• Petit deviendra grand.

/ ORION

Le nez au sol, comme un pisteur, l'enfant explore. Il traque les nouvelles odeurs, traque les indices qui l'emmèneraient vers une nouvelle rencontre intéressante.

Alors qu'il déambule avec sa silhouette fine, un mouvement lui fait tourner la tête. Ses deux iris clairs se rivent sur une pouliche tachetée, rousse et blanche. Il la fixe, son regard froid sans vraiment le vouloir, de par sa couleur sûrement et son absence d'émotions sur le visage.

Et on ne se méfie jamais d'un enfant. Elle s'approche et l'akhal, lui, ne bouge pas. Il la laisse venir à lui. En guise de salut, il hoche la tête quand elle est enfin près de lui. Il ne dit pas un mot, l'étudiant toujours de son regard troublant.

Il hoche la tête de nouveau. L'enfant ne répond pas, il ne sait même pas si c'est un cri de joie ou son nom. Il lui fait juste signe de le suivre et fait demi-tour, lentement mais gracieusement. Ses membres sont encore fragiles mais ils portent déjà l'élégance de la légèreté. Il ne sait pas où il veut aller exactement, où est-ce qu'il veut l'emmener, peut-être même ne le suivra-t-elle même pas.

L'enfant continue son chemin. La petite inconnue ne semble pas dérangée par son silence, il sourit pour lui-même. Il secoue son encolure noueuse et s'arrête finalement dans une petite forêt où s'écoule un fin ruisseau. Sans se soucier de la présence de la pouliche, comme s'il l'avait déjà oubliée, il va s'y désaltérer tranquillement. À la suite de quoi il relève la tête, le menton encore dégoulinant, pour tourner vers elle ses yeux clairs.

(ah mince, sorry )

Ou peut-être pas, en effet. Orion accorde peu de principes aux noms. Chez lui, ça n'est pas une formalité de se présenter, peut-être parce qu'avant d'arriver ici, il n'a jamais eu à se présenter. Parce qu'il n'a toujours vécu qu'avec son père. Mais il apprend, peu à peu, les règles de la communauté. Facile de les observer, facile de les retenir, peu aisé par contre de les appliquer quand on a été formaté déjà si jeune. L'enfant observe l'autre poulain et vient vers lui, de sa démarche un peu dansante. Il garde ses yeux bleus plantés dans les siens, sans rien dire toujours.

Orion entend directement cette difficulté. Il ne la prend pas pour un handicap, juste pour une différence. Une différence qu'il partage avec cet inconnu, visiblement. Lui non plus n'a pas l'habitude de parler, pas autant que les autres. Mais chez lui, le résultat n'est pas une hésitation au moment de parler, juste d'étonnants silences. Pourtant, devinant l'effort du pie, il décide d'en faire un aussi et de sa voix drôlement claire, il prononce : Orion.