Ma biche, je pars à la chasse!

Caelis piaffait nerveusement dans l'herbe. Il lui restait ce mince bout de territoire à traverser, et elle filerait ailleurs. Elle ne savait pas encore où. Histoire que Budapest ait un peu plus de remords que ça, elle poussa un hennissement furieux. Puis la grisette se calma et posa des yeux nostalgiques sur ce paysage automnale. Et soudainement, elle rua contre un arbre au tronc assez fin. Le bois fragilisé par le froid et l'humidité céda sous le coup, mais ne se brisa pas entièrement.

Caelis regarda en tout sens, fulminante. Et d'un coup, elle l'aperçu, se fondant parfaitement dans le décor. La grisette posa son regard de braises bien échauffées dans celui de Dap, puis s'en arracha brusquement et recula. Malheureusement pour elle, elle buta contre un arbre. Caelis le considéra en silence, acculée contre le tronc, les naseaux postés bien en hauteur. Dans son regard on lisait la peur et la colère.

De toute manière la grisette était trop paniquée pour pouvoir réfléchir. Il si il la kidnappait? Pourtant, là, il ne faisait rien. Pour l'instant. Caelis cessa de s'appuyer contre ce pauvre arbre, et lui jeta un coup d’œil en coin, méfiante. Qu'est-ce que tu veux encore? Crache-t-elle, plus sèchement qu'elle ne l'aurait voulut.

Caelis n'était pas dans son état habituel: furibonde, l'échine hérissée, et n'avait qu'une seule envie: s'enfuir. Il lui avait fait passé un moment magique, pour mieux la détruire ensuite, selon elle. Elle renifla, peu convaincue. Mais encore?

Et c'est tout ce qu'elle avait toujours désiré. La grisette hocha la tête, distante. Justement, j'y vais maintenant. Sur ce, Caelis lui tourna le dos, ne partant pas pour autant. Pas tout de suite. Je dois honorer ma promesse envers Ramsès! Fit-elle en faisant claquer sa langue contre son palet, d'une voix exagérément langoureuse.

Caelis pouffa de rire, amèrement. Elle savait que ça le dérangeait, et voulut juste le titiller. Elle n'oubliait rien. La grisette faisait exprès de le pousser dans ses retranchements, pour qu'il lui montre enfin qui il est. Elle fit volte face, les naseaux dilatés. Et toi? Elle lui retournait la question. Quel toupet! Au moins Ramsès, lui, lui montrait ce qu'il pensait.

Caelis souffla sèchement de l'air par ses naseaux, envoyant une légère brume dans l'atmosphère. La nuit commençait à tomber, l'air se faisait plus frais, et le coucher de soleil écarlate sanguin s'en était allé. Il ne restait plus qu'une voûte violette, pré-nocturne. Elle rétorqua: Je suis de la Cité, à la base, et je t'ai suivit pour Mara. Et pour toi. Peste-t-elle. Elle s'éloigna d'un pas. Tant de sacrifices...pour des mensonges, des...omissions! La grisette secoua sa tête, son toupet dansa devant ses yeux. Ayant besoin de bouger, Caelis galopa quelques foulées, de manière à se retrouver à un mètre de lui. J'aurai préféré que tu ne mentes jamais! Et puis...ce n'est pas moi, qui t'ait supplié de revenir, il y a quelques heures! Fit-elle, le regardant de biais.

Le problème étant que c'est Ramsès et Budapest qui lui avaient donné un petit excès de fougue et de méfiance. Autant dire que des tâches, elle en a sa claque! Elle secoua la tête. Mais tu m'as laissé y croire. Tu m'as laissée avec mon espoir, et tu m'as laissée m'enfoncer dans ton cœur à tel point que j'en vois plus l'issue! Autrefois j'aurai pu lâché. Maintenant je me suis perdue! Elle se redressa. Perdue! Perdue comme Brooklyn, mais plus récemment. Elle soupira et sourit tristement. Plus l'ombre d'un sourire qu'autre chose. Comme quoi? Mara? Mara est adulte! Iwa se méfie de toi et Orenç te déteste! Fit-elle en relevant ses yeux, les plongeant dans ces Abymes marins.