As red as can be.

Leio lui, il ne trouve pas forcément ça marrant, mais peu importe. Il hausse les épaules avec un sourire pour paraître sympa, après tout, il ne veut pas se mêler de ce qui ne le regarde pas. Pas qu'il soit peureux, juste prudent ¬¬ Tu penses qu'on va arriver où, comme ça ? Il préfère changer de sujet.

Je perds un instant mon sourire. Apparemment, ça ne l'amuse pas des masses. C'est dommage. Enfin c'est pas grave, de toutes manières ce petit jeu ne regardait qu'Orion et moi. Je reprend mon sourire et glisse mes prunelles bleues dans les siennes. « Bonne question. Le seul moyen de savoir, c'est de continuer de marcher, non ? » je souffle, espiègle. Pourvu qu'il aime l'aventure, sinon, c'est foutu, les carottes sont cuites !

Mais l'aventure, ça, Leio aime, c'est sûr ! Peut-être même peut-il se montrer trop imprudent par moment. Il lui envoie un large sourire. Oui, tu as raison ! J'espère qu'il y a aura pleeeein de terres comme celle-ci

« Allons-y ! » je m'exclame avant d'attraper ses petits crins tout fins entre mes dents pour l'attirer vers moi. Puis je lui donne un coup de nez dans la ganache avant de prendre le trot. Partons à l'aventuuuure !

Il est un peu brusqué mais ça ne lui déplait pas. Enfin quelqu'un pour lui donner du punch ! Il sent qu'il va bien s'entendre avec cette petite palomino Il part alors à la suite d'Absinthe, gambadant du haut de ses petites jambes noires. Il la suit, se remettant à elle sans aucun soucis, comme s'il lui faisait déjà entièrement confiance.

Je sautille comme un petit faon à travers les coquelicots, Leio sur mes talons. Bientôt, le champ aux fleurs rouges cède sa place à la forêt et sa verdure. Je zigzague entre les arbres avec aisance, passant tantôt sous une branche basse et sautant tantôt au dessus un tronc couché. J'adore la forêt. Pour plusieurs raisons. Déjà pour son odeur boisée, tellement agréable à respirer. Pour le jeu de parcours qu'elle offre aussi. Et puis... je sais pas, ça m'attire, la forêt. De temps en temps, je jette un rapide coup d'œil par dessus mon épaule afin de vérifier que Leio suit toujours. « Aller Leio, plus vite, tu traînes ! » je lui crie, joueuse.

Il fait de son mieux ! Mais c'est vrai qu'il semble un peu moins adroit qu'elle, un peu plus prudent peut-être. Il décide de se lâcher pleinement, encouragé par les paroles de la pouliche. Il accélère, filant ventre à terre, jusqu'à même la dépasser ! Tout fier, il continue sa course à toute allure, esquivant les arbres, sautant par-dessus les troncs, virant pour éviter les rochers. L'herbe glisse sous ses sabots, et il sent rapidement une présence le rejoindre non loin de lui, parallèlement, sur sa droite. Croyant qu'il s'agit d'Absinthe, il lance, rieur : Allez, plus vite hein ! Parce que sinon... Il a tourné la tête vers elle mais ses yeux bleus ont cédé la place à des pupilles jaunes et noires. Ce n'est pas Absinthe.

Il me dépasse sans peine et je redouble alors d'efforts pour le suivre. Mes sabots glissent de temps en temps sur le sol humide de la forêt. J'accélère malgré tout. Ça fait déjà plusieurs minutes que j'ai perdu la croupe blanche de Leio de vue. Je l'appelle donc ; « LEEEEIIIIIO. » Mais il ne me répond pas. Je poursuis donc mon chemin sans cesser d'accélérer. Quand soudain... BAM. Quelque chose me percute brutalement et je vole quelques mètres plus loin contre un arbre. Outch, ça fait mal. Je commence à me redresser, avec peine. J'observe rapidement les environs. Peut-être que Leio qui m'avait fait la surprise de se cacher pour me sauter dessus lorsque j'arriverai ? « Leio ? » je demande alors en me remettant sur mes jambes. Et puisque je n'ai toujours pas de réponse, je reprends mon chemin mais un peu plus prudemment cette fois-ci. J'observe silencieusement les environs, cherchant mon ami. Et lorsque j'aperçois enfin sa silhouette traverser le bois à toute allure, je prends le galop pour le poursuivre et lui sauter dessus. « BAH LEIO, ATTEND MOIIIII ! » je m'époumone en essayant de le suivre jusqu'à ce que je repère non loin, sur notre droite, un bien curieux animal aux yeux d'or...

Il entend sa voix, lointaine. Combien d'avance a-t-il pris ? Pourquoi n'est-elle pas là, avec lui ? Peut-être que c'est mieux. Leio a accéléré, encore. Il ne savait pas qu'il pouvait aller si vite.
Il ne savait pas qu'il pouvait avoir si peur. Il a croisé le regard de la bête sans savoir ce qu'elle était. Seuls ses yeux dorés aux éclats meurtriers et alléchés l'ont dévoré jusqu'à l'âme. Il est naïf et enfantin, pourtant, il a vu au fond de ses pupilles qu'elle voulait le tuer. Le manger.
La voix d'Absinthe se rapproche. Non, va t'en ! Mais il ne peut pas crier. Il peut à peine respirer tant il galope vite. Il jette un regard affolé autour de lui, la bête a disparu. La peur le saisit de nouveau, plus coriace. Il ne sait même plus où elle est ! Soudainement, le sol s'arrache à ses sabots. Il a trébuché contre une racine, plus concentré sur la localisation de l'animal que sur son chemin. Il vole, et la chute est dure, au bout. Il s'écrase plus loin, glissant sur la mousse humide, avant de finir sa course contre un rocher.

Invité

Un instant captivée par la sublime couleur des iris qui me dévorent toute entière, je ralentis. Une goutte d'eau salvatrice me tombe finalement sur le bout du nez et je reprends mes esprits. Je quitte l'animal du regard et me concentre sur ma course. J'agrandis ma foulée et gagne en vitesse. Je l'entends gronder derrière moi et je sens la peur s'infiltrer en moi telle une maladie. Je tente de ne pas perdre Leio de vue. J'emprunte des chemins difficiles, où les passages sont serrés et le sol jonché de troncs, dans l'espoir vain de fatiguer le prédateur. Le sol est glissant et parfois je manque presque de tomber à la réception de mes sauts. La peur m'aide à repousser mes limites. Je ralentis légèrement lorsque je vois Leio tomber, piégé par une racine. Une petite voix m'ordonne de continuer de courir. Pourtant, je ne l'écoute pas et je le rejoint rapidement. Je me place devant lui, tout les muscles de mon petit corps contractés. Je couche mes oreilles sur ma nuque, mes iris bleus cherchant la bête. Je ne la laisserait pas nous manger sans me battre !

Il secoue la tête, tentant de reprendre ses esprits rapidement... mais tout bouge ! Le sol, le ciel, même les arbres se sont mis à marcher. Ça aurait pu être drôle mais Leio n'a pas oublié le danger qui fait cogner son coeur dans sa poitrine. Il hoquète et se relève, chancelant un peu, bousculant Absinthe qui s'est mise devant lui. Il faut y aller avant qu'elle revienne ! fait-il, cherchant la bête du regard, sachant très bien qu'elle est sûrement... déjà là.

Invité

Un immense sentiment de soulagement se déverse en moi lorsque je l'entends se relever derrière moi. Au moins, il n'était pas blessé. Ou du moins pas trop. Je sonde le paysage à la recherche des deux billes dorées mais je n'aperçois rien.
- Aller, on dégage d'ici en vitesse ! Je lui murmure à l'oreille en me glissant à travers les buissons.
Je m'élance ensuite au galop, en direction des immenses montagnes. Si on grimpe tout là-haut, nous serons en sécurité, non ?

Encore un peu sonné, Leio a du mal à suivre le rythme. Sa vue est trouble, il a l'impression de voir double. Pourtant, il garde le petit point doré que représente Absinthe comme un repère sûr et inconditionnel. Il se raccroche à sa présence et la suit, avant d'arriver aux pieds de la montagne. Il freine net, sa vue se focalise sur le sommet, si haut, tellement haut.. Je sais pas si je vais y arriver.. murmure-t-il d'une voix rendue aiguë par la panique.

Invité

Je m'arrête immédiatement et glisse mon regard sur lui. Qu'on pense y arriver ou non, on n'a pas le choix de toutes manières. Je le contourne donc pour me placer derrière lui et le pousser vers l'avant.
- Bien-sûr que si que tu vas y arriver ! Je l'encourage en le poussant un peu plus fort.
Ce n'était pas vraiment le moment idéal pour choisir de se laisser paralyser par la peur !

Mais la peur ne se contrôle pas, et Leio la découvre. Cette tenace sensation d'immobilité. Comme si ses veines s'étaient gelées. Il gémit, essaye mais échoue à chaque essai. À bout de souffle, ses petits sabots glissants toujours dans la terre, il tourne la tête... et il la voit. La bête arrive à grands pas, trottinant vers eux, comme si elle les savait bloqués. La peur, cette fois, se change en adrénaline. Vite, vite, viiiiite, elle est là ! crie-t-il comme un fou, avant de bondir si haut que cette fois, il atteint le palier au-dessus. Il tourne la tête, cherchant à voir si Absinthe suit.