la nuit du feu

Il entend les éclats de voix de Phoenix se répercuter avec violence contre la pierre de la pyramide pour venir jusqu'à lui, pour venir lui claquer aux oreilles avec une distinction troublante, comme si elle lui hurlait dessus ici même. Il ferme les yeux et grince des dents, mais s'entête à rester encore un peu à l'extérieur. Il est trop instable, il l'est toujours, mais si sa haine et sa peur se mêlent à celles de Phoenix, il n'était pas certains qu'ils en ressortent indemnes, ni les personnes présentes. Mais il l'entend s'en prendre à Enja et son cœur se serre. Merde. L'air frais de la nuit passe sur son visage, et rien que cette caresse est douloureuse, ses plaies, nombreuses et profondes, savent rappeler leurs existences de manière piquante. L'appaloosa rouvre les yeux et pivote, tant bien que mal, reprenant le chemin de la pièce principale, où il entend bien des choses en cours de route.
J'attendrai pas bien longtemps avant d'aller la chercher moi-même, quitte à échanger ma place avec elle. Il plaque ses oreilles contre sa nuque. Hors de question putain, elle déconne ou quoi ? Sa raison se heurte pourtant à son cœur. Comment pourrait-il interdire à une mère de vouloir sauver son enfant ? Si il était à la place de Phoenix, il massacrerait quiconque l'empêcherait de récupérer sa fille. Et ce désir, il le ravage d'ailleurs en cet instant même. Il en voulait à Hekâ, s'en voulait à lui même, au fils de l'autre pute aussi. Alors … Pouvait-il réellement laisser Phoenix à l'écart ? Le voulait-il vraiment aussi ?
Ils nous ont déclaré la guerre alors ils goûteront à la défaite. C'est le genre de phrase qui éveille en temps normal sa flamme guerriere et destructrice. Mais depuis quelques temps, ils avaient tant perdu. N'est ce pas eux qui goutaient à la défaite ? Pourquoi ? Comment bordel ? Il était temps que ça change, et qu'effectivement, cette putain de guerre ils la gagnent. Il a mal, terriblement mal, de la capture d'Aulia, mais il s'en nourrirait pour les évènements à venir, aussi sombres soient-ils.
Bryséis prend la parole, mêle les jeunes aux conflits, les implique, les motive, les guide. En soit, ce n'est pas une mauvaise chose, il la soutiendrait même si ils avaient pas déjà pris sa fille. Et si c'était au tour d'Azsio ? Azara ? Nour ? Thyl ? Merde, ça le fait trébucher et il se ratrappe difficilement à une paoie, y laissant une trainée de sang. Un peu plus un peu moins … Il les entend, les jeunes, motivés. Enfin, il entend surtout les grandes gueules des jumeaux. Et malgré tout ce bordel, cela parvient à lui tirer un sourire. Mais Nour ? Il a du mal à l'imaginer suivre ces deux têtes brûlées, ou bien n'a t-il pas envie de l'imaginer ? Il se dit que c'est parce qu'il ne la connait pas encore assez bien pour savoir de quoi elle est capable mais au fond de lui … Peut être est ce plutôt son côté paternel qui lui souffle qu'il y a déjà laissé une fille, alors deux … Et puis Thyl. C'est un amas de naïveté et de douceur, ils peuvent pas le laisser se jeter dans la gueule du loup, si les autres se débrouilleront surement, il doutait forcément que ça soit le cas pour lui.
Il n'est plus très loin. La voix de Gryffon retentit. Oh putain. Il s'arrête, adosse un instant son épaule au mur. Il est ici ? Il est revenu ? Si Boréale était avec eux, je peux tenter de la raisonner. Je sais qu'elle m'écoutera même si elle ne me donnera peut-être pas ce que je veux. Cela lui fait une sensation étrange, mêlant l'émotion de revoir son fils et celle de dire : putain quoi ? D'où il connait Boréale ? D'où il est assez proche d'elle pour dire qu'il peut la convaincre de leur rendre Aulia ? C'est quoi ce bordel encore ? Il calme sa respiration, se redresse tant bien que mal, et au bout de quelques instants, réapparait enfin dans la grande pièce.

Il pose d'abord son regard sur Phoenix, qui semble s'être calmée, un peu. Silencieusement, il s'excuse. D'être parti après avoir balancé la bombe concernant Aulia, de ne pas l'avoir ramené avec lui, de ne pas l'avoir protégé comme il aurait du le faire. Enfaite, il préfèrerait être mort qu'ici, davoir tenté le tout pour le tout pour elle. Il l'avait déjà fait par le passé, pour Phoenix et Enja, et il s'en voulait d'être ici, et pas Aulia, sans avoir lutté jusqu'à ce que la vie soit sur le point de le quitter, la seule chose qui aurait pu, aurait du, le faire abandonner. Hook finit par détourner le regard, car c'est un peu difficile en réalité de le soutenir. Il ne dit rien lorsqu'elle dit vouloir participer à libération d'Aulia, ne la contredit pas, fait taire son impulsif désir de protection, se contente de grimacer. Il la laisse réprimander Gryffon, en espérant que cela suffise à leur tête de mule de fils.
Et puis cette voix.. Comme sortie d'outre tombe. Vicieuse, caverneuse. Bien qu'elle s'adresse à Enja, qu'elle cherche à la blesser, elle vise tout autant X, l'humiliant devant tout le monde. Il tourne brusquement le visage vers le pie, qu'il voit se tendre. Il se détache de Thyl, qui semble vraiment pas très bien, et commence à avancer en direction de la cellule, en direction d'Enja et Nyveèn. X ! DEHORS ! aboie t-il brusquement, bien que ça lui en fasse mal à la mâchoire. Il l'avait déjà contraint à leur montrer son autre personnalité, et il avait pas vraiment envie qu'il fasse une nouvelle fois surface, encore moins aujourd'hui. Heureusement, contrairement à d'autres, Xander est de nature docile. Il s'immobilise, semble lutter quelques instants et finit par faire demi tour et sortir. Il lance au passage un regard équivoque à son père, qui soutient ce dit regard mais qui ne l'empêche pas de lui serrer une nouvelle fois le cœur. Il lui en veut, de l'avoir ramener, elle, ici.
Avant qu'il n'ait eut le temps de dire ouf, Azsio se précipite, sort des conneries plus grosses que lui, et Gryffon en rajoute une couche en prenant la défense de Boréale et d'Horus. Il a l'impression d'avoir basculé dans une autre dimension. Il avait réussi à tempérer sa hargne, mais elle bouillonne de nouveau, échappe à son contrôle. Ses dents se dévoilent, ses lèvres se retroussent et un grondement sourd lui échappe. Il avance en direction de la cellule, où se trouve encore Enja et les deux mâles. Il glisse un regard sur Asmund. Ils allaient devoir renvoyer Nyveèn au pays des cauchemars avant qu'elle ne foutte encore plus le bordel. Tu n'as pas à t'infliger ça, ni à supporter ça. Allez prendre l'air vous aussi, toi et Thyl. souffle t-il à Enja, avec une douceur qu'on a du mal parfois à lui accorder, surtout quand on voit sa tête en ce moment même. Puis il avance jusqu'à la cellule de l'akhal, lentement, tel un prédateur. Quant à toi, ton fils nous a dit de te rendre en vie, mais sans mentionner dans quel état. Ferme bien ta gueule si tu veux pas qu'on t'arrache les yeux et la langue. siffle t-il entre ses dents, ayant du mal à déverrouiller sa mâchoire tant il contient sa haine et sa rage.
Il se dresse entre Azsio et Gryffon, avant de tourner l'encolure et le visage vers son neveu, plonge un regard ardent dans le sien, qui brûle pourtant d'un feu glacial. Qu'est ce que tu racontes putain …  siffle t-il. Hooker était une guerrier sanguinaire, un meurtrier, et pourtant, le viol … Non, il y avait certainement chose qui n'était pas tolérable. Autant il n'avait aucune pitié pour Nyveèn, autant il n'applaudissait pas du tout X, même si il ne parvenait pas pour autant à le blamer à cause de ce truc qu'il avait dans la tête. Et … Il restait son fils. Toute cette merde était déjà assez dérangeante, y avait pas besoin d'en rajouter une couche. Il tourne ensuite le visage vers Gryffon, le toise un instant. Et toi aussi, qu'est ce que tu racontes bordel ! Hooker a envie de prendre leur deux sales têtes de merdeux et les fracasser l'une contre l'autre. Le viol ... souffle t-il en direction d'Azsio, déçu. Faire la morale alors que t'es mal placé pour le faire et défendre les deux personnes qui viennent d'enlever ta sœur. continue t-il cette fois en direction de Gryffon, avec la même déception. Il se tait brusquement, bouillonne, bouillonne … Mais putain ! Vous avez les couilles qui vous chatouillent le cerveau ?! Cassez vous de là avant d'ouvrir une nouvelle fois la bouche pour dire de la merde sinon j'éclate vos deux têtes l'une contre l'autre. assène t-il, implacable, avant de leur désigner de rejoindre la pièce principale d'un signe sec de la tête.

Voir Bryséis hocher de la tête la surprit. Elle ne s'attendait pas à ce qu'elle soit d'accord avec son souhait de participer au sauvetage de sa fille. On lui avait si souvent dit d'attendre patiemment au camp, en sécurité, qu'elle s'attendait à devoir batailler un peu pour se faire entendre, ayant déjà quelques arguments en tête qu'elle se préparait à réciter. Pourtant, on dirait bien qu'elle n'en avait pas vraiment besoin.
Son regard inquiet se posa sur Nour dès qu'elle entendit que les jeunes seraient impliqués. Elle savait que ce serait un bon entraînement, mais elle avait peur pour eux tous. Parce que ce n'était pas qu'un entraînement, justement. C'était quelque chose de plus sérieux. Mais bon, même si elle veillerait à s'assurer qu'aucun d'eux ne soit mis en danger, elle devait faire confiance aux Tsoldurs. Elle savait qu'ils ne les mettraient pas consciemment en danger.
Phoenix se perdit dans ses pensées pendant un bon moment, se déconnectant de la réalité, manquant une bonne partie de la conversation et ne pensant qu'à Aulia et à la façon dont ils devront la sortir de là. Merde, ils allaient faire quoi en fait ? Il fallait qu'il la récupère, ce n'était même pas discutable. Et vite, avant qu'Horus ne lui fasse du mal. Pour le moment, il disait ne pas la toucher, mais qu'adviendrait-il quand il se rendrait compte que Nyveèn ne reviendrait toujours pas, pas dès le lendemain matin du moins ? Il allait peut-être perdre patience. Elle sentit une bonne bouffée d'angoisse monter dans sa gorge qui se serra, ayant l'impression d'étouffer.
L'alezane reprit ses esprits en entendant Enja intervenir, bientôt suivie d'Aszio. Si cette pétasse d'araignée osait toucher à ne serait-ce qu'un crin d'un autre de ses enfants et de ses proches en général, elle... elle ne savait pas ce qu'elle serait capable de lui faire, une fois la colère bien montée. Elle n'avait jamais été violente, pourtant, cette situation la touchait plus que jamais, la changeait un peu aussi. Gryffon qui s'en mêla lui fit tourner le regard vers lui, ses oreilles se plaqua dans un premier geste sur sa nuque. Pour qui il se prenait, de réprimander Aszio comme ça ? Il était en colère, comme eux tous. Ses propos n'étaient pas corrects, pas du tout même, le viol étant un sujet sensible à ses yeux, mais ceux de son fils ne l'étaient pas non plus, de par la façon dont il défendait Horus et Boréale. Putain, ils lui avaient pris sa fille ! Son enfant, son bébé ! Elle ne pourra jamais le leur pardonner. JAMAIS !
L'arrivée de l'appaloosa, ou plutôt son retour, était en un timing parfait. Si son coeur se serra légèrement lorsqu'elle croisa son regard, parce qu'elle savait pertinemment qu'ils partageaient la même souffrance, la même rage, la même peur, elle était un peu tout de même soulagée qu'il vienne intervenir auprès des jeunes mâles. Elle n'avait tellement pas la force de s'affronter à eux, comme vidée d'énergie tout d'un coup. L'autorité de Hooker l'aurait normalement fait sourire en voyant comment il gérait les situations à sa manière bien à lui, mais elle ne bougea pas, observant Gryffon en silence. Lentement, elle vint se placer aux côtés de l'appaloosa pour planter son regard dans ceux des jeunes mâles pour appuyer les propos de l'étalon. Ses yeux s'attardèrent plus longtemps sur son fils, qu'elle regarda un instant avant de secouer la tête, faisant non d'un geste lent, comme pour lui intimer de ne pas rouspéter, de ne pas argumenter. Elle savait qu'il en serait parfaitement capable, mais même lui devrait savoir que c'était loin d'être le moment de se rebeller. S'il voulait se faire traiter comme un adulte, alors qu'il commence à se comporter ainsi.
Cette fois, à son tour d'aller prendre un peu l'air, de s'isoler un petit moment. Elle avait besoin d'eux tous, mais elle avait besoin de s'entendre penser, un petit instant. Elle avait envie de pouvoir gérer sa peine elle-même, de se faire à l'idée que sa fille ne rentrerait pas au camp ce soir. Phoenix s'éclipsa de la salle principale, passant devant Enja. Elle s'arrêta, un petit sourire désolé aux lèvres. Elle s'en voulait d'avoir été sèche avec elle, sa colère et sa peine ayant pris le contrôle de ses paroles. Elle effleura son visage d'ange, comme pour se faire pardonner, avant de marcher vers une pièce plus isolée de la pyramide, là où elle stockait des remèdes. Là, elle savait qu'elle aurait droit au silence.
La fraîcheur de la pièce était bien la dernière de sa priorité. Elle soupira longuement, soufflant ses émotions pour les extérioriser. Ses pensées allaient à tout ce qu'ils avaient perdu au cours des derniers temps. Gaya. Lov. Et maintenant Aulia qui était loin d'eux. En sécurité peut-être mais tellement loin d'eux que c'en était insupportable, comme s'il lui manquait une partie d'elle-même. Et tranquillement, alors qu'elle laissait tomber sa barrière de colère, cette carapace qui était sensée lui apporter de la force, le corps de Phoenix se mit à trembler en raison des sanglots qui la secouaient et les larmes se mirent à courir le long de ses joues, brûlantes comme le feu qui l'animait. Seule dans un recoin de la grande pyramide, le son de ses pleurs mourraient dans la noirceur.

OUT

(je pense que c'est une bonne réponse pour clôturer le sujet, sauf si quelqu'un a encore quelque chose à dire, je déplace aux archives )