lost in yesterday

Voilà la louve noire, se faufiler entre les hautes herbes et les arbres, comme traquant sa proie jusqu'à ce que celle-ci ne s'épuise. Voilà un bon moment qu'elle s'était éclipsé, fuyant alors tout les récent éventements. Par peur ? Sûrement pas. Plutôt par haine du changement radical. Et suivre Mahem ainsi, était un bon moyen pour elle de savoir si ce dernier avait aussi changé. L'imposante jument finit par accélérer le pas pour venir le dépasser, et se mettre en travers de son chemin.

La louve l'observe attentivement. Longuement. Tout en prenant son temps, se fichant de lui foutre la trouille ou de lui faire perdre son temps. Elle a toujours été comme ça, si bizarre, si fantomatique. Sa personnalité. Et il le savait. Lorsqu'il s'adresse à elle, la grande noiraude ne répond pas de suite, toujours plongée au plus profond de ses yeux.
Mahem. Dit-elle, premièrement. Oui, depuis toujours.
Elle capte très bien le sous-entendu, mais n'y prête pas attention. En fin de compte, elle a toujours été seule, sauf lorsqu'elle cotoyait encore Snow, ou encore son petit frère Leïo. Et même son pauvre fils, de qui elle n'a aucune nouvelle, n'avait pas réussi à remplir le vide en elle.

Avec son père.
Lâche-t-elle aussitôt, un peu froide, ne voulant pas s'y attarder. Étrangement, aujourd'hui, ça ne lui déplairait pas de trouver quelqu'un avec qui partager un petit bout de vie, mais aussi avec un enfant. Elle se dégoute presque d'avoir pu donner naissance à son premier enfant de la sorte.
Moi, aussi.
Bien difficile, mais il ne faut pas se voiler la face. Ridicule. Elle ose même effleurer durant une seconde les naseaux de son ami d'enfance, se décontractant au fil des minutes.
Qu'es-tu devenu ?

Oui, ça va. C'est la seule chose qu'elle avait à dire sur son état actuel. Ça va. Comme être en équilibre sur un élastique à plusieurs et plusieurs mètres de hauteur, sans protection. Espérer la chute, et espérer atteindre le bord. C'est qui ta mère ? Et cet ami ? Elle devait avouer ressentir une légère jalousie, de ne pas être sa seule copine, son seul entourage. En fait je sais rien sur toi. Finit-elle par avouer.

J'sais pas. Peut-être. Dit-elle en haussant machinalement ses épaules, l'air de rien. Est-ce vraiment de la tristesse ? Ou juste une habitude de ressentir une telle émotion. Ses oreilles pointées vers lui, Plum l'écoute très attentivement. Elle ne connaît aucun de ces noms. Pour le moment. Moi ? De la famille ? Elle étouffe un sourire, et se retient de partir en fou rire. Mes histoires de famille vont te donner le vertige. Mais oui, j'en ai encore. Enfin si on peut appeler ça une famille. Même si dans le fond, les éloignement sont aussi de sa faute.

Ça dépend envers qui. Envers mon petit frère, oui. Avec qui bizarrement je ne partage aucun sang. Peut-être est-ce l'absence de Leïo qui creuse, au fil des années, un trou béant dans l'âme de la jument. Peut-être est-ce pour ça qu'elle semble là, sans être là. La curiosité ne surprend même pas la grande noiraude, habituée désormais à ce trait de caractère venant de son ami. Mon père c'est.. Asmund. Dit-elle un peu difficilement, hésitant encore à qui attribuer ce rôle. Son vrai père, ou Snow, qui l'a élevé ?

Elle l'écoute, sans rien dire, farfouillant dans sa mémoire. Il est vrai que c'était beaucoup mieux, et surtout moins contraignant. Après tout, elle préfère Mahem, avec qui elle ne partage aucun lien de sang. Il a fondé quoi ? Oui car, elle aussi, ne connaissait rien sur son vrai père. Hors de question. Mes vrais maisons resteront les forêt et les bois.