/ éternité glacée

il se force, il faut le dire. il a envie d'apprécier cet endroit, comme pour essayer de se rapprocher d'elle. si elle aimait et qu'il aime aussi, peut-être se sentira-t-il plus comme son fils. peut-être sera-t-elle moins une étrangère qu'il est censé pleurer depuis gamin, sans l'avoir jamais connue.
aujourd'hui, aszio a grandi. il sort de l'adolescence et malgré son inconfort dans cette zone, ses pas se veulent assurés. le ciel est d'un bleu limpide et uniforme et un soleil pâle vient caresser ses poils gris et brillants. il trouve l'endroit moins hostile, comme cela. peut-être devrait-il toujours venir quand le soleil est présent, peut-être que ça serait plus facile ainsi. une ombre passe sous la glace qu'il foule et il se fige, suivant l'immense animal se déplacer lentement sous lui pour disparaître dans le fond abyssal. il ose un sourire. peut-être qu'il peut commencer à capter quelques trésors de cet endroit.

Elle entre dans son champ de vision comme une intruse dans une fête où elle n'a pas reçu d'invitation. En la regardant marcher, Aszio ne ressent qu'un dégoût profond, rapidement délogé par un sentiment plus fort, plus vicieux, plus dévastateur : une colère brute, sans limites. Il bouillonne déjà depuis quelques secondes quand il braque sa trajectoire droit sur elle. Droit mais agité, il se dirige vers elle sans détours, et semble aujourd'hui un peu plus habitué à la froideur du Nord qu'il ne l'était petit. Parce qu'il essaie, malgré les contradictions. Malgré sa présence possible, à elle.
Depuis qu'elle l'a attaqué, elle est dans l'esprit d'Aszio son principal ennemi. Derrière se cache l'immensité de la Tribu, certes. Mais sa cible, c'est elle et elle le sera jusqu'à-ce qu'il ait pu se venger de ses actes. Elle est obligée de l'avoir remarqué, maintenant qu'il ne se tient qu'à quelques mètres. Il l'interpelle d'une voix forte, plus grave qu'avant, témoin de son passage à l'âge adulte même très récent. Eh bien alors, tu n'as pas trouvé un autre gosse à battre à mort ? lance-t-il, venimeux, ses yeux ambrés lançant des éclairs de toutes parts. Il sent déjà son sang cogner à ses tempes.

Aszio ne se montre nullement impressionné par le vif état de colère dans lequel sa simple présence plonge Boréale. Il n'est plus un enfant et il compte bien le lui montrer. Pourtant, ils lui ont tous dit que ce n'était pas la marche à suivre. Mais les voix sont là, déjà, et lui crient de ne pas se laisser piétiner. Il ne se laissera pas faire, cette fois. Elle mentionne l'existence de sa soeur et ce simple fait, entre ses lèvres, le fait bondir en avant pour se retrouver juste devant elle, regard embrasé. Ne t'avises pas à toucher à ma soeur, ou même d'en avoir simplement l'idée ! menace-t-il férocement, piqué au vif encore plus quand on parle de faire du mal à Azara. Il gronde, tentant de calmer un calme, aussi infime soit-il. Sinon, j'te le ferai regretter ! vocifère-t-il en espérant être menaçant. Même s'il sait que Boréale ne sera pas intimidée ni apeurée. Elle n'est malheureusement pas comme ça. Ils ne sont pas comme ça. Ses enfants ne connaissent pas la peur et c'est ce qui les mènera, tous, au chaos.

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Ses mots lui font grincer les dents. Tu n'es plus notre soeur depuis longtemps, lui crache-t-il presque au visage, comme un félin crachant sa haine et son dégoût. Il ne veut plus jamais se souvenir qu'ils ont un parent en commun, pour Aszio, ce n'est plus le cas depuis le jour où elle a essayé de le tuer. Il se laisse surprendre par son attaque, leurs poitrails s'entrechoquent mais il évite ses coups de dents en remuant la tête de toute part pour l'éviter. Profitant d'être aussi près d'elle, il se cabre pour tenter de lui donner un coup d'antérieur, si possible directement dans la tête. La rage est déjà près de son apogée, il ne se sent plus réfléchir, ne se sent plus en contrôle de lui-même. Une seule chose lui importe : la blesser, et la blesser encore, comme elle l'a blessé lui.