|Don't give up| Tomoe

Le poulain était aujourd'hui à la recherche de son fidèle ami, le renard et malheureusement, il ne savait pas où il était allé, Tomoe faisait son possible pour passer inaperçu. La brume de ce lieu l'aidait fortement et heureusement, puisqu'il détestait la compagnie sauf celle de Kitsune.

La brume épaisse laissait une vision très flou du lieu et le blondin ne semblait aucunement atteint par cette difficulté. Il préféra abandonner ses recherches pour le moment afin de mieux se concentrer sur ce qui se passait autour de lui et lors d'une bourrasque de vent, une odeur sucrée vint jusqu'à lui. Les oreilles du jeunot s'applatirent sur son crâne et il s'accroupit brusquement sur le sol, impossible à repérer. Le poulain ne parvenait pas à la retrouver du regard, mais l'odeur l'aidait et puisque son odeur lui était parvenu, il comprit que la sienne aussi devait survoler la zone. Le renardeau préféra se cacher, détestant les rencontres et les êtres vivants, mais l'exception à la règle était bien évidemment Kitsune, son compagnon de voyage.

Tomoe adorait très particulièrement la solitude, le froid ou simplement tout ce qui pouvait englober l'hiver, il ne tolérait absolument pas la chaleur, c'était trop désagréable pour le poulain. Après un moment, celui-ci se redressa et sans se soucier du bruit qu'il apportait, puis en posant un sabot vers l'avant, il remarqua quelque chose. Une silhouette se dessinant parfaitement devant lui. La pouliche était juste là, sous ses yeux et il ne s'était jamais douté qu'elle était si près de sa position. Il souffla doucement de l'air de ses naseaux, ne sachant pas quoi faire ni quoi dire et demeura simplement silencieux, pour le moment. Le garçon était très mignon, son regard d'une teinte unique et bleuté ne laissait sûrement personne d'indifférent. Mais, le gamin était du genre a foncer et même en sachant les inconvénients, après tout, il était orphelin vivant par lui-même, sans l'aide de personne. Tomo' était rusé et sournois, mais cela, nul ne le savait, en fait...

L'arrivée de l'hiver. L'été qui fait ses adieux. Le froid fait mourir les feuilles des arbres qui se dénudent. Un triste paysage aux couleurs teintes d'orange et de rouge. Runaway ne s'intéresse à rien. Elle est telle une âme égarée, emprisonnée par une boîte charnelle qu'elle traine partout. Elle est vivante et cela ne l'enchante pas spécialement. Ses premiers pas dans le monde réel la condamnent à vivre. Ses yeux qui s'accrochent à la terre, vidés d'émotion. Cela montre une neutralité nette sur ce qui l'entoure. Rien ne la touche, rien ne l'intéresse. Seule, elle conduit sa carcasse dans la brume épaisse. Un espoir vaillant mais pourtant réticent. Elle devrait s'amuser comme une pouliche ordinaire. Elle ne se mêle pas aux autres, elle est l'ombre éternelle qui reste à l'écart, sans savoir qu'elle est son utilité. Un regard objectif observant les autres de son âge et nuisant ainsi à son intégration. Elle ne comprend pas, elle ne comprend rien à vrai dire. Elle est une âme égarée qui ignore quel est son destin. Le dessin de son combat incertain, luttant contre une envie explosive avide depuis sa naissance, contrôlant sa jeunesse dans un cadre loin d'être utopique. Ses formes se distinguent dans le brouillard et la voici à découvert dans le regard de ce poulain orphelin.
Et d'un regard échangé, quelle sera la suite ?

Le paysage était tel qu'il le laissait voir, un environnement sans aucun intérêt et les arbres dénudés de toutes couleurs, ce qui était parfait ainsi. Le blondin se tenait là, debout devant la femelle et le silence semblait plus lourd que jamais, ce qui était évidemment agréable aux oreilles du mâle. Celui-ci détourna un moment le regard, le regard sans vie et exprimant un désintérêt complet face à la pouliche. Par contre, Tomoe n'était pas con ou fou et il avait remarqué dans son regard un manque de vie, quelque chose qui lui laissait croire qu'elle ne serait probablement pas comme cette autre fillette, Maxine. L'habitude de la compagnie n'était pas certe son point fort et cela ne l'enchantait guère, c'était quasiment déstabilisant. Mais, soudainement il crut y reconnaître une odeur familière et sourit sournoisement, c'était son compagnon qui était enfin revenu. Cela faisait deux jours qu'ils ne s'étaient pas vu et Kitsune commençait à '' manquer '' à son cher ami, le poulain. Son unique et vrai compagnon de voyage, le seul qu'il considérait comme un ami. Mais, évidemment puisque le jeune renard était plus petit, la brume l'englobait parfaitement et Tomoe savait qu'il était encore un peu loin pour venir le rejoindre dans l'immédiat. De toute évidence, l'amitié était une perte de temps et l'inconnue ne voulait sûrement pas perdre son temps aussi.

Une perte de temps. L'amitié, une désillusion qui est pourtant l'intérêt de beaucoup. Chercher à plaire, chercher à se faire. Lier ou s'unir à quelqu'un ou quelque chose. L'indépendance trempe Runaway dans son eau chaude, lui insufflant des convictions dont le corbeau tient. L'échange bref de leur regard, corrompu par la solitude elle-même qui joue des deux êtres dans un air qui leur plait. L'esprit vif de la pouliche, réticent à s'allier et dansant solitairement sur une piste dangereuse. Pourtant, le feu brûle et sa raison défaillante la damne sournoisement à rester là. L'immobilité de ses membres, qui paralysés, la laisse face à ce poulain. Le silence est une vertu dont la pouliche en est adepte. Elle ne parlera pas, elle ne sourira pas et elle trouve étonnant ce sourire sale qui étire les lèvres de son compatriote. Ses yeux accrochés à ce sourire, elle ne partage aucune joie. Au fond, règne l'envie explosive de détruire tout bonheur et rendre malheureux l'autre heureux.

(J'adore les prestances de ce sujet, il y a ce quelque chose entre les deux poulains, c'est débile, j'adore ça.)

C'était silencieux, plus rien n'avait d'importance, en cet instant et le vent se mit donc à souffler un moment, une brise légèrement violente pour une journée qui s'annonçait douce. Le froid avait décidé de pointer son nez et cela plaisait énormément au poulain qui ne demandait que ça, après tout, l'hiver arrivait très bientôt. Il adorait. Lentement, mais sûrement son sourire disparu et demeura attentif, le regard vif, mais tout simplement indéchiffrable. La pouliche n'aurait malheureusement aucune chance de savoir ce à quoi il réfléchissait ou pensait, c'était le vide total. La brume était devenue plus épaisse comme quoi le froid n'était pas prêt à disparaître de si tôt et il y avait certainement quelque chose que la jeune fillette ne savait pas encore à propos de Tomoe. Lui et son partenaire de voyage avaient une tactique incroyable, les deux n'avaient aucunement besoin de se communiquer oralement quoi que se soit. L'un savait pertinemment ce que l'autre désirait et c'était ainsi que leur relation était fondé, c'était après tout sa seule véritable famille, ce Kitsune.

Alors, d'un pas furtif et voleur, le renard marchait désormais tout près d'eux pour finalement s'arrêter derrière la gamine, grognant silencieusement, l'avertissant de sa présence. Cette bestiole était l'animal qui avait suivit le poulain, depuis qu'il était poulain et jamais ils se sont séparés. Le renardeau ne faisait que protéger son partenaire, il n'avait pas encore l'intention de blesser qui que se soit et de toute évidence, le jeune garçon était le manipulateur des ficelles de cet ami. Le blondin n'allait certainement pas dire quelque chose, ce n'était pas aujourd'hui qu'il allait devenir bavard et sociable. Mais, maintenant, Tomoe savait que son ami était arrivé et il se tenait tout juste derrière la gamine, quelque peu menaçant, mais sans plus. Avec une petite touche de sarcasme, bien entendu.

Le vent qui se lève, souffle et refroidit l'atmosphère. Un léger frisson parcourt l'échine dorsale de la jeune. L'hiver fige le temps. Runaway ne porte aucun intérêt aux saisons comme aux paysages qui changent. Ses yeux ancrés dans ceux du poulain. Un gloussement, derrière elle, l'alerte d'une nouvelle présence. Elle se retourne et aperçoit le renard. Un premier lien, mais pourtant si mystérieux, entre les deux poulains délié par la présence de cette chose. Une chose dont la pouliche voit pour la première fois. Elle n'est pas sur la crainte ; la peur ne l'assaille pas. Son regard est également indéchiffrable. Néanmoins il en revient au poulain. Deux êtres qui ne communiquent pas et qui ne se trahissent pas. Un semblant d'émotions peinant à s'installer. Telle une coquille vide, évoluer sur ce terrain incertain. Svelte et la tête haute, la pouliche ne lâchera jamais. C'est dans le silence le plus total que les deux êtres se laissent prisonniers du temps. Une illusion que le sable sablier ait arrêté de couler, l'horloge continue à tourner. Tic, tac... L'esprit de la pouliche s'étend à une conscience paradoxale. Les yeux dans les yeux, aucun sentiment transcrit. Le sifflement du vent est la seule cadence au rythme sonore du pré.

Il y avait quelque chose de très inexplicable et même voir beaucoup trop mystérieux pour eux, leur regard se croisèrent, mais aucun son n'émanait de leur bouche, c'était une symphonie parfaite. Cette brume épaisse donnait à ce paysage un air très spectrale et même voir fantomatique, mais étaient-ils tout simplement une apparition fantomatique? C'était étonnant de les voir ainsi se nourir du regard de l'un et de l'autre sans même dire un seul mot comme s'il se nourissait de l'âme de chacun. Le compagnon finit par se détacher de la pouliche, le renardeau ne semblait désormais ne plus y attacher d'importance et vint se poster entre les membres du blondi, se blotissant, en petite boule. La distance était bonne et aucun ne pouvait se permettre de bouger, c'était un instant inimaginable. Même Kitsune ne voyait plus de danger et n'agissait que pour son propre intérêt, il était encore bien têtu, mais la bête sauvage semblait vouer une pure dévotion pour le poulain. Le vent se mit donc à souffler et le pré embrumé était maintenant la proie parfaite pour les différents (autres) prédateurs du coin. Les odeurs venaient en millier, Tomoe savait que cette rencontre n'était pas ordinaire et même en sachant cela, ça lui était... d'aucune importance. L'amitié lui importait peu et les rencontres aussi, d'ailleurs. Cependant, cette enfant resterait sûrement dans son esprit pour un moment et non pas parce qu'il avait eu un oeil dessus, mais parce que dans ses yeux, il se voyait lui. Même aurait-on pu dire qu'il ne la considérait même pas comme une... fille? Décidément, ils étaient réellement prisonniers du temps et aucun d'eux ne souhaitaient lâcher prise, de vrais têtes brûlées. Mais, soudainement, le renard se réveilla et ne semblait aucunement normale, il avait vu quelque chose au loin, sûrement une chose très dangereuse. La bestiole mordit sauvagement dans l'antérieur de son '' maître '' afin de lui faire comprendre que là, ce n'était plus un environnement sécuritaire, il ressentait du danger. Effectivement, au loin, il se passait quelque chose d'anormal et lorsque son regard croisa celui de l'inconnue, un courant parcourut son échine, un frisson. Ce même frisonnement que la gamine avait ressentit quelques instants plus tôt et ce n'était certainement pas à cause du changement de saison qui était le vent de l'hiver. Quels seraient donc leurs réactions à ces deux âmes errantes et silencieuses?

Une harmonie douteuse ; une connexion mystérieuse. Leurs regards continuent à se confronter alors que les deux jeunes semblent maîtriser aucun mot. Un mutisme poignant qui agrippe Runaway ainsi que ce poulain inconnu dans une bulle. Un regard qui ne se détourne pas de sa cible ; aucun message prononcé. L'environnement a disparu autour d'eux, les laissant jouer leur propre rôle sur leur scène à eux. Le renard, seul ami de ce protagoniste, n'intéresse guère la jeune dont les prunelles ne se lassent pas de celles du poulain doré. Elle voit son reflet et sa silhouette frêle qui est retranscrite dans les iris noirs de son compatriote. Une alliance scellée silencieusement entre les deux âmes errantes, qui fuient les idéologies et les coutumes de la vie. Ils prennent un chemin différent, une voie qui les mènera à l'ascension d'un fantasme encore étranger. Le parfum change ; il se mélange à une odeur forte. L'odorat de Runaway est titillé par les effluves qui flottent dans cette atmosphère lourde. Le lien se rompt et son regard joint des silhouettes floues qui se sont formé dont le rideau blanchâtre empêche la jeune à déterminer le nombre et l'espèce. Elle a oublié l'horloge qui tourne ; le temps qui continue à faire couler le sable. Elle ne considère pas le réel danger ; le potentiel que la mort peut la toucher. Elle ne se sent pas invincible pour autant ; son âme innocente n'est pas embellie par la naïveté elle-même. Son regard recroise les yeux du poulain dont elle a ignoré la présence pendant quelques minutes. Vides de sentiment, ses prunelles ne retranscrivent aucune émotion. Cependant ses pupilles dilatées montrent qu'une certaine adrénaline grimpe en elle alors que l'odeur se rapproche à grand-pas.

Ces formes au loin qui ne ressemblaient à rien de tout ce que le poulain avait déjà vu et côtoyé ne semblaient aucunement de bon présage. Décidément, les deux protagonistes de cette histoire avaient l'impression de vivre dans le regard de l'autre, s'aperçevant d'un reflet similaire à leur silhouette et l'adrénaline se ressentait parfaitement dans l'air. Cette situation était particulièrement '' excitante '' et peut-petre même serait-elle d'un divertissement à nul autre. Tomoe posa envers le renard un regard que lui seul pourrait déchiffrer et l'animal s'écarta spontanément, s'éloignant même. Après quelques minutes, la bête se volatilisa dans la brume et on n'entendit plus un son, c'était complètement désertique. Le blondi reposa alors son attention sur la gamine qui venait tout juste de reposer le regard dans le sien, mais avec une lueur différente cette fois-ci. L'adrénaline.

Cependant, ce qui était bizarre, c'était qu'il n'y avait pas qu'une seule odeur, mais bien plusieurs et elles venaient toutes vers les deux jeunes poulains. Mais, la peur ne semblait aucunement les habiter, peut-être préférait-il tout simplement confronter eux-même la mort et cela s'en se soucier des inconvénients. C'était propre à eux. Mais, le temps n'était plus figé et de plus en plus, on parvenait à y voir d'énormes ombres au travers du brouillard. Qu'était-ce? Tomoe quant à lui n'avait pas peur et son regard n'exprimait décidément rien, c'était le vide total. Leurs âmes étaient-il si connecté que même les odeurs ne parvenaient point à les défaire de cette espace? Aux yeux du poulain, cette fillette n'en était plus une... Elle n'était personne ou plutôt, ils étaient '' personnes ''.

Oui, ils sont personne. À travers ce monde vaste, les deux protagonistes n'ont pas signé leurs noms quelque part. Le silence qui sème derrière lui l'envers du décor. Une histoire qui débute et dont le point final n'existe pas. Les pages se tournent et le destin se forge. Les effluves se rapprochent et la confrontation n'est pas évitable. Son regard ne se lasse pas de celui du poulain. Il germe en lui, il plante ses poignards pour tisser un lien indéchiffrable. L'adrénaline grimpe chez la pouliche dont le rythme cardiaque prend de la vitesse. Ses naseaux se sont dilaté pour essayer de mettre une identité sur la source de ces odeurs mêlées. Sa vie est courte, elle ne peut donc pas se fier à son répertoire. Soudain, un feulement ou un simple cri perce le silence dont les deux poulains se sont engagé. Son regard se pose par automatisme sur les silhouettes dont le rideau blanchâtre masque leurs formes.

De touts petits yeux commencèrent à nous épier et peu à peu, on parvenait à distinguer vaguement des silhouettes jusqu'à ce que l'on se rende compte enfin que nous avions affaire à une meute de... loups. Ce n'était certes pas rassurant et très intelligent de se mesurer à un tel troupeau, alors il serait sage de tout simplement disparaître de leur champ de vision. Le poulain demeura là, bien calme et posé, observant la réaction de sa congénère sans pour autant paniquer ou se prendre les jambes à son cou, Tomoe n'était pas comme tous les autres si peureux. Lorsqu'ils furent suffisamment proche d'eux pour dire que maintenant c'était dangereux et imbécile de rester planter là comme un piquet, le gamin décida bien penaud de changer de cap. Il jeta seulement un regard vif vers l'inconnue, celle qu'ils partageaient tous les deux une étrange connexion et prit le pas sentant malgré lui cette sublime adrénaline. L