• je recouvre de terre mes soupçons.

otsoa se fie à son instinct pour la mener vers le royaume des glaces. la grise s'est égarée une énième fois, n'ayant aucun repère de ces nouvelles terres. ses yeux, esclaves de son son angoisse naissante, commencent à fouiner tout autour d'elle. elle n'est pas rassurée dans cette forêt, son cœur étant ailleurs depuis les révélations de minuit. le bruit de ses pas est étouffé par le tapis d'épines et elle s'imagine être suivie. jetant des regards derrière elle, elle n'aperçoit rien. pourtant, cela fait accroître la crainte à l'intérieur de son petit corps. elle poursuit sa route, les sens qui restent attentifs.

les arbres tiennent en hauteur et entourent la grise. la pluie réussit à s'échouer sur la robe de la grise. elle ruissèle le long de ses crins foncés. il lui faut peu de temps pour avoir le corps trempé. otsoa change de destination, elle cherche un abri où attendre la fin de ces eaux lâchées par dame nature pour nettoyer les péchés des mortels. elle a un pas délicat, qui se mêle au tapis d'épines. cela atténue la résonance. le reste est masqué par le bruit de la pluie qui tombe.

la paranoïa à sa porte, cela la pousse à marcher en quête d'un abri avec méfiance. les effluves mélangées entre elles rendent la distinction impossible. elle ne détecte pas l'odeur de l'étalon qui la suit. elle ne retourne plus ses yeux vers l'arrière ; un acte qu'elle juge inutile après quelques essais, en vain. l'eau continue à se déverser et la laver de toute souillure qui s'est accumulée sur la silhouette de la grise.

un creux dans une paroi rocheuse, voilà ce qu'elle aperçoit au loin. oreilles dressées, l'espoir la frappant à nouveau, otsoa se met à accélérer la cadence pour rejoindre la grotte. arrivant à l'entrée de la caverne, elle se libère d'un soupir de soulagement. elle met un sabot à l'intérieur. « y a-t-il quelqu'un ? » elle formule sa question tout en terminant de passer l'antre de la grotte. oreilles attentives, elle n'a aucune réponse. elle décide d'aller vers les profondeurs de l'abri naturel et l'obscurité ne tarde pas à l'envelopper.

otsoa écoute attentivement. aucune réponse brave le calme de la grotte. elle entend seulement le bruit de la pluie qui s'acharne sur la terre derrière elle. la jeune s'avance, progressant dans les ténèbres que la caverne lui propose. elle évolue alors que l'obscurité l'entoure et lui coupe sa vue. elle se rend vulnérable avec sa propre initiative.

la grise espère ne pas tomber sur une surprise pendant son exploration. elle foule le sol de la grotte au pas. elle essaie d'atténuer le bruit de ses sabots quand ils cognent la roche. ses yeux se sont habitués au manque de luminosité et elle réussit à percevoir des ombres. elle continue son aventure, ses pensées commencent à animer son esprit.

otsoa plonge dans ses derniers souvenirs. elle pense à son histoire avec minuit. douloureuses images qui assaillent sa conscience. elle se rend compte qu'elle s'est immobilisée suite à l'attaque de ses pensées néfastes. elle a tué tout mouvement et elle se retrouve stoïque au milieu du couloir sombre qu'elle parcourt. sa mâchoire se crispe et ses muscles se tendent.

elle parvient à chasser ses souvenirs corrosifs. elle remarque que des larmes avaient perlé le long de ses ganaches. elle a calmé ses sanglots et la grise renifle pour effacer les derniers signes de son désarroi. elle ne se remet pas directement à marcher. elle croit entendre un bruit derrière elle. ses membres se mettent à trembler. « y a-t-il quelqu'un ? » répète-t-elle d'une voix étranglée.