussi la gestuelle de son corps, et l'ensemble de tout ça lui indique qu'il l'a vexé, blessé. Narval pourrait y être indifférent, il pourrait faire comme ci de rien, il pourrait être comme il l'habitude d'être. Mais pas avec Faucon. Tout est différent avec Faucon. Et son frère parvient parfaitement à lui rendre la pareille. Narval fronce les sourcils à la répondre du bai, tente d'accéder à son regard mais là aussi, il ne perçoit que du brouillard. Sa vue disparaissait peu à peu. Hum. Encore une épreuve supplémentaire, quoi que celle ci serait plus facile et rapide à encaisser que le reste. J'ai été laissé pour mort, par une grande jument noire. Tranche t-il, lui aussi heurté de constater qu'il puisse croire qu'il l'aurait laissé aussi longtemps sans raisons ni explications. Les nombreuses cicatrices qui jonchaient à présent son corps de nacre dévoilaient la violence rare des coups qu'il avait reçu, mais Faucon ne pourrait certainement pas les percevoir. Narval soupire. Il est la dernière personne avec qui il a envie de se battre. J'ai survécu, je ne t'abandonnerai pas. Souffle t-il, comme une promesse. Il connaissait les pertes de son frère, ses êtres qui lui étaient chers, mais Narval ne connaissait pas et ne partageait pas sa douleur. Même pour leur mère, il avait fermé ses émotions de manière hermétique depuis qu'il avait appris leur mensonge. Il ne parvenait pas à en vouloir à Faucon, un lien spécial avait toujours subsisté entre eux, il avait placé toute sa rancoeur sur Nyveèn finalement.

J'ai senti ton odeur chez les hommes. J'ai été voir si tu y étais et j'ai vu ta fille. Elle avait l'air d'aller bien. Elle m'a demandé de veiller sur toi, à ce que tu ne te mettes pas en danger pour aller les chercher. Son regard ne quitte pas un seul instant le sien, qu'il le voit ou le discerne seulement, qu'importe. Je lui ai dit que l'on prendrai les risques qu'il faut.

Faucon accueille l'annonce avec surprise, sans rien qui puisse trahir celle-ci pourtant. Ni rictus, ni regard qui s'écarquille, rien. Rien d'autre qu'une façade imperméable et pour cela, ils se ressemblent bien trop pour qu'on ne puisse les dire frères. Au delà du sang, ils partagent bien plus pourtant. Il reste sans répondre, son cerveau déjà enclenché. Il ne voit que deux noms possibles. Plum et Meruem. Autant la deuxième lui semble peu encline à ce genre de folie combative, autant elle est aussi celle qu'il connait le moins. Et celle qui nourrit sa fille, aussi. Pourtant, son attention se porte plutôt sur la première solution. Que Narval ne s'y trompe pas ; la mort de Nyveèn n'a causé chez Faucon aucune peine ni douleur à proprement parler. C'est de la rancoeur qu'il éprouve pour elle aujourd'hui et aussi un poil de frustration. De ne pas avoir pu lui donner cette mort lui-même, elle qui jouait tant avec.

Il attend, patient, et les explications suivent. J'ai tenté de les attaquer, séparément, pour les effrayer un à un. Je ne pense pas qu'il existe une solution pour les sortir de là. Il garde son regard vide tourné dans la direction de son frère, n'ayant fait aucun commentaire à l'explication de son absence. Non pas que Faucon s'en fiche, loin de là. Mais ça n'est pas le moment. Il se demande si Hirondelle lui a dit pour Boréale. Reste stoïque, inerte et pourtant ses muscles tendus témoignent de sa présence d'esprit. Son corps à lui aussi est jalonné de blessures encore trop récentes, bien trop rudes, bien trop sévères. Pourtant, il n'en parle pas. Je suis heureux de te voir, dit-il, glacial pourtant. Il hoche la tête, comme pour l'accepter à ses côtés. Parce que finalement, il ne peut pas faire autrement - et n'a aucunement envie de pouvoir le faire.

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