~ dead&gone

les reflets de l'automne avaient posé leur empreinte orangée sur les chemins escarpés depuis un moment. mais ce n'était que sous les lueurs du soleil couchant que l'endroit libérait ses traits les plus intimes, les plus fascinants. depuis cette stupeur de doré, Haiden était immobile, admiratif et fasciné jusqu'au transport. situé à mi-chemin entre le sommet et la base des chemins, l'étalon avait une vue incomparable sur galop sauvage, et sous cette lumière céleste, rien ne lui semblait pouvoir être plus beau.

toujours transpercé par le spectacle époustouflant, le blond ne releva pas son regard tendrement ambré. ses sens en éveil, il détecta néanmoins une odeur particulièrement douce et fruité dans l'air : le parfum singulier d'une jument. un sentiment endolori le parcourut, mais Haiden choisit de rester immobile et silencieux encore un peu, en attendant la fin du spectacle.

il était trop éloigné par rapport à elle pour l'entendre soupirer, et même renâcler. mais il le devinait. pas exactement, mais il s'amusait en ce moment même a s'imaginer tous les sons qu'elle produisait, le son de sa voix, la mélodie berçante de sa respiration. ces rêveries le ramenèrent à cette même vision qui le hantait toujours autant. Elle. se secouant, Haiden soupira à son tour. quand est-ce qu'elle arrêterait de le torturer ? subitement, sa concentration sur le ciel illuminé redoubla en force.

il demeura silencieux pendant un moment, puis un bruit derriere lui le fit se tourner. la jument, dont il pouvait admirer la robe brune à présent, s'était avancée vers le précipice, délogeant quelques cailloux, qui, en tombant, avaient rappelé le blond de ses songes. il releva son regard ambré vers le sien, profond et sombre, et la toisa pendant un instant, avant de s'éclaircir la gorge et de lancer doucement de sa voix rauque : “ êtes-vous suicidaire mademoiselle ? „

Haiden n’était pas superman, il n'allait pas la sauver. mais il avait le pouvoir des mots, et avait pris la fâcheuse habitude de les peser jusqu'à l’épuisement, trouvant ainsi la parfaite chose à dire. ici, peut-être qu'elle aurait aimé qu'il lui dise que tout irait bien, que la vie était belle. Haiden n'allait pas le faire, pour la simple raison qu'il n'aimait pas mentir, pas sur ça, du moins. et puis, d'ailleurs, pourquoi devrait-il la sauver ? qu'elle se tue, si elle le voulait, qu'elle vive ou qu'elle meurt, Haiden dormirait pareil ce soir : mal, comme depuis toujours. il releva paresseusement les yeux sur elle, et remarqua qu'elle s’était de nouveau rapprochée du vide. sotte. “ pourquoi ? „ son mot trancha le silence, ricochet contre les parois de la montagne, et l'alezan apprécia le faible écho qui résonna dans sa tête pendant un instant, avant de s'envoler a son tour.

il rit de bon coeur. “ vous allez essayer de me faire croire qu'en vous levant ce matin, vous avez simplement pris la résolution de vous tuer cette après-midi, sur un coup de tête ? „ il savait ce que c'était, de vouloir tout arrêter, de vouloir fuir là ou rien ni personne ne pourrait vous trouver, être lâche. car le suicide, c’était cela, être lâche et égoïste. on prenait la porte facile, sans penser a ceux qui nous entourent, ceux qui nous aiment vraiment. Haiden était lâche, mais pas égoïste. mais au fond de lui, il se disait que peut-être, ses motivations pour rester en vie étaient minces, et un peu naïves: il espérait qu'un jour, Elle changerait d'avis, et reviendrait, et qu'il aurait enfin quelqu'un qui tiendrait réellement a elle. la partie gauche de son cerveau éclata de rire a cette pensée, et Haiden soupira, en réalisant l’impossibilité de cette situation. il fallait se rendre a l’évidence : Elle ne reviendrait pas, et ne l'aimerait jamais, ne l'avait jamais aimé. sa lèvre inférieure tremblota, et il se reprit, se rapprochant du bord pour la simple vue, se concentrant sur la jument qui respirait dans son dos.

il prit soin d'ignorer sa question, et toussota simplement lorsqu'elle l'interrogea. puis, il tourna la tête, la regardant pour la première fois, lui adressant un petit sourire de complicité. “ mademoiselle n'est plus suicidaire ? „

il sourit discrètement puis fit demi-tour, retraçant ses pas, jusqu'à escalader jusqu'à l'endroit ou était posée la jument chocolatée. le blond s'immobilisa a ses cotés, son regard ambre se perdant dans l'horizon. “ Haiden. „ murmura-t-il discrètement.