the biggest splash

paissant dans les herbes hautes, les bovins aux statures impressionnantes font preuve d'un calme olympien. calme, siamún les observe, sans empêcher son corps de bouger, toujours traversé par des vagues impulsives qu'il ne peut contrôler. il n'avait pas vraiment peur de ces bêtes immenses, lui-même étant doté d'une morphologie exceptionnelle.

f Rapace aveugle et aveuglé. La clarté trop vive du jour. Ne distingue plus que ça - la lumière, celle éblouissante du soleil et celle, plus câline, de la lune. Depuis la perte progressive de son autre oeil, né borgne, Faucon découvre un échantillon encore plus large d'odeurs et de sons, comme si ses sens déjà surdéveloppés avaient pu encore piocher dans des ressources inestimées. L'odeur agressive des herbivores le fait ralentir, tandis que sa silhouette fine mais noueuse apparait sur la plaine.

d'un geste nerveux et mal maîtrisé, siamún tourne la tête à l'instant même où la silhouette brune apparaît dans la plaine. un large éclair pâle zèbre sa face, et le coeur de l'étalon bai se fige dans sa cage thoracique. un souvenir s'éveille dans les tréfonds de son cerveau et s'égare aussitôt, et aussitôt, siamún se met à ressentir divers sentiment envers le nouveau venu : bonheur, tristesse... qu'il ne comprends pas. ronflant bruyamment sans raison particulière, il en oublie momentanément la présence des bisons.

Au milieu des odeurs corsées des bêtes, le Rapace en détecte une qui ne leur appartient pas. Il ralentit légèrement, levant son visage blanc vers les alentours, sans pouvoir voir, seulement appréhender. Il attend là, se demandant si l'inconnu présent va se manifester et venir à lui, sans quoi il lui sera impossible, sûrement, d'aller vraiment à sa rencontre au milieu du troupeau. Croit en ses sens, Faucon, mais ne les a jamais surestimés pour autant.

la face blanche sur le visage de l'autre obsède siamún dont les émotions s'amplifient, l'incitant à piaffer de plus en plus énergiquement. il s'approche de quelque pas, ses yeux noirs captant enfin l'éclat pâle de ceux de son interlocuteur, et il accélère le pas en même temps que son coeur bat plus fort. sa démarche mal rythmée, passant du galop au pas, est si bruyante que le mâle dominant du troupeau de bisous interrompt son repas pour soulever sa tête massive, et se tourne curieusement vers cet étrange animal à la large stature.

Le fracas des sabots de l'inconnu étant si perceptible, Faucon en déduit qu'il est baraqué. Et qu'il se rapproche. Son odeur se fait plus précise, se détachant peu à peu de celle des bisons pour que le Rapace vienne l'inscrire dans un des nombreux tiroirs de ses méninges, classifiant chaque appartenance, chaque parfum, chaque identité. Quant à lui, il s'est immobilisé et laisse l'inconnu venir à lui, droit et fier comme un piquet.

plus il s'approche, plus le sentiment de familiarité se dissipe. l'inconnu est un étalon, dont les yeux clairs ne sont pas si bleus, mais plutôt de cette pâleur qui caractérisent ceux qui ne voient pas. comme si des nuages s'étaient fait prisonniers de son regard, songe brièvement siamún, sans ralentir son pas trébuchant. non pas qu'il soit maladroit - l'étalon sait parfaitement où il met les pieds, et ne tombe jamais. ce sont juste ses membres trop larges qui se cognent entre eux, depuis toujours. finalement, l'étalon bai s'arrête - un peu trop près, comme souvent - de son interlocuteur, tandis qu'un sourire étrange se dessine sur ses lèvres. des pensées malveillantes pullulent dans son esprit, se chevauchant comme mille cabris, avant de disparaître aussitôt. il s'ébroue rapidement. bonsoi...salut. dit-il d'une voix assez basse, insistant sur le "s" de ses mots.

Le bruit de pas s'intensifie. Immobile, le rapace étend ses sens à leur apogée. Son ouïe surdéveloppée discerne parfaitement chaque pas d'une cadence étrange. Ses naseaux dilatés captent l'odeur entêtante de l'inconnu. Il devine sa proximité bien trop engagée mais pourtant, Faucon ne recule pas d'un seul centimètre, parfaitement stoïque, comme absent. Il a toujours été ainsi. Comme impassible à tout évènement extérieur comme intérieur. Sa voix a une consonnance que le mâle trouve singulière. Etrangère ? Bonjour, répond-il simplement, d'une voix froide et posée. Vous êtes ? Il tourne sa tête vers lui, approximativement.

là, répondit l'étalon, toujours très premier degré. (pardon mais ça me fait bcp rire ). il observe l'étalon, sa silhouette sèche, ses muscles pincés sous sa peau brune. et ses yeux. siamún y plonge, se laissant engloutir dans leur intensité nacrée, tandis que sa bouche se crispe d'une envie qu'il ne n'identifie pas tout de suite. et puis... que faire si je te fais mal ? demande-t-il soudain, d'un ton si décalé qu'on ne saurait dire s'il relève d'une agressivité froide ou d'une curiosité mal dissimulée. peu importe si ses mots ne s'alignent pas sur le sens qu'il voudrait leur donner.

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