• Plus d'vie, plus d'envie.

Mais on ne cache pas beaucoup à un cachottier. Ou on ne ment que difficilement à un menteur. Un passé douloureux, il connait. Le passé est ce qui forge un caractère. Quelque chose me dit que vous ne m'aimes pas beaucoup. Parce que je ne suis pas une jument.

Invité

- En vrai, j'm'en branle, lui répondit Jiyuu.

Et ici, ce n'était même pas un mensonge. Sa présence la dérangeait parce qu'il était vivant. Tout simplement. Elle n'aimait pas autrui. Tout court. S'il avait été une gonzesse, elle aurait eu la même réaction. La plupart du temps, elle était seule, alors forcément on n'était moins à l'aise avec approximativement tout le monde. Même avec soi-même.

Il retourne son regard vers elle. il aimait son caractère, sa franchise tranchante. Ça lui rappelait quelqu'un d'autre. Mais il se retint bien de lui dire. Pouquoi cette mefiance? Je t'ai rien fait.

Invité

- J'aime pas les gens, lâcha Jiyuu.

Au moins, ça avait le mérite d'être clair. Parce que finalement, être en présence de quelqu'un, c'était prendre le risque de le connaître davantage. De l'apprécier. De s'attacher. Et ça, elle ne le voulait surtout pas.

Il eut un faible sourire. Lui il aimait les gens, car il était resté trop longtemps seul à les fuir. À les croiser puis disparaitre complètement. À passer en coup de vent. Il eut ce sourire parce qu'elle lui rappelait lui avant d'arriver sur gs. Il recula de quelques pas, au cas où elle préferait avoir une distance entre eux. Fais attention. Un jour la solitude finira par te peser, crois-moi. Et c'est à ce moment que tu comprendras que s'attacher n'est pas si terrible, même si ça peut faire mal parfois. dit-il d'une voix douce. Après, il prit le pas et commença à s'éloigner.

Invité

- C'est con de s'attacher, lui répondit Jiyuu.

Elle lui emboîta le pas. Parce que si elle n'avait besoin de personne, elle avait malgré tout besoin de réfléchir. Surtout de réfléchir avec les paroles de quelqu'un d'autre. Parce que réfléchir avec ses propres mots, ça ne donnait rien de nouveau. C'était le seul avantage qu'elle voyait en présence de quelqu'un.

- S'attacher à quelqu'un, c'est s'attacher à une douleur qu'arrivera tôt ou tard, lui dit l'alezane par la suite. La mort est là pour le rappeler, de toute façon.

Les paroles de la jument le fit se tendre et il détourna le regard, la mâchoire crispée. Elle n'avait pas tort. Il s'était dit cela si longtemps, mais ça avait fini par lui faire du mal. La solitude l'avait pesé. Lui qui avait cru que la mort le suivait pour le punir de la Guerre fuyait autrefois les gens pour les protéger. Mais il avait fini par comprendre que c'était pour se protéger lui-même. Tu anticipes. Oui, la douleur est potentielle lorsqu'on s'attache, mais les souvenirs restent plus forts. Il marqua une pause. Je comprends parfaitement ce que tu te dis tu sais. Si tu savais ce que j'ai vécu. Je me suis longtemps dit ça moi aussi. Mais ça a fini par me causer plus de tort que de bien.

Invité

Plus de tort que de bien ? Elle ne le comprenait pas vraiment. Après tout, si s'attacher était souffrir, alors en quoi serait-ce pire de ne pas s'attacher ? Elle, tout ce qu'elle voulait, c'était éviter la souffrance de la vie. Parce que ce n'était pas ça vivre, ça c'était survivre. Mais elle ignorait encore tant de choses, c'en était adorable d'une certaine façon, même si ça aussi elle l'ignorait.

- Comment ça ? Lui demanda Jiyuu, curieusement intriguée par ce qu'il venait tout juste de le lui dire.

En effet, elle ignorait ce qu'était vraiment la solitude. Celle qui hante, celle qui te fait parler tout seul pour avoir un semblant de compagnie. Et Vagabond ne souhaite à personne que cela arrive. Parce que ce n'est pas sain de rester seul trop longtemps. Certains deviennent fous. Un jour ou l'autre, on se rend compte qu'oon a perdu du temps, que tout cela ne rime à rien. Qu'on a fait du surplace pendant trop longtemps. Qu'on a fait que fuir.

Invité

Pour autant, elle avait été seule longtemps. Parfois même jusqu'à ne plus savoir parler. Jusqu'à ce que la gorge s'assèche. Jusqu'à ce que la voix se brise en mille morceaux sur un seul mot. Pas à en devenir folle, non, puisque la folie ne venait qu'avec la souffrance. Et la solitude protégeait plus qu'elle ne meurtrissait.

- J'ai été seule pendant des mois, lui répondit-elle, insolente. J'avais plus d'voix. Mais j'suis pas dev'nue folle. En fait, j'me sentais en sécurité.

Vagabond est né avec tutes sortes de qualités et de défauts. Donc il y a certaines choses qui le rendent impatient. Le bicolore voyait ben que le sujet n'avançait pas. L'insolence de la jument commençait à l'agacer. Il soupira. Seule, tu n'es en rien qui ressemble à la sécurité. Si tu n'as pas envie de comprendre ce que je te dis, si tu préfères vivre dans l'ignorance et la solitude, libre à toi. J'essayais juste de t'aider et de t'éviter de faire des erreurs que j'ai fait.

Invité

- Tu t'prends pour un sage, lui répondit l'alezane. Mais t'essaies de faire une généralité avec ton cas. Qui t'dit que j'suis faite du même bois ? Chacun est différent. Si être seul t'a rendu barge, c'parce que t'étais pas insociable de base. Parce que la solitude c'tait lourd à porter. Pour moi, c'ma meilleure pote.

En effet, chacun vivait sa vie comme il l'entendait. Et même si Jiyuu était morte à l'intérieur, elle refusait d'entendre raison. Ce n'était pas dans son tempérament.

Le pie secoua la tête, agacé. Il n'en pouvait plus. Certaines personnes ne voulaient rien entendre, et elle en faisait partie. Ouais bah ta meilleure pote elle te sauvera pas d'une meute de loup. rétorque-t-il impatiement. Sur ce, il s'éloigna pour respirer un peu. Seul.

Invité

- Ah parce que j'suis une gonzesse, c'est ça, s'exclama-t-elle.

Jiyuu était moqueuse mais c'était bien normal. Que pensait-il, qu'on avait obligatoirement besoin de quelqu'un face à une meute de loups ? D'une, une meute, ça signifiait plus d'un loup, donc aucune chance de leur foutre sur la gueule, même aidée par quelqu'un. De deux, la fuite, c'était toujours mieux seule.

- Et là, c'toi qui t'casses pour être seul, j'te f'rais r'marquer, lui dit-elle ensuite, forte amusée du "fais ce que je dis, pas ce que je fais."

ll releva un instant les yeux vers elle. Ça n'a rien à voir. répond-t-il. Puis, il continue son chemin. Agacé, il ne se donna même pas la peine de se retourner. Pas ma faut si tu m'casses les oreilles.