,, entrave.

▲ J'ai de la famille ici Aenor, je dois les faire sortir. Soupire-t-il. Même s'il devait, lui, sacrifier sa vie.

Elle sent son coeur s'étreindre un peu. Elle n'a pas de famille, elle. « Je veux t'aider. »

▲ Aenor, son amie, sa complice de toujours, le rejoint une fois de plus au front. Et qu'il est fier d'elle ! Mais il hésite. Elle est un peu de sa famille aussi.
Chao hoche finalement la tête. Il acquiesce, car le but est qu'ils s'en sortent tous. Ce n'est pas une mission suicide, à la base. D'accord. Tu es ici depuis peu, mais, quand tu sortiras, tu verras un grand carré de sable. Là, ils attachent des choses aux sauvages et montent dessus pour les dominer. Quand ils nous infligeront ce sort, nous devrons nous arranger pour les déloger et...tu as des idées pour la suite ?

Aenor considère aussi Chao comme sa famille. Un confident, un ami proche, un pilier de sa vie ici. Il en existe si peu, pour la princesse du désert. Elle hoche la tête, l'écoutant attentivement sans pouvoir s'empêcher de tressaillir lorsqu'il décrit les scènes qu'ils s'apprêtent à vivre. Quelqu'un sur son dos ? Quelle idée ! Elle se focalise sur l'idée qu'il s'agit là d'une mission.
D'une bonne action.
Peut-être la dernière.
« Et... ensuite, on les fait tourner en bourrique. Tu crois qu'on peut sauter par-dessus l'enclos de ce carré de sable ? Si on y arrive, ils ne s'y attendront pas, et on pourrait aller délivrer les autres. » Comment, ça, elle n'en sait toujours rien.

▲ Sauf qu'ils n'ont aucune idée des complications. Ils sont pionniers, et naïfs. Ils semblent ignorer que les hommes leurs tireront dessus dès qu'ils les auront désarçonné. Les chevaux calmes sont débourrés calmement. Les chevaux rebelles, eux, doivent subir le rodéo jusqu'à la soumission - ou la victoire, très rare. Nous sommes encore en forme. Oui, je pense que c'est possible. Il faudra saisir le bon moment. Je pense qu'un de nous devrait faire diversion, et l'autre ouvrira les box. Une montée d'adrénaline fait frémir Chao, qui se met à piaffer dans son box.

> on fait tout ça dans la suite du top et on déplace juste le sujet ?

On peut juste déplacer je pense, si ça te va ?

Les yeux de la princesse se mettent à briller intensément, soudain. « Je peux les distraire un moment pendant que tu ouvres les portes ! » s'exclame-t-elle, tout l'espoir retrouvé lui redonnant entrain et énergie.

▲ D'accord ! Il faudra saisir l'occasion. On ne sait pas encore ce qu'ils nous préparent... Il hoche la tête, puis mâche une bouchée de foin insipide. Mangeons un peu, reposons-nous. On ne sait pas quand ils viendront et nous devront nous tenir prêts.

Elle hoche la tête plusieurs fois, avant d'observer autour d'elle. Elle se laisse attirer par un tas de foin qu'elle renifle, le trouvant finalement assez appétissant pour être englouti comme de l'herbe. Elle ne peut pas s'empêcher de penser à leur évasion, qui va être parfaite.
Elle ne peut pas s'empêcher de penser à leur suicide, qui va être royal.

▲ Après avoir cassé la croûte un moment, Chao fini par s'assoupir. Pendant quelques heures ? Quelques jours ?

Il n'en savait rien lorsque des pas d'humains, dans le couloir, le réveillèrent. Des pas nombreux. Plus que deux. Quatre peut-être. Donc deux humains. Il relève la tête, couche les oreilles. Pourquoi au juste, si ce n'est qu'une sortie au pré comme d'habitude, ou une séance de pansage, voir de saillie, pourquoi Aenor et lui sont-ils séparés des autres ? L'expression sur le visage des humains ne lui dit rien qui vaille. Pour autant, il se laisse attraper, passer un licol sans résistance. Il gronde doucement, à l'intention de sa complice: Tu te sens comment ?

Elle est elle aussi réveillée par le bruit d'une venue. Immédiatement, ses muscles se tendent, ses oreilles se tournent vers la source du bruit, les sens en alerte. Elle hennit doucement à Chao, se laissant elle aussi faire. « En forme. Tu crois que c'est aujourd'hui ? » demande-t-elle, et malgré l'excitation de mettre enfin leur plan à exécution, elle ne peut pas s'empêcher de ressentir une certain appréhension.

▲ On dirait bien. Les humains semblent intrigués par la réaction des chevaux. Ils sont sauvages d'habitude. Enfin bon, tant mieux, ils seront plus faciles à monter.
Ils seront plus faciles à dompter en rodéo.
Chao courbe l'encolure, piaffe un peu, fait mine de pincer les fesses de son meneur. Fallait pas abuser quand même. ¬¬ Il se laisse ainsi conduire dehors, la tête bien haute, jetant ainsi un coup d’œil là où sont enfermés leurs camarades. C'est là qu'il galopera. Il hennit. L'homme tire sèchement sur son licol.

Aenor, elle, suit derrière, menée par une jeune femme aussi carrée qu'un camionneur. Elle se laisse faire, elle n'use pas de brutalité avec elle, alors elle ne se débat pas trop. Il faut garder son énergie pour après. Ils passent une porte, et la lumière l'éblouit. Depuis quand est-elle enfermée à l'intérieur ? Elle n'en sait rien. Entre temps, elle s'est faite taillée la crinière en compagnie de Callie. À elle aussi, ils lui ont enlevé cette belle fierté que d'avoir de longs crins roux ondulés. Il ne reste sans doute plus rien. Rien d'autre qu'un mur en brosse. Horrible.
Mais elle s'en fiche. Elle regarde l'endroit où on les guide, elle observe tout autour d'eux, note tout intérieurement. Tout va se jouer bientôt, elle en est persuadée.
Ils ont toutes leurs chances de gagner. Elle en est persuadée.

▲ Chao, lui aussi, a l'espoir de la liberté. D'être des héros d'ici. De rejoindre les troupeaux pour migrer encore. Bien que la lumière du dehors éblouisse légèrement l'étalon, il reste concentré.
Et devant eux, se profile l'endroit tant redouté par d'autres. Tant espéré pour eux. La carrière. Du sable, comme dans le désert d'où il vient. Des clôtures, ce qui le fait vite revenir à la réalité.
L'homme le conduit dans un couloir, ancré entre deux barrières et donnant sur l'intérieur de l'arène. Mais cet intérieur ne lui est pas offert: une porte l'en sépare. Il ronfle des naseaux, appelle Aenor d'un bref hennissement. Il ne la voit plus. Il ne peut pas bouger. Derrière lui aussi, c'est bloqué.
Des gens s'affairent tout autour: l'un lui met une selle, et la sert ; fort. Il gronde. On lui met une bride, on ferme la muserolle, ce qui lui rabat le caquet, l'empêche de mordre. Il frappe nerveusement des postérieurs sur le sol poussiéreux, heurte parfois les parois de sa cage. Puis on lui sert quelque chose autour de la taille, encore plus fort, ça lui donne envie de bondir. Il souffle bruyamment. Prêt pour le rodéo. Manque plus que le cavalier et il se saura libre de bondir en avant et de commencer les acrobaties. Il se demande où en est sa complice.