A la casa

Le vide intersidéral ? Mais non voyons, Jacin est dans les parages, alors il ne peut y avoir de vide ou d'ennui incommensurable !

Notre très cher pie foule donc ces terres bien dégueulasses et grisâtres à la recherche d'un truc à se mettre sous la dent. Malheureusement (et comme d'habitude), il n'a pas fait le meilleur choix. Ici, il n'y a pas un seul pet d'herbe. PAS UN SEUL. C'est donc l'estomac gargouillant que notre jeune protagoniste s'approche dangereusement de la p'tite nouvelle, sans toutefois la remarquer. En plus d'une vision à chier minée par le brouillard, il subit un rhume carabiné depuis quelques jours qui le prive de tout odorat.  « ATCHOUUUUUUUM » l'entend-on hurler à des kilomètres à la ronde.

« ÇA VA, ÇA VAAAA, PAS LA PEINE DE GUEULER, JE VOUS AI ENTENDU ! » s'emporte-t'il, le nez tout dégoulinant. Néanmoins, malgré cette petite gueulante, il s'approche de la source du bruit d'une démarche chaloupée et peu rassurée, un peu comme les protagonistes des films d'horreur sur le point de découvrir un meurtrier ou un putain de loup. Mais non, ce n'est qu'une jeune fille. Une jeune fille… coincée dans le sol.  Confus, il arque un sourcil. « T'es née comme ça ou t'es juste coincée ?  » Oui, il peut être très con, quand il veut.

La blanche, toujours coincée dans le sol, lui répond avec l'amabilité d'une hyène un jour de pluie. Et vous savez quoi ? Cela a le don de l'amuser ! Sûrement parce qu'il est le seul à pouvoir l'aider et qu'elle va être contrainte de se montrer aimable avec lui, finalement.  Taquin, il la reluque de haut en bas. « Tu me donnes quelque chose en échange ?  »

Si elle ne prend même pas la peine de répondre, lui reste campé sur ses positions. Il ne compte pas lui lâcher la grappe de sitôt. Alors, en bon chiant qu'il est, il vient se poster à quelques centimètres de son positionnement, rapprochant sa tête de la sienne. Juste pour faire chier. « Hey, c'était une p'tite blague, hein. Une blagounette de rien du tout. Tu sembles de mauvais poil, dis donc. Tu veux un massage pour te détendre ?   Oh non attends, c'est parce que t'as tes règles, c'est ça ?  Non bah là, j'peux rien faire ¬¬ »

Lorsque la dame lui pince les naseaux, il laisse échapper un cri aigu. « NON MAIS ÇA VA PAS !  » Une sensation de brûlure lui picote le bout du nez. Il recule de quelques pas, réellement surpris et blessé. À ses yeux, il n'a rien fait de mal. Il ne faisait que jouer, comme un gosse, sans se soucier une seule seconde des conséquences. « Pourquoi t'as fait ça ?  » demande-t-il d'une petite voix chevrotante, des larmes affluant au bord des yeux.

Il lève ses p'tits yeux accusateurs (et embués de larmes, du coup c'est pas très crédible) vers elle, oubliant comme par magie la douleur lancinante au niveau de ses naseaux. « Parce qu'y a que les meufs qui ont le droit de chialer, c'est ça ? »  Oui, oui, il continue de se plaindre, en dépit des excuses de la dame. Et il ne l'aide toujours pas. Et puis de toute façon, c'était pas vraiment des excuses.  Et puis il s'en bat les steaks, il défend honorablement les droits de l'homme.  Ou pas.

Mature ? Ah, parce qu'elle ne le trouve pas assez mature, là ? Bon. Il est vexé. Très vexé. Il gratte la terre de son sabot tout en baissant le regard, sans savoir quoi dire. C'est vrai qu'il aime taquiner et qu'il s'emporte vite… mais est-ce vraiment de l'immaturité ? Son sabot s'acharne sur le sol, encore plus frénétiquement. Est-ce mal, de vouloir s'amuser ? Oh et puis zut, il en a ras la coquillette, des questions à deux francs six sous  Alors, relevant la tête, Jacin finit par s'approcher de la dame - avec une extrêêêêême lenteur (il voudrait pas se faire mordre deux fois, n'est-ce pas) et se met à analyser la situation. Ses yeux dansent entre la jument et le sol sablonneux, à la recherche d'une solution. « J'suis tellement immature que je vais t'aider à sortir de là, tiens. » balance-t-il d'une voix un peu sèche. Lui, toujours vexé ? Nooon, vous croyez ?  « Si je te pousse vers l'avant, tu penses que ça peut te débloquer ? » Encore faut-il qu'il parvienne à se mettre derrière elle sans s'enliser à son tour - ou se prendre un coup de sabot vengeur en pleine poire. Venant d'elle, ce ne serait pas étonnant.