Comète | Miu

Il fait nuit. Les étoiles scintillent, la Lune joue les coquettes. Miu est allongée dans l'herbe pour profiter du spectacle. Son ventre s'arrondit sensiblement et malgré les circonstances de la procréation et le père de cet enfant, elle se sent sereine.

La nuit. C'est son moment préféré. Là où elle peut se fondre aisément dans la pénombre. Se camoufler avec les ombres. Retour à l'état primitif : celui de ne faire qu'un avec l'obscurité. Sa robe noire et unie se confond parfaitement, avec une aisance presque dérisoire. Elle marche d'un pas silencieux, c'est à peine si on pourrait la remarquer. Ses yeux, brillants d'un éclat sombre et malicieux, observent cette silhouette, là-bas, couchée. Sereine. Il est temps de briser un peu tout ça. Elle s'approche. Innocente. Avec cet air presque chétif sur le visage, comme si elle n'était encore qu'une enfant. Elle arbore un sourire gêné en s'approchant. « Bonsoir.. pouvez-vous m'aider ? Je crois que je suis perdue. »

Un léger sursaut reconnecte Miu avec la réalité. Elle cligne des yeux, tournant un visage surpris vers la jument à la robe sombre. Son expression se détend pour devenir chaleureuse. La rouquine se relève pour faire face à l'inconnue ; " Je pense pouvoir vous aider oui, cherchez vous un endroit en particulier ?"

Elle incline une oreille vers la rousse. Remarque son ventre légèrement enflé. Intérieurement, elle sourit. Deux pour le prix d'un. « Un endroit au bord de l'eau.. Je ne sais plus son nom exactement. » fait-elle, mimant l'excuse en baissant la tête au sol.

"C'est qu'il y en a beaucoup..." Laissant le silence s'installer, Miu fait l'inventaire des endroits qui correspondent à ce que recherche la nouvelle venue ; " Il y a une crique, des lacs, des rivières, des plages, des bains....Est-ce dans un territoire particulier ?"

« Je crois qu'il s'agissait d'une plage... » Elle baisse la tête, penaude. « J'ai un sens de l'orientation tellement minable que même si vous m'indiquez le chemin, je serai capable de me perdre. » Elle renifle, mimant à la perfection la jument en détresse. « Et je ne veux pas vous importuner.. »

"Je peux vous accompagner si vous voulez...Je n'ai rien d'autre à faire." Miu lui sourit en haussant les épaules.

« Vous feriez ça ? » demande-t-elle avec des yeux ronds et un sourire enfantin. Elle observe son ventre avec un sourire presque tendre. Quelle comédienne. « C'est pour bientôt ? »

"Oui bien sûr !" La rousse lui sourit avant de jeter un regard à ses flancs ; "Il va se faire attendre, je n'en suis qu'à mon premier mois..."

« Merci, c'est très gentil. » Tout semble si vrai. La jument, le décor, la noire. Tout, à quelques détails près. « Oh, je vois. C'est un heureux évènement, en tout cas. »

"C'est normal...." Elle prend le pas et fait signe à la jument noire de la suivre. Elle voudrait répondre poliment à la noiraude mais l'événement à venir ne sera pas des plus heureux. Pas la naissance mais ce qu'il s'en suivra. Fréquenter Ramsès aussi intimement n'est pas la meilleur chose à faire....Le futur qui s'annonce ne sera pas au goût de tout le monde ; "Je m'appelle Miu en fait..."

Brooklyn remarque. Tout de suite. Que quelque chose cloche. Que son sourire cache les failles qu'elle n'ose pas dire. Mais elle attend. Le bon moment pour les mettre à nu. Elles se mettent à marcher, et la noire lance un sourire à la rousse lorsqu'elle se présente. Elle s'est toujours présentée sous un faux nom. Partout. Partout, sauf ici. Ici, c'est comme si elle prenait un malin plaisir à leur donner le vrai. Pour qu'ils le retiennent, tous. « Et moi Brooklyn. » fait-elle en secouant sa crinière de jais. « Le père est heureux de cet évènement ? » demande-t-elle d'une voix douce au bout de quelques instants de silence, désignant de nouveau les flancs légèrement gonflés de la jument.

Miu n'a jamais vraiment appris à se méfier des autres. Comme si tout son passé ne lui avait rien apporté. Puis elle ne peut pas imaginer qu'une jument puisse lui mentir. La rouquine reste silencieuse aussi, quelques secondes ; "A vrai dire...je ne sais pas. Je ne suis pas sûre que cela ait de l'importance pour lui."

« Il est ici ? » demande-t-elle alors, en pointant les oreilles. Elle continue de marcher, tranquillement, sans se presser.

"Non, il n'est pas là..." Ses dents se serrent. Elle aimerait ne plus jamais le voir ou, à défaut, qu'il la laisse en paix le temps de sa grossesse ; "Mais c'est mieux comme ça."