if you leave @J

L'étalon était sur le point de quitter la clairière après y avoir fait un tour pendant tout l'après-midi. Et maintenant que les rayons du soleil laissaient place à ceux de la lune, il s'arrêta une dernière fois, respirant à nouveau les parfums de la prairie.

Zoé s'était perdue quelques temps au milieu des arbres sombres du bois. Elle avait retrouvé sa route et s'apprêtait à s'en aller quand elle s'arrêta, net. Les oreilles en alerte, elle écoutait le moindre bruit autour d'elle. Elle avait reconnu une odeur familière.

Il se mit à fouetter de la queue pour faire fuir quelques moustiques qui l'embêtait avant de continuer son chemin, faisant craquer les branches au sol. Définitivement, il n'y avait rien de moins subtil que lui. Il faisait clairement pas d'efforts Quoique s'il avait su qui était non loin de lui, il aurait peut-être tâché de se faire plus discret.

Guidée par l'odeur et les bruits, elle se rapproche de l'étalon qu'elle a, évidemment, reconnu. Jake. Celui pour qui elle s'était barrée de chez papa maman.

Lorsque la silhouette de l'alezane se dressa devant lui et qu'il fut donc dévoilé à elle, Jake se figea, s'immobilisa. Il ne lui fallut qu'une fraction de seconde pour la reconnaître, même s'il avait pourtant cru l'avoir complètement effacée de sa mémoire. Eh merde... Il allait avoir des problèmes, il le sentait. Zoé. Ça fait longtemps. dit-il pour commencer. Il allait ajuster le tout selon la réaction de la jument.

Elle n’arrive pas à parler. Elle aimerait dire tant de choses mais aucun son ne sort de sa bouche. Elle entend sa voix et, elle qui était alors figée, s’élance au petit trot vers lui. Elle veut sentir sa peau, sa chaleur. Elle s’approche, ralentit et tend le museau vers son encolure.

Même s’il fut d’avord tenter de reculer et de se dérober de sa proximité, l’étalon resta immobile après une petite hésitation. Après l’avoir abandonnée comme un lâche, sans un mot, parce qu’il n’avait pas été capable de lui avouer la vérité sur ses sentiments, il se doutait que la conversation qui suivrait serait difficile pour elle. Il s’était suffisamment senti coupable comme ça qu’il n’avait pas envie de faire durer le mensonge.

Elle parvient à le toucher, aussi infime le contact soit-il. Elle sent bien que quelque chose cloche. Elle bégaie J-J-Jake... Des années les séparent tous les deux.

Le pie détourna le regard sans un mot, un peu mal à l'aise car il appréhendait la suite. Il renâcla doucement. C'est moi, ouais. J'ai pas changé d'identité. répondit-il, toujours aussi fidèle à lui-même, toujours avec une petite touche d'humour.

Elle savait bien que c’était lui. Elle l’aurait reconnu entre mille. Mais pourquoi a-t-il l’air si distant ? Comment tu vas ? articule-t-elle doucement. Elle recule de quelques pas, de manière à pouvoir le contempler dans son entièreté. Toujours aussi mignon, elle pense.

Pourquoi avait-il l'air distant ? Peut-être parce qu'il ne s'était pas vus depuis des années à cause de son départ lâche et con. Mais il avait subitement eu le besoin de partir. Parce que c'était mieux pour elle, c'était mieux qu'elle avance sans lui. Bien, comme d'hab'. Elle aurait dû savoir qu'il était rare pour lui d'aller mal. Toi ?

Elle ne peut pas s'empêcher d'avoir le sourire à côté de lui. Encore mieux maintenant, elle lâche. Elle est tiraillée entre lui poser toutes les questions qui traversent son esprit ou apprécier les retrouvailles.

Apprécier les retrouvailles ? Vraiment ? Comment le pourraient-ils sachant qu'il l'avait lâchement abandonnée ? Faire comme si de rien n'était, comme s'il n'était jamais parti parce qu'il avait eu trop peur de lui dire la vérité ? Il recula d'un pas ou deux. J'suis euh... J'suis désolé d'être parti. Ça n'excusait rien, mais au moins il l'avait dit.

Ca ne fait rien, tu es là maintenant ! se réjouit-elle. C'est que Zoé n'est pas rancunière, elle n'a l'a jamais été. De nature très optimiste, elle savait qu'elle finirait par le retrouver un jour. Mais l'alezane ne se pose même pas la question de "et si tout avait changé ?". Elle n'y pense même pas.

Elle ne comprenait toujours rien, toujours autant bercée dans son monde rose. C’était pour ça qu’il était parti, du moins en partie. À chaque fois qu’il avait voulu tout lui dire, elle se laissait croire que tout allait pour le mieux. Non. répondit-il, néanmoins doucement. Je suis désolé mais non, ça ne sera plus comme avant.

» Leave me alone ! _A_
» leave just like you did before
» red bus needs to leave!
» leave me.
» ~ Take it or leave it.