• I’ve loved and I’ve lost - L

Je squatte.

Trottant inlassablement dans cette Forêt des Lucioles qu'il commençait à connaître par cœur - une très bonne mémoire, sans aucun doute -, l'entier slalomait avec agilité entre les grands arbres. Ses oreilles, pour une fois, pointées en avant, chassaient tranquillement les petits insectes lumineux qui virevoltaient trop près de lui. Continuant d'avancer silencieusement, le noir n'apporta aucune attention particulière à la nouvelle odeur qu'il avait pourtant repéré.

On sait jamais, que tu veuilles pas de moi.

Son trot se ralentit subitement, il se savait repéré et surtout observé. Elle était sur sa droite, grande silhouette à la robe jumelle à la sienne, très fin et allure aérienne. Ses oreilles oscillèrent en arrière puis en avant, avant de se figer en avant. Chose rare ces derniers temps. Elle renâcla et le bruit fit tressaillir les oreilles du mâle. Néo se stoppa brusquement, plantant ses sabots dans le sol feuillu. Il la dévisagea sans aucun gène, son regard brun balayant la silhouette de l'inconnue cachée dans la pénombre.

Elle est pas bien ma connerie ?

L'inconnue renâcla à nouveau et se redressa de toute sa hauteur. Encore une jument puérilement hautaine ? L'entier fit une moue invisible dans la pénombre, pas spécialement content de cette nouvelle rencontre. Quoique les apparences sont souvent trompeuses alors espérons quelles le soient pour cette inconnue. Ses orbes chocolatées aux délicieuses paillettes or captèrent les reflets de la lune sur le corps sombre de la noire et la lune effleura un très court instant l'azur énigmatique des iris de l'inconnue. Néo fit rouler les muscles de son épaule, testant la sensibilité d'un choc récent entre son épaule et la mâchoire d'un loup. Ça fonctionnait encore bien, parfait.

L'entier observa les iris azures disparaître sous les paupières de la noire. Avant qu'elle ne repose à nouveau ses iris insondables sur la pénombre dans laquelle il se tenait. Il esquissa un sourire, jouant à cache cache involontairement avec l'inconnue. Et ce fut au tour de celle-ci de se jouer de lui, reculant dans le noir, chassant les lucioles qui l'éclairaient. Elle disparut subitement dans la pénombre de la Forêt des Lucioles, laissant le noir seul en face à face avec la nuit. Les lucioles l'éclairant faiblement, Néo resta immobile, oreilles pointées vers l'endroit où se tenait précédemment l'inconnue.

Le Corbeau, tous ses sens aiguisés en marche, frémit imperceptiblement. Il venait d'entendre un léger froissement de végétaux vers sa droite, en avant de lui. Et vu les conditions où il se trouvait, il ne pouvait s'agir que de l'inconnue. Désormais il avait un rayon pour la situer mais rien d'autre. Quoique, c'était déjà ça. Et puis, la noire paraissait intéressante alors autant la laisser faire ce qu'elle voulait. Pour le moment, bien sûr, seulement pour le moment. « A vous de voir. » Répondit-il à son tour, sur le même ton chuchoté que l'inconnue à la robe ébène. Qu'il ne voyait d'ailleurs toujours pas.

Elle échappe un léger rire et il parvient à ses oreilles. Le rire de Diana. Alors c'est ça, elle descend de la famille de la grande Diana. De son double féminin, son alter-ego. Diana, sa chère Diana. Il esquisse un sourire alors que les lucioles cessent un instant de l'éclairer, cachant ainsi le sourire malsain qui court sur les lèvres du Corbeau. « Tu lui ressembles, et pourtant vous êtes si différentes. » Souffle t-il à l'intention de l'inconnue à la robe ébène.