« Still Waiting. »

Curieuse, la petite Kiyo grignotait les feuilles de ces étranges arbres pour savoir le goût que ça a.

Hurricane était tapi sous un arbre. Le regard prédateur, la posture défensive, il ne bougeait pourtant pas. Il n'était en aucun cas un monstre. Il n'était en aucun cas un tueur. Mais pourtant ?

♥

L'innocente pouliche continuait à découvrir le goût de ces feuilles particulières. La noire commençait à avoir la langue piquée par le parfum amer de son repas inconnu. Elle finit par lâcher l'affaire, reculant la langue pendante qui souffrait le martyr. Ce n'était pas très comestible.

Il tourna la tête. Là-bas, il vit une pouliche qui avait la même robe que lui. Il eut presque un pincement au coeur. Si frêle, si innocente, si naïve. Il ne la connaissait pas, mais on était tous pareil à cet âge-là. La robe ébène, les oreilles curieuses, le regard brillant. Où était donc passé cet éclat dans son regard à lui ? Il ne dit rien, garda un silence de marbre, l'observant aussi simplement que cela.

Bizarrement, la petite noire se sentit observer par une "chose". Elle laissa donc son regard fouiller la zone et enfin apercevoir un étalon noir. Elle rangea sa langue dans sa bouche avant de laisser paraître un sourire sur ses lèvres. Cependant, elle n'osait pas aller à la rencontre du mâle.

Le sourire de la petite ébranla le mâle. Il détourna son regard charbonneux, sans pour autant bouger. Il lâcha un profond soupir, observant les alentours.

La pouliche fut déçue qu'il ait détourné son regard. Pourquoi ne faisait-il pas comme les autres, à venir vers la pouliche ? Devait-elle ravaler sa timidité et faire le premier pas elle-même ? Rien que de penser à cela, Kiyo commençait à avoir la peur lui brûler à petit feu à l'intérieur d'elle.

De toute façon, c'était ça ou rien; ça n'allait certainement pas être lui qui allait approcher d'elle. Il savait qu'il l'intimidait très certainement, pourtant, il avait plus peur d'elle que le contraire. Il avait peur de tout le monde et de rien à la fois. Une peur sourde et invincible. Si, vincible. Ses yeux revinrent se braquer sur la pouliche. Pas froids ni sévères; justes vides et neutres.

Comme un aimant, ses pas s'actionnaient vers cet inconnu, attirée par lui tandis que son cœur s'engageait dans une course folle. Ses yeux ne le fixaient plus, ils avaient détourné de leur cible, en découvrant une autre. Plus elle sentait la présence du mâle proche, plus son corps s'empara de frissons gênants.

Avait-elle si peur que ça ? L'étalon ne la lâchait pas des yeux, comme si elle allait d'un seul coup se transformer en un monstre sanguinaire. Mais non. Elle était toujours petite et frêle. Fragile. C'était elle qui aurait besoin qu'on la protège. D'où lui venait alors cette peur qui lui tordait presque le ventre ? L'étalon l'ignorait. Il retint son souffle tandis que la petite était presque là.

La chétive avait réussi à braver sa peur puisque le mâle se trouvait maintenant à quelques mètres. Ses membres décidèrent de se paralyser, maintenant ainsi une distance de sécurité. Ses yeux contemplèrent l'inconnu tandis que sa tête portait légèrement vers le bas, un bref signe signifiant sa soumission. « Je... Bonjour... » Une fine voix bravant le silence de roche, ses yeux s'abaissèrent vers le sol et ils fixèrent ses sabots antérieurs qui trépignaient la terre humide. Arrivera-t-elle à se calmer ? Si elle était parvenue à lire les traits craintifs de l'étalon, peut-être cela l'aurait-elle rassuré ? De savoir qu'elle n'était pas la seule à craindre quelque chose. Si seulement elle comprenait d'où venait cette peur... La guérir aurait été un jeu d'enfant. Mais ce n'était pas le cas. Elle laissait passer en boucle dans sa tête ; la dure mélodie de la crainte. Incessante, son pauvre corps céda complètement aux sanglots terribles qui eux, la rongèrent sans aucun état d'âme.

HAN les paroles de ta signature, i'm the fan number one <3.

Le ton de la yearling fait de la peine à l'étalon. Oui, il a l'air d'être seulement de glace, pourtant il est encore capable de ressentir des sentiments vis-à-vis des autres. Il l'observe, sans relâche, sans se demander si cela la gêne ou pas. Soudain, il la voit trembler. A-t-elle donc si peur de lui que ça ? Cette pensée l'attriste. Soudain, il l'entend alors fondre en sanglots. Surpris, il fait un pas vers elle, tend l'encolure, avant de la ramener brièvement vers son poitrail. " Ne pleure pas. "

♥

« Ne pleure pas. » Si cela était si simple, on n'en serait pas là. Elle devait se forcer, faire un réel travail avec elle pour parvenir à calmer ses nerfs si capricieux. Instinctivement, quand l'étalon l'approcha vers son poitrail, Kiyo vit en lui un protecteur. Son front se colla contre le flanc rassurant de l'étalon et les pensées qui le désignaient comme étant un danger probable s'étaient envolés. Mais ils n'avaient pas emporté dans leur vol la crainte qui était durement accrochée aux tripes de la jeune. Les pleures poursuivirent quand même leur ascension sur les joues noires de la jeune jument qui les séchassent involontairement sur la robe foncée de l'inconnu.

L'étalon, lui, s'occupe de contrôler ses pensées. De ne pas dériver vers la délicieuse brûlure que lui procure ce contact ; un contact longtemps oublié. Il lutte, les dents serrés. Nulle parole ne vient troubler le silence de confiance instauré entre les deux noirauds. Il souffle doucement sur la petite noire, la regardant pleurer.

La jeune jument ferma les yeux et inspira un bon coup. Et puis, sans s'en rendre compte, elle se laissa prendre dans les bras de Morphée.