conquest Δ 7 (suite oros)

Ici serait parfait. Le trajet avait été silencieux, mais agréable. Elle réfléchissait à la façon dont elle allait débuter l'entraînement. Apercevant l'Oasis quelques pas plus loin, elle se hâte de le rejoindre, et attend son fils. Le cadre serait agréable.

Mais dès qu'ils pénètrent sur le sable chaud, Oroszlàn a l'impression que le soleil écrase son coeur. Que la chaleur qui lui tombe sur le dos lui broie les poumons. Il ne se sent pas à l'aise. Pas du tout. Malgré que ses parents appartiennent à deux territoires différents – opposés, même – il a toujours été plus souvent au Nord. Tout le temps, en fait. Il a le Nord dans la peau. Dans la tête. Jusque dans le coeur.
La chaleur, le désert, il n'y est pas du tout habitué. Il ahane dans le vide, un peu déboussolé, en rejoignant sa mère. « On va s'entraîner ici ? »

Elle voyait bien que la chaleur suffocante du désert freinait considérablement la vélocité et l'agilité du mâle. Ce serait un excellent moyen de l'endurcir et l'adapter à un autre climat que son Nord paternel. Elle désigne l'eau d'un geste sec. « Bois, avant de commencer. En Égypte, c'est la chose la plus importante à faire. » ordonne-t-elle, ignorant sa question. Ainsi, pendant qu'il s'exécute, elle s'éloigne de quelques mètres de lui.

Le Lion ne peut qu'obéir. En s'approchant de l'eau, il s'aperçoit qu'il meurt déjà de soif. Est-ce que c'est toujours comme ça, de vivre ici ? Il suffoque, il a chaud, sous la couche de poils plus épaisse qu'il arbore, à force de vivre au Nord. Il relève la tête, le menton dégoulinant d'une eau qui lui semble chaude. Ses yeux se posent sur sa mère, inquisiteur.

Le regard de la princesse se braque durement dans celui de son fils. « Attaque-moi. » lâche-t-elle alors, absolument détendue, les muscles relâchés, tranquille. Elle avait besoin d'évaluer son fils pour savoir par où commencer.

Les yeux d'Oros se froncent, se plissent, essaient de savoir si sa mère est sérieuse ou non. Est-ce une épreuve ? Il ne bouge pas, ses muscles à lui sont tendus pourtant. D'une voix méfiante et hésitante, il demande : « T'attaquer ? »

Septenrê lui tend un regard dûment soutenu, tandis qu'elle se redresse enfin pour se placer en position défensive. « Tu veux savoir te battre? Attaque-moi. » Sa voix se fait plus pressante, et elle souffle des naseaux, tandis que son regard pénétrant est braqué dans celui de son fils.

Brusqué par sa voix et déstabilisé par son comportement, Oros se tend légèrement. Puis carrément. Ses muscles se crispent. Puis, sans répondre, il bondit sur lui, ses dents (encore petites) découvertes et tendues vers l'avant, ses crins (sa petite crinière de lionceau) fouettant le vent.

Et dès qu'il se met en mouvement, la princesse plaque ses oreilles contre sa nuque, tandis que son poil se hérisse, paraissant plus imposante. Elle œuvre pour que son regard n'ait plus rien de doux ou de maternel, et ses dents claquent dans l'air. Elle gronde, de plus en plus fort, afin de le dissuader de lui bondir dessus.

Et ça fonctionne.
Un peu. Surpris par la réaction de sa mère, Oros freine, hésite un peu, la regarde étrangement, comme si elle l'avait grondé, qu'il n'avait pas à lui bondir dessus comme ça. Mais finalement, il comprend que ça fait partie de la mise en scène. Une pensée traverse son esprit désorganisé à cet instant-là : lui ferait-elle vraiment du mal, quand bien même n'est-ce qu'un entraînement ? Mais il l'oublie vite et repart à l'assaut, cognant le poitrail de sa mère du sien qui, bien moins robuste, commence pourtant à faire preuve d'un peu de forces. Le Lion couche ses oreilles en arrière, ses dents claquent à leur tour dans le vide. Il n'ose quand même pas la mordre.

Dès l'instant où le menu poitrail de son fils s'échoue avec détermination contre le sien, Septenrê détend ses muscles, et son regard reprend sa lueur maternelle. Elle recule de quelques pas, et le regarde avec toute la fierté qu'elle éprouve à son égard. « Tu as très bien réagi. Première règle essentielle du combat: l'intimidation. Tu ne dois jamais te jeter directement au feu, mais d'abord dissuader l'autre de t'attaquer. Si c'est lui qui cherche à t'intimider, tu dois lui montrer que tu n'as pas peur et que tu ne renonceras pas. TU es le plus fort, Oroszlàn. Garde-le bien en tête. » lui explique-t-elle d'abord, afin qu'il comprenne. Elle reprend son expression ferme, et recule encore d'un bon mètre. « Et si ton adversaire et toi ne lâchez pas, c'est là que commence le combat. » dit-elle alors, appuyant ses paroles d'un regard entendu. Cette fois-ci, c'est elle qui attaque le petit Lion. Elle s'avance jusqu'à lui en une poignée de foulées parfaitement calculées. Le regard qu'elle lui porte redevient absolument sauvage et agressif tandis que sans prévenir, elle glisse sur son côté et le contre de l'épaule, dans le but de le déséquilibrer et fragiliser ses appuis. C'est à ce moment précis qu'elle en profite pour le mettre à terre en le repoussant une deuxième fois, mais par derrière. Bien évidemment, le but n'est pas de le blesser. Elle prend garde à ne pas lui faire de mal, mais est assez ferme dans ses gestes pour lui faire retenir ses conseils. La princesse attend qu'il se relève de lui-même pour lui donner des explications.

Elle redevient normale dès qu'il la rencontre et ça le déstabilise. Il a du mal à faire descendre la tension qui tend ses muscles, et la regarde, le souffle légèrement court, le regard interrogateur. Il écoute ses conseils précieux, enregistrant tout. Il ne sait pas vraiment à quoi est-ce que ça lui servira, mais il sait qu'un jour, il en aura grandement besoin.
Puis soudainement, sans qu'il ne s'y attende vraiment, elle passe à l'attaque. Il se raidit et sans réussir à bouger, subit le premier choc. Il titube un peu du côté où elle l'a poussé et couche ses oreilles en arrière, la foudroyant d'un regard, vexé de ne pas avoir senti venir l'attaque. Il la dévisage en tournant autour d'elle, mais elle passe rapidement derrière-lui, comme une vipère, et d'un seul coup, il est au sol. Grognant, il se relève péniblement, le nez plein de sable. Sans dire mot, il se place en position défensive, les oreilles enfouies sous ses crins blonds, ses membres prêts à subir la prochaine vague... ou à l'esquiver.

Apercevant du coin de l'œil sa mine vexée, elle ne peut s'empêcher de sourire intérieurement: il avait visiblement hérité de sa fierté indémontable. Méfiant après son premier assaut, Orozlàn se prépare au suivant, mais Septenrê n'en fait rien, et se contente d'observer ses gestes, avant de reprendre: « La première attaque est décisive: si tu la réussis, tu deviens le maître du jeu. Si tu l'échoues, tu dois redoubler de prudence. Pour réussir ta première attaque, le plus important est de ne rien montrer, afin que l'adversaire ne s'y attende pas. Tu peux par exemple le distraire, ou bien feindre de toucher un autre endroit que celui que tu cibles. Tu suis? » Et pour imager ses explications, elle se met en position pour exécuter la même attaque que la précédente.

Oroszlàn écoute, hoche la tête, mais ne répond pas. Il reste concentré au maximum, de telle façon que ses muscles sont bandés et tendus. Son encolure est ramenée contre son poitrail et il garde cette position défensive. Ayant retenu la leçon, il s'attend à ce qu'elle lui fasse croire à une attaque similaire... mais qui sera différente.

Et contre toute attente, Septenrê reproduit absolument la même offensive, attendant de voir comment son fils réagirait, et s'il avait bien assimilé la première fois. Elle s'attendait bien sûr à ce qu'Oroszlàn réussisse avec brio, et s'élance donc à la même vitesse que la première fois.