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vibe


Ce n'était pas naturel pour elle d'aller dans le Nord de Lunaera. Ses deux parents venant d'un pays chaud, du désert, la glace et le froid n'avait pas été faits pour elle. Et c'était justement pour ça qu'elle était là. Elle venait ici quand elle avait besoin de réfléchir et d'être seule. C'était le dernier endroit où on pensait à venir la chercher. Alors c'était devenu son repère lorsqu'elle avait envie de se réfugier pour être elle-même. Ou pleurer. Et cette fois-ci c'était les deux en même temps.

Il détestait cet endroit. Ce froid mordant, ce froid piquant, ce froid paralysant. Il avait toujours détesté le nord, lui, éternel fils du sud. Mais en ces lieux, quelque chose l'y ramènerait pourtant toujours. La sculpture de Lov, son ancienne amante, mère de son défunt fils. Amour de son frère. C'était pour leur dire au revoir à tout les trois, en un sens. Lov, Asmund, Xander.
Malgré lui, il est tendu, comme s'il redoutait ce moment. Au fond, il a un peu la sensation de les abandonner. Et pourtant, il doit le faire. C'est devenu essentiel, vital. Il doit partir.

Des bruits lui parviennent avant qu'il n'atteigne la petite salle logeant la sculpture de glace. Quelqu'un l'a devancé. Qui ? Seul Njörd lui vient en tête, tout les autres sont .. Morts ou disparus. Affligeant constat. Ses yeux sombres se posent cependant sur la silhouette clairsemé de sa fille, Aulia. Il n'aurait pas pensé la trouver ici. Mais sa petite fille avait grandi, et malheureusement, il y avait un tas de choses qu'il ignorait d'elle à présent. Il entend ses pleurs, voit ses larmes, ses épaules qui tressautent. Hook approche d'elle et vient la serrer contre lui, passe sa puissante encolure au dessus de la sienne. Il ne lui demande pas la permission, il ne lui a jamais demandé, car quoi qu'il en soit, elle resterait éternellement sa petite fille.

Des bruits de pas résonnent et pourtant elle ne bougea pas, ne tenta pas de sécher ses pleurs et d'atténuer ses sanglots. Elle n'en avait pas la force. Elle n'en avait plus la force. Elle avait juste envie de prendre une pause de sa vie, d'arrêter de se mentir à elle-même pendant un instant. Mais elle était terrifiée.
La rouanne se sentit bientôt enlacée par l'encolure de son père et elle n'essaya pas de s'en défaire, profitant au contraire de son contact pour pleurer de plus belle, pour se laisser aller. Elle avait besoin de cette étreinte rassurante, sans même qu'elle ne le sache.

Doucement, et peut être même sans s'en rendre compte, il la berce un peu, comme lorsqu'elle était toute petite. Il ferme les yeux un instant, s’enivre de son odeur, de son coeur qui bat contre le sien. Ses pleurs le heurte, le touche en plein coeur. Il est si faible et si fragile, les tragédies qui les ont touché ont fracassé sa carapace. Mais pour elle, il continuerait à être fort, à être un roc solide. Il y met toute sa volonté pour ça. Il caresse doucement et tendrement son encolure de ses naseaux. Tu sais que tu peux tout me dire. murmure t-il, contrôlant sa voix pour qu'elle ne soit pas défaillante.

La chaleur de son père la réchauffait doucement, elle qui commençait à grelotter. Elle se laissait bercer, ce simple geste pansant un petit peu son coeur, la réconfortant lentement. Peu à peu, ses sanglots s'atténuèrent pour finir par s'arrêter, même si ses larmes dévalaient toujours ses joues. Sa respiration saccadée s'apaisa finalement lorsque les mots de son père résonnèrent dans la pièce. Oui, elle savait qu'elle pouvait lui parler, là n'était pas le problème. Mais si elle le disait, ses pensées qu'elle retenait depuis si longtemps deviendraient réalité. Et ça, ça lui faisait peur. Sauf qu'elle savait qu'elle ne pourrait pas y échapper. J'ai revu Aël y'a quelques temps. Il était parti avec sa mère mourante pour l'accompagner jusqu'à la fin. Mais ça change pas qu'il aurait dû m'avertir. Elle prit une pause pour calmer sa voix tremblante. J'lui ai dit que j'avais besoin de temps pour réfléchir. Je... Sa voix se casse et elle prit sur elle pour pouvoir poursuivre. J'étais presque soulagée quand il est parti. Pas que j'étais pas inquiète et pas que je tiens pas à lui, mais... J'avais plus à me mentir à moi-même tous les jours. Quand... Quand t'as dit que si j'ai perdu notre bébé, c'était p'tet parce que ça devait pas se faire avec lui, t'avais raison. D'ailleurs, elle ne savait pas trop comment il avait fait pour savoir, alors qu'elle-même était bercée dans sa propre illusion. Aulia releva ses yeux larmoyants pour les poser dans ceux de son père. Les larmes se remirent à couler, sans qu'elle ne puisse s'en empêcher. J'ai essayé, j'te jure. J'ai essayé de faire comme tout le monde, avoir un copain, l'aimer, faire un enfant. J'ai essayé si fort que j'ai cru, pendant quelques temps que c'était ce que je voulais. La rouanne s'était mise à trembler, par froid ou par émotion, on ne saurait dire. Les deux sûrement. Elle avait du mal à cracher le dernier morceau, le plus dur, même si elle était arrivée à un point de non retour. Elle ne pouvait pas faire marche arrière. J'ai essayé, mais j'arrive pas à ressentir pour un mec c'que je ressens pour les filles. Et maintenant je sais pas quoi faire, surtout avec Aël qui attend ma réponse. Mais j'suis tellement fatiguée d'me mentir à moi-même.

A la simple évocation du nom d'Aël, Hooker se raidit et ses muscles se contractent tandis que sa mâchoire se serre. Il prend sur lui pour ne pas l'insulter. Il s'en fout qu'il ait une excuse plus ou moins louable. Il aurait du prévenir Aulia, il aurait du être là aussi pour elle. Hook est un peu de mauvaise foie, il ferait tout pour sa mère. Mais là on parle aussi de sa fille, la prunelle de ses yeux. Alors il a tout les droits du monde d'être de mauvaise foie, surtout avec ce qu'elle a du traverser seule.
Il continue de la bercer et de caresser tendrement sa peau lorsque sa voix se brise, que les mots lui manquent. Hook ne laisse rien d'indélicat lui échapper, il la laisse se livrer sans intervenir, juste en l'épaulant du mieux qu'il peut en sentant que c'est compliqué et douloureux pour elle.

Il ne sait pas trop si il aurait préféré avoir tord ou pas sur ce qu'il lui avait dit, tout ce qu'il sait, c'est qu'il veut la voir et la savoir heureuse. Les larmes qui naissent dans ses yeux et courent sur ses joues lui martèlent le cœur. Et ses mots encore plus. Il offre un petit sourire triste et contrit à sa fille, se dessinant à la commissure de sa bouche. Doucement, il essuie ses larmes de ses gros naseaux avant de river de nouveau ses yeux aux siens, de soutenir son regard avec force, pour pouvoir la soutenir tout entière en même temps. Depuis quand devrais tu rentrer dans un moule, Aulia ? questionne dans un murmure rauque, avec un sourire un plus franc, complice. Avoir un mec, l'aimer, avoir un enfant, faire ce que tout le monde attendrait que tu fasses... Lentement, sa voix se fait plus forte, plus distincte, plus affirmée. Ce n'est pas inscrit en toi. Tu es libre. Tu es fière. Tu es impétueuse. Alors ne le réprime pas, laisse tout ça s'exprimer. Laisse toi être qui tu es et pas ce que les autres aimeraient que tu sois. C'est pas pour toi ça, c'est pas pour nous. Il laisse un petit rire s'échapper, ainsi qu'une larme. Il l'aime tellement. Oh tellement. Si tu pouvais te voir avec mes yeux Aulia, tu serais surprise de voir à quel point tu rayonnes. Alors n'éteins pas la lumière, laisse la briller. Brille. Illumine. Etincelle ! Il secoue légèrement la tête et ne peut laisser un petit sourire satisfait orner sa bouche. On emmerde Aël, si t'aime les filles, aime les Aulia. Brille. répète t-il en posant un regard tendre mais intense sur elle.

Elle savait qu'elle se mettait sans doute la pression inutilement, qu'elle s'inventait des standards que les autres n'en avaient rien à faire. Mais c'était inconscient, c'était involontaire surtout. Et pourtant elle se souvenait que ça avait commencé quand elle était très jeune. Elle voulait être digne de sa famille, elle voulait les rendre fiers. Et en sachant que l'homophobie était réelle dans le monde dans lequel ils vivaient, elle avait eu peur que ça affecte la vision qu'ils avaient d'elle. Alors elle s'était caché derrière la bisexualité en se disant que ça passerait peut-être mieux. Mais ce n'était pas elle. Je... J'en sais rien. souffla-t-elle, le regard vers le sol. Le reste la fit doucement sourire, rassurée. Et touchée aussi. Si bien que, sur le coup, elle ne savait pas trop quoi dire. Elle vint enfouir sa tête dans les crins de son père, reprenant simplement sa respiration. J'ai déjà rompu avec lui, mais j'lui ai rien dit. Et j'ai l'impression que j'lui dois des explications. Tout était si compliqué... C'était dur pour elle de mettre de l'ordre dans ses pensées et ses sentiments.

Son regard se porte sur la statue de Lov en arrière plan d'Aulia lorsqu'elle vient enfouir sa tête dans ses crins, sans trop vraiment savoir pourquoi. Il l'observe un moment, ressent un certain manque, un pincement au coeur. Elle aussi au final laisse un vide dans sa vie, aussi étrange que cela puisse paraître. Puis il se reconcentre sur les paroles de sa fille. Il fronce les sourcils mais se mord la langue avant de lâcher un venimeux qu'on s'en branle d'Aël et qu'elle ne lui doit rien du tout à ce petit batard. Maiiiiiis ... Elle a faillit avoir un enfant avec lui alors il est capable de comprendre qu'il a été, et est peut être toujours, important pour elle. Il déverrouille difficilement sa mâchoire une fois que le gout du sang caresse sa langue. Tu ne lui dois rien. Mais si tu ressens l'envie et le besoin d'avoir une conversation plus poussée avec lui fais le, si cela permet de te libérer. Je te l'ai déjà dis Aulia, ne te sens pas prisonnière dans ta propre tête. Il arque l'encolure vers elle pour venir embrasser sa joue. J'ai quelque chose à t'annoncer. dévoile t-il avec un regard pétillant et un sourire malicieux.

En lui parlant, elle se demandait pourquoi elle n'était pas venue à lui avant. Il était de loin la personne en qui elle faisait le plus confiance pour ce genre de chose, surtout qu'il semblait toujours avoir des conseils à lui donner. Peut-être parce qu'il avait vécu beaucoup de drames avant d'avoir une vie stable. Elle ne connaissait pas beaucoup de choses de son passé, mais elle savait que ça avait été un peu compliqué avant qu'il ne se mette avec sa mère. Sans doute était-il bien placé pour lui donner des conseils, même si son avis était parfois assez direct. C'est plus facile à dire qu'à faire. soupira-t-elle, avant de lui offrir un petit sourire pour lui signifier qu'elle allait y réfléchir et travailler là-dessus. Elle reçut son baiser et s'essuya la joue pour la forme, même si, au fond, même si elle n'était plus une pouliche, elle appréciait toujours autant ce genre d'attention. T'as enfin fait ta demande à maman ? dit-elle automatiquement avec un sourire détestable aux lèvres. Ils ne s'en étaient jamais parlé, mais elle avait pas eu trop de mal à deviner. On a joué aux entremetteurs ensemble, j'te rappelle. Alors quand j'ai vu la rose que t'as essayé de cacher, y'avait deux options : une grande occasion ou t'essaie de te faire pardonner.

Hook la fusille du regard, en ouvrant la bouche de manière frustré et choqué. Mais whaaaaaaaaaat comment elle lui nique l'effet de surprise. Bon en même temps … Si il avait pas mis autant de temps à sauter le pas, peut être que ça aurait eut plus d'effet Ses oreilles s'affaissent sur le côté et il adopte son air bougon en marmonnant un Niah niah niah ... tel l'éternel gamin qu'il est. Puis un petit air sournois et malicieux glisse sur son visage, récupérant vite son naturel provocant. Ouais mais tu sais pas ce qu'elle a répondu

Aulia éclata de rire face à la réaction de son père, bien que ça ne la surprenait pas vraiment. Pour elle, c'était juste évident qu'il fasse sa demande à sa mère, après tout ce temps. Mais elle redressa ses oreilles, curieuse d'entendre la suite. Shoote.