Pursuit of happiness

Le jardin secret, ça pouvait être chouette pour les amoureux des scénarios à la Titanic, ou encore les adeptes des parfums floraux flottant excessivement dans l'air, à vous donner des nausées jusqu'au matin. Pas mon trip; levée du mauvais pied, j'avais passé toute la sainte journée à ronchonner, voilà maintenant qu'une fois passée la frontière pour entrer dans les lieux, j'étais stoppée à la douane par de terribles éternuements. Glamour.

Entre deux éternuements, une effluve purement féminine vint me titiller les naseaux. Les yeux clos, j'éternuai encore. Puis une nouvelle fois ; je soupirai. Quand je rouvris mes mirettes, une tache blanche se détachait du décor, floue. Mise au point de l'oeil droit, puis du gauche... avant de découvrir sa réelle silhouette. C'était une jument, farouche, qui semblait communiquer avec ses oreilles. Je fis de même, les pointai vers l'avant. "mm.. salut !" énième éternuement.

J'éternuai encooore et encore, la blanche ne semblait pas apprécier cela, et sursautait à chacun d'entre eux. Je m'en excusai poliment, esquissant un sourire gêné. "Quelque chose, dans l'air.. ça me gêne. C'est la première fois que je ressens ça" avouai-je d'un ton perturbé. Fixant la femelle, comme si elle pouvait m'apporter une réponse salvatrice.

Bouuuh la vilaine aux clichés

Je lui répondis du tac au tac "pas à ma connaissance, non." mais comme si une force supérieure avait décidé qu'il était temps d'arrêter cette discussion autour des éternuements, ils semblaient s'être arrêtés - du moins, mes naseaux ne me chatouillaient plus. La jument blanche n'était pas la seule à penser clichés : je riais moi-même intérieurement, comparant l'ébène de ma robe à la blancheur immaculée de la sienne. Plutôt drolatique à voir. "Vous êtes nouvelle dans le coin ?" finis-je par balancer, histoire de lancer la conversation.

Je hochais la tête à la réponse de la blanche. « Je ne vais pas dire que je fais partie des arbres, parce que je ne suis pas là depuis des années entières, mais j'ai bâti quelque chose ici. Je m'y sens bien. » avouai-je, les yeux rivés vers le ciel, pensant à ce que j'étais en train de dire. J'entretenais des liens de confiance avec certains, je protégeais un poulain de prime abord inconnu comme mon propre fils, et j'avais une idylle avec quelqu'un de bien. Un sourire vint éclairer ma mine sombre. « Tu ne dois pas faire partie des Rapides, je suppose? Je ne t'ai jamais vu sur ces terres. » la discussion était aisée. Malgré son air farouche, et sous ses airs hésitants, elle dégageait paradoxalement une chaleur accueillante.

Plum' ne put s'empêcher de pouffer en s'imaginant comparer la noire avec un arbre touffu, sans vouloir pour autant discréditer la jument.
*Eh bien, ça en fera au moins une !*
La blanche répondit confusément, comme si elle avait pensé tout haut avant de répondre : "Euh.. non non, je suis de la Prairie !"

Plum' leva les yeux au ciel tout en répondant : "Tout est relatif.. mais on s'y sent bien, oui."
Comment se sentir chez soi quand on ne s'était jamais senti à sa place, depuis sa plus tendre enfance ?
Bref, la blanche détourna l'attention en demandant : "Et toi, tu es des Rapides je suppose ?"

Plum' se laissa aller et accompagna la noire avec son petit rire aiguë; elle n'avait pas vu la chose sous cet angle.
"Non, non ! Un ensemble de petites déductions seulement."
La blanche avait cette faculté d'observer les petits détails auxquels personne ne s'intéresse, ou plus simplement d'écouter attentivement ce qu'on lui disait.