‹ nothing left to say ›

Son premier baiser. Le Lion tressaille de tout son long, sentant se réveiller en lui un animal qu'il ne connait pas encore : celui du mâle. Il ne sait pas comment réagir, la tête lui tourne, il se sent piétiner le sol sans savoir dans quelle direction aller. Puis d'un seul coup, il brise le cercle qu'elle a instauré autour de lui et lui coupe la route, confrontant son poitrail massif au sien, plus fin. Il la frôle, son encolure s'étendant, venant souffler une caresse chaude et tentatrice sur son encolure, jusqu'à son garrot. Ses antérieurs piaffent toujours, sans pouvoir se contrôler réellement, masquer cet émoi et ce désir qui grimpent en lui comme des alpinistes effrontés.

Et la machine est repartie. Comme une partie inarrêtable, comme un train lancé à toute allure sans que quoi que ce soit ne puisse le ralentir, la belle lui échappe, de nouveau. Oroszlàn se laisse griser par cette frustration excitante de ne rien contrôler.
Ni elle, encore moins lui. L'odeur qu'elle dégage le rend fou, peu à peu, faisant ressortir ce côté lion qui sommeille en lui et que, pour le moment, seul son nom a vu faire dégager. Alors, il brise le cercle, il sort, inverse les rôles. Le doré lui coupe la route en la frôlant, caressant au passage ses flancs de ses lèvres et dents malignes. Il la piège à son propre jeu, entreprend des cercles dont elle est la cible cette fois-ci.

Le Lion ne voit plus que ça devant lui : le jeu. Aucune limite, aucune barrière ne semble pouvoir l(es)'arrêter. Il ne dit rien, ce qui le rend encore plus ténébreux. Ses cercles se resserrent, à tel point que leurs flancs ne se détachent plus vraiment. Le doré vient effleurer sa croupe de son encolure, puis de ses naseaux, s'enivrant de son odeur, et de cette excitation tentatrice. Mais il continue ses cercles, sans s'arrêter.

Mais il décide d'inverser le jeu, les rôles, les positions. Alors qu'elle s'enfuit, s'attendant très certainement à ce qu'il lui court après comme un imbécile, il décide de lui montrer qu'il n'est pas son jouet. Son corps bouillonnant s'immobilise et il reste là, immobile, la respiration un peu altérée, à la suivre des yeux en attendant qu'elle se rende compte qu'elle part seule.

Oroszlàn sourit en coin, lui aussi. Si elle s'en va, elle met fin au jeu elle-même qu'elle a commencé. Bien sûr que ça déçoit l'étalon, mais il ne va pas en crever pour autant. Elle tourne les talons et il en profite pour rajouter : « Si je joue avec toi exactement de la même façon qu'ils ont tous joué avec toi, ça n'a aucun intérêt. »

Il la regarde fixement, d'un de ces regards intenses qu'on garde en mémoire. Il est très calme, et un sourire orne ses lèvres à lui aussi. « Vous avez l'air bien trop experte pour que ça soit la première fois. » lui lance-t-il avec provocation, sans bouger alors qu'elle se rapproche.

Oroszlàn serre les dents doucement, parce qu'il n'est pas aisé de lui résister, il doit bien l'avouer. Il se grandit, la dominant d'une bonne tête. Il s'avance vers elle aussi, son poitrail cognant légèrement contre le sien et son regard dévorant posé dans les yeux plein de malice de la jument. « Vous êtes très douée, alors. »