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NEOS

Ses sabots, pourtant agiles, ripèrent sur la roche et son corps qui se remettait à peine du tsunami qu'il avait involontairement créé manqua de basculer dans le vide. Il se rattrapa au dernier moment. Neos regarda le ravin puis de nouveau le chemin d'escalier montant vers le sommet. Il fallait qu'il se concentre un peu plus, la perte de son œil gauche l'handicapait plus qu'il n'aurait pu le penser, fauçant certaines perceptions.

L'appaloosa continua son ascension, jusqu'à ce que la fatigue le gagne. Il s'immobilisa quelques minutes pour reprendre son souffle. Il s'était laissé aller à la dépression après la catastrophe, et son corps autrefois fort et rigoureux était aujourd'hui fatigué et blessé. Il tentait tant bien que mal de remonter la pente, cette ascension était une sorte de défi envers lui même.
Des bruits de pas le tirèrent de ses songes. Pivotant lentement son visage en aval, il distingua une jeune silhouette s'approcher. Il crut que son corps rata un battement. Etait ce possible ? " Dazzle ? " souffla t-il dans un murmure ahuri. Peut etre se trompait-il, peut être que son unique œil valide lui jouait des tours.

Il plissa les yeux, pour affiner la vision de son unique œil sur la silhouette qui avait accélérée le pas. Il ne s'était pas trompé, c'était bien son ami qui avançait dans sa direction. Il avait retrouvé son physique d'autrefois, ce qui lui donna d'autant plus la sensation de ne pas l'avoir vu depuis 1000 ans.
Il lui rendit son étreinte, avec peut être un peu trop de ferveur. Il avait du mal à y croire. Il était en vie. Lui qui pensait avoir perdu tout ses proches, toutes sa famille ... Car Dazzle pouvait s'apparenter comme un frère à ses yeux. Les nerfs à fleur de peau ces dernières semaines, l'ex bras droit des réfugiés aurait même pu fondre en larme contre son ami, il se retint difficilement de le faire.

Se détachant lentement de lui, il l'observa sous toute les coutures. " Je croyais que tu ... " Le tacheté ne parvint pas à prononcer ses derniers mots.

Un voile de tristesse passe dans le regard de l'appaloosa et il baisse la tête, submergé par la honte de ce qui avait engendré par sa faute. Ses vies ôtées et ce territoire dévasté, en plus de tout ce peuple forcé de recommencer leurs vies ailleurs. Il finit par relever les yeux vers son ami, n'assumant absolument pas les conséquences de ses actes, bien qu'involontaires.
Il hausse les épaules avec nonchalance. " Le retour de bâton je suppose. " lache t-il avec une sombre ironie. " J'ai essayé d'arranger les choses mais ça ne faisait que les empirer. C'était hors de contrôle, je ne sais pas ce qui s'est passé. En voulant stopper l'eau j'ai fini par me prendre un tronc déraciné en pleine tête et c'est mon œil qui a morflé. "

Neos écoutait son acolyte et lui offrit un frêle sourire mais soupira longuement. Il avait tenté de se convaincre qu'il n'y était pour rien, que les Dieux avait fait de lui leur marionnette pour assouvir leur ultime vengeance mais cela n'enlevait en rien le poids de la culpabilité qui pesait sur ses épaules.
Le tacheté fronça les sourcils aux derniers mots de Dazzle. " Que s'est t-il passé ? "

Neos devine le reste des mots que son ami ne parvenait pas à dire. Tout comme le tsunami qu'il avait créé, l'incendie n'avait pas seulement brulé que des plantes, et il sentit son cœur se serrer en imaginant son ami spectateur de ces scènes d'horreur sans rien ne pouvoir y faire. Il lui offre un regard emplit de compassion et colle ses naseaux sur son épaule. " Il faut qu'on apprenne à vivre avec ... " finit par souffler l'appaloosa, son regard dérivant dans le vide, quelques secondes, avant de se heurter aux nouveaux mots de Dazzle. Il redresse vivement la tête, l'oeil furibond. " Si il en avait bien une qui devait crever là dedans c'était bien elle ! " pesta t-il avec une haine non dissimulée. Ses amis, sa famille, des gens biens, étaient morts. Et cette peste vivait toujours. " Mais il n'y a pas qu'elle ... Sweeney aussi. " dévoila t-il à son tour.

Neos rumine et serre les dents. Rien que l'idée le rendait malade. " On nous répétait souvent que les meilleurs partaient les premiers quand on était gamin. À croire que c'est vrai ... " souffle t-il avec un voile de tristesse passant dans son œil.
Quand ils étaient gamins. Ils n'étaient pourtant pas si vieux, cinq ans seulement, et Neos avait la sensation d'en avoir la double. Trop de choses avaient pesé sur ses épaules, il avait fini par s'effondrer. Et il se demandait s'il parviendrait à se relever un jour.
Son regard se porta sur l'horizon. " Tu penses que l'on arrivera à vivre ici ? " Auprès de tout ces gens à qui j'ai ruiné la vie.