I heard it through the grapevine (A)

Le vent ébouriffait sa crinière, et lui apportait l'écho lointain des problèmes à venir. Stoïque, immobile face aux terres du Nord, Avalon était plongée dans ses pensées.  

Il était revenu, et avait reprit son poste de Sentinelle. Il guettait le moindre désaccord de la nature, le moindre défaut. Les protéger. C'est ce qu'il lui avait dit. Il n'avait d'ailleurs pas encore remarqué Avalon, mais cela ne saurait tarder. Le picoté, marchait, d'un calme irréprochable.

Elle n'avait pas non plus cherché à le trouver. Elle était encore plongée dans le puzzle de ses pensées. Mais c'était comme si inconsciemment, elle attendait le moindre signe de sa présence. L'odeur de son ami -elle n'arrivait même plus à le considérer comme tel, en fait- emplit ses naseaux, et elle se retourna. -Tu es de retour. Constata -t- elle froidement.

Il va dire une connerie, et puis, elle sait. Il se justifiera parce qu'il ne sait faire que cela. Il n'est bon qu'à trouver des excuses, et reprocher. La... il déglutit un peu et tourne son regard vers l'horizon chaleur du désert t'as échappée on dirait. Tu te caméléonnes bien en ces terres j'ai l'impression. la Sentinelle picoté la regarde à nouveau, mi-défiant, mi-arrogant et mi-excusant.

Ses paroles agressèrent ses oreilles, et elle les enfouit dans son épaisse crinière. En fait, elle se sentait agressée par sa présence toute entière, comme s'il la narguait rien que par son retour. -Dommage, je ne peux pas en dire autant pour toi. Cracha -t- elle. Elle avait pardonné à Absalom, parce qu'il lui avait prouvé qu'il l'aimait, qu'il était passé à autre chose après cette aventure. Mais lui ? Il était au courant de leur union, et il n'avait rien fait pour que cela n'arrive pas. -Qu'est-ce que tu fous ici ? Tu viens à nouveau foutre en l'air ma famille ?

Donc elle savait. Et puis, il savait qu'elle savait. Non. Je, enfin, on s'est envoyés en l'air. plante t-il, comme un stalactite qui vient de tomber du haut. Froid et tranchant. T'es pas à plaindre, Avalon. Il t'aime, vous avez pleins d'enfants, et vous filez une bonne vie. C'est plutôt moi, je l'aime, mais il est avec toi. il choisit ses mots, et pour cause: il ne dit pas je l'aime, mais pas lui. il dit juste mais il est avec toi.

Un sourd grondement parcourut sa gorge. -Merci, je suis pas encore assez débile pour croire que tu l'as forcé. Vous étiez deux dans l'histoire. Rétorqua -t- elle. Elle lui en voulait d'avoir fait ça. Mais elle le détestait juste parce qu'il était revenu. -Mais oui, attribues-toi le beau rôle, je ne vais rien dire... Gronda -t- elle. La colère formait un nœud dans sa gorge. Et il continua son discours. Piètres explications. -Arrête, mais arrête ! On était déjà ensemble avant ça, tu le savais, je te l'avais dit. Bordel, j'étais pleine de jumelles, et toi, alors que tu m'avais dit que tu t'effacerai... Tu t'es octroyé tout seul le droit de tout remettre en cause. Je ne suis pas à plaindre, peut-être. Mais à cause de toi j'ai failli le perdre. C'est con, mais s'il t'aimait, il t'aurais suivi, non ? Il ne t'aurait pas laissé partir, il ne serait pas revenu vers moi, en me suppliant de lui laisser une seconde chance... C'était méchant. Mais qu'est-ce que ça faisait du bien...

Il avance, en grondant. Il claque simultanément la mâchoire et le sabot.J'ai pensé à vous, dans l'après. Je savais que lui et moi, ça ne serait que d'un jour, enfin pour lui. Je lui ai dit que je partirai. Et tu sais quoi? Il m'a supplié de revenir, une fois que j'aurais fais mon parcours. J'ai tenu ma promesse. il se recula, dégageant sa crinière. Je vais te dire un truc, parce que tu restes une amie. Je, on a fait ce qu'on a fait, parce que, je ne suis pas à ma place partout, nulle part. J'ai fait, enfin, j'ai essayé de faire l'amour avec Iwa, avec Luciole. Rien, ça n'a aboutit à rien. Et mes sentiments grandissaient pour Absalom. J'ai cru que ma place était là, sous le ventre d'un étalon finalement. Alors oui je suis gay, tu peux me traiter, te moquer de ce que j'ai vécu. Et je suis désolé d'aimer. ce qui ne m'appartient pas, ce qui ne m'appartiendra jamais.

A l'entendre, elle croyait halluciner. Dans l'après ? C'était gonflé de lui dire ça. Quand il lui parla des supplications de son compagnon, elle ferma les yeux. Elle préférait se voiler la face, se dire que pour Absalom il n'y avait plus de sentiments, plutôt que de douter, de le laisser s'insinuer dans cet équilibre précaire. Et au final, les larmes qu'elle n'avait jamais versées montèrent, ourlèrent ses yeux noisettes d'une mare de désespoir. -Mais t'avais pas le droit ! T'avais pas le droit de te mettre entre nous ! Gémit-elle en reculant d'un pas. Encore une fois, elle était faible. Encore une fois, elle n'arrivait pas à tenir tête, à rester fâchée parce qu'elle était trop attachée à lui en tant qu'ami. Comme à Absalom. -Et je me moques pas de ta sexualité. Jamais. T'as encore moins le droit de sous-entendre le contraire.

Eh! il la voyait tanguer de plus en plus vers la faiblesse. C'était bien Avalon, ça, la submersion des émotions. Il t'aime! C'est juste... qu'il m'aime, à sa façon. C'est différent de toi. Je ne suis pas en couple avec lui, c'est bien toi. Et je m'excuse de, d'avoir piétiné votre chemin vers le bonheur. et puis, lui non plus, il n'était pas invincible, et il replongeait vers son côté de gentil en s'excusant.

C'était bizarre, de les voir se radoucir l'un comme l'autre. Mais au fond, ils en souffraient tous de cette histoire, personne n'était vraiment gagnant. -Oui mais... Je, je suis égoïste, je veux pas qu'il aime quelqu'un d'autre, il est mon pilier, tu vois ? On a notre famille maintenant, et je crois que c'est mon seul repère. Alors je sais pas si j'arriverais à te pardonner vraiment un jour. Elle renifla, de manière disgracieuse au passage. -Mais j'arrive pas à rester en colère contre toi, parce que la colère ça me ressemble pas, et j'arrive pas à faire une croix sur notre amitié... Mais tout va de travers tu vois, Nox a quitté le Nord, Murphy devient fou, et mes filles n'ont plus besoin de moi, et j'arrive plus, tu vois... Sa voix était pressée, domptée par l'urgence de tout déballer, parce qu'avec tout ça, la petite, la faible Avalon, elle craquait.

Ça va trop vite et tu comprends pas... je vois ce que tu veux dire. tout s'enchaîne, et quand on est un peu déboussolé, ça devient vite compliqué. Au fait, j'ai revu Muprhy, et, il déraille complètement. Il m'a dit de vous protéger, je comprends pas vraiment comment.

Avalon releva un regard larmoyant vers l'apaloosa. -Mais qu'est-ce qui va trop vite ? Qu'est-ce que je ne comprends pas ? Elle paniquait, remettait tout en question. -Ouais, il déraille... On voit que t'as pas été là ces dernières années. Asséna -t- elle. Etait-ce des reproches mal déguisés ? Sans doute. -Il se croit fou, il perd le contrôle.