Tous les chemins vont vers toi ▬ H

Toute la nuit. Elle a galopé toute la nuit pour rejoindre l'île au plus vite. Le corps encore humide, échauffé par l'effort intense que lui a demandé cette galopade effrénée, elle ne sent qu'à peine la morsure du froid lorsqu'elle entre dans l'eau. C'est à peine si elle ressent quelque chose à vrai dire. Il ne lui faut pas longtemps pour arriver sur la plage. Sans même prendre la peine de s'ébrouer, elle reprend le galop, repoussant un peu plus ses limites. Et lorsque la roche-mère se dessine enfin au loin, elle ralentit, bien qu'elle aimerait poursuivre sa route. Elle est enfin de retour, après tout ce temps. Epuisée, elle finit par s'arrêter, le souffle court, et sans même qu'elle ne s'en rende compte, le sol se dérobe sous ses sabots. Elle n'ira pas plus loin.

La chute est aussi violente qu'inattendue et c'est seulement lorsque son corps entre en contact avec le sable qu'Hirondelle réalise ce qu'il vient de se passer. La silver se redresse difficilement, le sable s'incrustant dans son poil détrempé à chacun de ses mouvements. Lentement, elle reprend ses esprits et son regard dépareillé se pose sur la roche-mère. Si près... Et pourtant si loin. Hirondelle manque de courage ; elle reste donc couchée dans le sable. Juste quelques minutes, le temps de se reposer. De toutes manières, ici, elle ne craint plus rien. Ses yeux se ferment, à peine une seconde. Une voix enfantine lui perce les tympans. Et sans même ouvrir les yeux, elle sait que c'est elle.
- Calmes toi Abysse. Tout va bien, je maîtrise la situation, répond la silver en ouvrant enfin les yeux, pour les poser sur sa petite sœur.
Et elle est frappée par un détail ; elle n'a déjà plus rien d'une nouvelle-née.

Comment pourrait-elle la détester alors qu'elle est de son sang ? Hirondelle n'est pas spécialement très sociable et bienveillante envers les autres mais la famille est particulière à ses yeux. Et, l'air de rien, elle l'avait attendue avec impatience, sa petite sœur. Elle n'a jamais eu peur de la voir lui voler sa place. Parce qu'elle avait confiance en Faucon et Boréale et qu'elle s'estimait assez importante à leurs yeux pour ne pas se faire évincer par la première mini-crotte qui pointerait le bout de son adorable petit museau dans leur famille.
- J'ai pas besoin de lui ! Grince-t-elle en couchant ses oreilles contre sa nuque.
Puis elle se radoucie aussi vite lorsqu'elle voit la bouille toute triste d'Abysse. Elle serre les dents, subitement contrariée. Grrr, saloperie de gamine trop mignonne pour être ignorée. Hirondelle rend les armes. Pour cette fois.
- Bon d'accord, d'accord. Je me lève, soupire-t-elle en se relevant difficilement.
Et pour cause ; elle a tellement forcé sur son postérieur fraîchement soigné qu'il est redevenu douloureux.