Ψ Go back at home

Son voyage l'avait affamé. Epuisé aussi. Tout pressé de rentrer qu'il était, l'étalon avait peu mangé et dormi. Juste ce qu'il fallait pour avancer un peu plus chaque jour et arriver au plus vite, sans pour autant s'effondrer à l'arrivée. C'est pourquoi l'isabelle était ici, à se faire un repas digne d'un roi, sautant d'une touffe d'herbe à une autre. Et parfois, il s'arrêtait, retournait au bosquet de fruits sauvages qu'il avait trouvé en arrivant, en mangeait deux trois et retournait grignoter de l'herbe.

22.
Sortant de la brume, comme une apparition divine ou maléfique, l'ibérique se dirige droit dans la direction du mâle, sans l'avoir encore remarqué pourtant.

Hönir, lui, continue son repas, calmement. S'il a déja repérée la jument ? Evidemment. En apparence détendu, l'isabelle est pourtant toujours aux aguets. Il ne bronche cependant pas, se contentant de relever la tête, pour observer de son œil valide, l'autre caché sous son épais toupet ébène.

Elle sent assez rapidement son odeur et incline la tête, cherchant des yeux l'inconnu. Entre alors dans son champ de vision un étalon à la robe dorée et aux crins aussi sombres que les siens. Un sourire se peint immédiatement sur les lèvres de l'andalouse. « Bonjour ! » lance-t-elle d'une voix assurée, en inclinant sa trajectoire vers lui.

Elle s'approche, en souriant. Sa robe de nacre brillant au soleil de midi malgré la brume persistante lui donne des airs de fantômes. Mais un bien joli fantôme. Esquissant un bref sourire à cette pensée, Hönir lui répond d'un signe de tête, assez bref. Bonjour. Une salutation claire et concise, comme il les aime.

Elle observe la robe de l'étalon, un peu fascinée. Un peu intimidée, aussi, peut-être. Son sourire ne s'est pas enfuit pourtant, loin de là. 22 l'observe, sans savoir si sa manière de regarder les gens les gênent ou pas. Personne ne lui en a encore fait la remarque, en tout cas. « Vous êtes nouveau ? »

La jument le regarde, le détaille même. Mais il a l'habitude. Tout le monde réagit ainsi lorsqu'ils le croisent. Avec la cicatrice dépassant de son toupet au niveau du chanfrein, la moitié de son visage caché et son corps emplis te blessures de guerre, qui passerait son chemin sans l'observer ? De ce fait, Hönir ne s'offusqua pas de se sentir reluqué. Et de nouveau, elle ouvrit la bouche. S'il était nouveau ? Amusé par la question, l'étalon réprima un rire, mais ne se retint pas de sourire. Pas vraiment. Je suis né sur l'ancien galop sauvage. Répondit-il, avant de pencher la tête vers elle. Elle semblait jeune. Très jeune même. Vous pas contre, l'êtes. Je me trompe ? Il se trompait, en effet. Car après trois années d'absence, tout le monde était nouveau ici.

Elle hoche la tête. Elle avait entendu parler de cette migration, de territoires où ils vivaient tous avant d'être contrains de partir. Elle sourit, à son tour. « Oui, vous vous trompez. Je suis arrivée ici alors que je n'étais qu'une pouliche. » Et même si elle reste encore jeune, 22 n'est plus une enfant.
Elle penche un peu la tête sur le côté. « Vous avez fait la migration, ou bien vous êtes revenu ? »

Le monde avait tourné, depuis qu'il était partit et galop sauvage ne l'avait pas attendu pour avancer. De ce fait, que la jument lui réponde qu'elle n'était pas si nouvelle que cela n'étonna même pas Hönir, qui hocha la tête en signe d'approbation. Se tromper était le lot de tout le monde et même lui n'échappait pas à la règle. Je suis partit peu avant la destruction des terres où je suis né. Répondit-il, se remémorant en même temps tout ce qui s'était passé peu avant qu'il ne décide de suivre ses parents ... sans pour autant arriver à les suivre. Aujourd'hui encore, l'étalon ne les avaient pas revus, malgré le fait qu'il les cherchaient activement. Toute ma famille ou presque se trouver ici, je pense être le dernier à revenir. Continua-t-il, pour introduire sa seconde question. D'ailleurs auriez-vous déjà croisé Chaodence et/ou Harmonie au détour d'un de vos voyage ici ? C'était beaucoup demander, certes. Mais si l'isabelle voulait revoir ses parents, il allait devoir se faire aider, vu la taille du pays et des terres le composant ...

La jument l'écoute attentivement, intéressée par l'histoire de l'étalon. Elle se laisse bercer par sa voix et par les mots de son récit, les oreilles toujours dressées vers lui. Un nom vient la tirer de son écoute passive. « Chao ? Oui j'ai... rencontré un étalon. Mais il s'appelait Chao, et pas Chaodence. » murmure-t-elle doucement, sceptique.

Ainsi donc, son père était bel et bien là. Mais visiblement, il devait avoir changé. Dans son souvenir, son père était quelqu'un d'unique. Chao est son surnom. Était-il pie ? Répondit Hönir, avec un petit sourire. Quelque chose avait du lui arriver et au fond de lui, l'étalon avait un mauvais pré-sentiment. Au fait, je suis Hönir. L'informa-t-il, avec un nouveau sourire.

Elle hoche doucement la tête. « Euh.. oui, je crois. » Plus elle essaie de se concentrer sur ce Chao, plus il lui échappe. C'est quelque chose d'étrange. Elle se souvient s'être échappée de la menace d'une tornade avec lui. Mais plus en détails..? « J'aime beaucoup votre nom. » murmure-t-elle avec un sourire charmeur, mais sincère. « On m'appelle 22. »

L'isabelle se sentait soulagé. Au moins, son père était rentré, en vie. Et c'était l'essentiel. Pointant les oreilles en avant lorsque la jument lui avoua aimer son prénom, Hönir lui offrit un sourire ravis. Merci. C'est lui qui me l'a donné. Avoua-t-il ensuite, sans cacher sa fierté. Autrefois, le mâle aurait tout fait pour cacher son appartenance - de près ou de loin - à la famille de Ramsès. Mais aujourd'hui, tout était différent. Puis, la demoiselle se présenta à son tour. 22 ? Ce n'est pas un nom, 22 ... Déplora-t-il, déçu qu'une aussi jolie jeune fille porte un chiffre en guise de nom ...

Elle sourit. Elle aussi, ce sont ses parents qui l'ont baptisée ainsi. « Quand on est la vingt-deuxième enfant de sa lignée, c'est plus simple de commencer à donner des chiffres pour appellation. Je trouve ça pratique, court et facile à retenir. » Elle n'a pourtant pas perdu son délicat sourire. « Mais vous pouvez m'appeler Titanium, si vous préférez. »

Il n'en revenait pas ... ses parents avaient conçus vingt-deux enfants ? Comment cela était-il possible ? Ne relevant cependant pas l'énormité de la chose - après tout, chacun avait ses raison pour agir de telle ou telle façon - l'isabelle mémorisa son second nom. Cela vous va à ravir . Lui confia-t-il, toujours en souriant. Oui, Hönir souriait beaucoup. Pour palier à la laideur de son visage mutilé.