make you a believer Δ septenrê

Elle cligne des yeux. La lumière blanche du jour l'aveugle, allongée au milieu des os poussiéreux. Elle a dû passer la nuit ici, mais ne se souvient pas pourquoi. Elle se relève difficilement, les muscles douloureux. Son état se dégrade. Et Ruyn seule sera l'antidote. Son regard incompréhensif balaie les environs déserts.

Chaque craquement, chaque bourrasque, lui font siffler les oreilles. Elle avait l'impression d'avoir dormi cent années. Ce qui ne serait peut-être pas si mal, au fond. Ses yeux se plissent; ils ne sont pas encore adaptés à la lumière diurne. Après quelques secondes, elle distingue une silhouette noire. Et c'est à l'instant même où sa vue se précise que son cœur bondit douloureusement dans sa poitrine. Pourtant, elle reste immobile, à la fixer d'une manière indescriptible, exprimant mille sentiments au moins.

Sa bouche s'entrouvre, laissant échapper un soupir intense d'émotion. Elle cligne des yeux un instant. Elle s'avance vers son étoile noire. Ses pas sont imprécis et incontrôlés, comme si tout son être, jusqu'aux tréfonds, ne désirait qu'une seule et unique chose: la retrouver.

Argh. C'était trop beau pour être vrai. Et ce n'est pas vrai. Septenrê s'immobilise, fixant le sol de son regard dément, là où se trouvait Ruyn il y a une seconde. Ses naseaux se dilatent convulsivement, dans ses veines le sang court furieusement, ce qu'il les fait apparaître sous sa peau d'or. Ses côtes se soulèvent à un rythme hyperactif, et ses muscles sont tendus à craquer. Poursuivre la plus belle des chimères était au-dessus de ses forces. La princesse voyait Ruyn partout. Tout le temps. « Dégage. » lâche-t-elle avec difficulté, ses yeux s'humidifiant de rage. « DÉGAGE! » rugit-elle, se tournant brutalement vers l'akhal. Et le silence du désert retombe.

Les protestations de la belle noire sont comme un signal. Septenrê se propulse vers elle, elle voulait qu'elle disparaisse! Qu'elle cesse de revenir et de partir au dernier moment. D'une certaine façon, elle la tuait. Mais alors que sa mâchoire s'entrouvrait pour se refermer sur Ruyn, elle s'immobilise devant elle, le souffle saccadé, proche de son chanfrein. Elle la regardait dans les yeux, mais semblait regarder à travers elle. C'était comme un lion affamé incapable de s'attaquer à la gazelle juste devant lui. Elle gronde. « Retourne d'où tu viens, ma belle. » ordonne-t-elle, sèche. Ses prunelles glissent lentement vers ses lèvres délicates.

Lorsqu'elle recule, la princesse se détourne, cachant son visage déformé par la tristesse qui la tuait à petit feu. Ses oreilles se dressent, entendant la voix de Ruyn. Pendant une seconde, elle s'imaginait ses paroles. Peut-être la pardonnerait-elle et tout serait terminé. Peut-être lui offrirait-elle un "je t'aime", et elles s'embrasseraient. Quelle naïveté. Quelle naïveté! Ses oreilles joignent sa nuque, et elle tourne légèrement la tête, prenant soin de ne pas poser le regard sur le sujet de ses cauchemars et insomnies. « Te faire partir par la force. » Ses propres mots la dégoûtaient et lui donnaient envie de vomir. Elle serre les mâchoires.

Alors Septenrê, en esclave peut-être, s'exécute. Son visage fou se ferme et s'assombrit, laissant place à son impassibilité habituelle. Elle se retourne lentement, vissant ses deux abysses dans les océans de Ruyn, et s'approche. Son poitrail effleure délicatement le sien. Un exquis frisson parcourt son corps: combien de fois avait-elle tenté se remémorer la volupté de sa peau? Ses naseaux, puis sa bouche, viennent caresser sa fine encolure, et remontent vers sa tête. Elle ferme les yeux, et ses lèvres viennent saisir, avec une douceur et une sensualité infinies, les siennes. Elle les embrasse avec une certaine timidité et une pudeur qu'on ne lui reconnaissait pas. Après plusieurs dizaines de secondes, la princesse remonte lentement vers sa nuque, après qu'elle lui eut abandonné un regard désolé. Sa mâchoire saisit doucement sa nuque, jusqu'à y mettre, petit à petit, plus de pression. Ses naseaux dilatés inspirent encore ce parfum si propre à sa rose, avant de lâcher un grondement et d'amener, cette fois sans douceur, sa prise vers elle, afin de la déséquilibrer.

Alors qu'elle s'arrachait aux mâchoires dangereuses de Septenrê, la princesse s'écarte aussi d'un pas. Son regard est illuminé d'une flamme nouvelle, une flamme noire, plus noire encore que l'obsidienne de ses yeux, et carnassière. « Je ne fais qu'exécuter tes ordres. » déclare-t-elle, d'une voix forte, dotée d'une pointe d'ironie. Elle serre les dents, et s'élance vers Ruyn, la chargeant de sa dense masse musculaire. Leurs poitrails se heurtent, et sa bouche vient s'échouer sur son garrot saillant et osseux. Elle l'embrasse avec plus de force (passion?), avant de le mordre sauvagement.