Some memories never fade ▬ N

Et si c'était possible ? Et si une simple pierre semi-précieuse avait le pouvoir d'offrir une seconde vie aux morts ? Qui serait assez fou pour y croire ? Certainement pas grand monde. Pourtant, ce genre de croyances sont celles de Niylah. Parce qu'elles sont celles de son clan. Rien n'est impossible aux yeux des sorciers. Niylah a déjà eu la chance de voir bien plus spectaculaire, lorsqu'elle était jeune.
- Et si je te le montrais plutôt ? Dit-elle, un sourire au coin des lèvres.
Après l'avoir observé un petit moment, Niylah ferme les yeux pour se concentrer. Elle s'imagine près de l'arbre centenaire et se met à réciter une incantation. La première qu'elle a apprise. Celle qui fait briller son améthyste si fort qu'elle éclairerait presque assez fort pour jouer le rôle de lumière dans la nuit. Lorsqu'elle rouvre les yeux, elle n'a même pas besoin de les baisser pour observer sa pierre. Au lieu de ça, elle préfère l'observer lui. Lui qui vient de lui faire braver son unique interdit ; celui de dévoiler sa véritable nature aux autres.

Même dans ses rêves les plus fous, Niylah n'aurait jamais imaginé pouvoir partager son secret avec quelqu'un d'autre. Et pour le coup elle en oublie toutes les mises en garde qui lui ont pourtant été répétées à de très nombreuses reprises tout au long de son enfance et adolescence.
Niylah n'est pas dérangée par leur proximité. Elle n'a d'ailleurs jamais été gênée par le contact des autres. Au contraire, elle a toujours aimé ça. Toujours silencieuse, elle se laisse harponner par l'unique œil valide du mâle alors que ses deux yeux harponnent son œil qui semble mort. Une image s'impose brusquement à elle. Rien à voir avec les visions dont elle a l'habitude. Ce n'est qu'un flash. Il lui donne pourtant une certitude ; elle a déjà vu ce genre de regard. A demi-vivant. A demi-mort. Demi-fonctionnel et pourtant si acéré.
- Une sorcière, répond-elle dans un murmure. Bien que je préfère le terme de magicienne, rajoute-t-elle dans la foulée.
Elle n'a jamais aimé le mot sorcière qui lui semblait trop péjoratif car mal compris et mal aimé du grand public. Beaucoup trouvaient ce terme inquiétant. Si bien que plus le temps passait et moins Niylah l'appréciait alors que c'était pourtant ce mot la que son clan utilisait.

Les particularités physiques n'ont jamais dérangé Niylah. Au contraire, elle a toujours trouvé que c'était des dons de la nature. Ainsi, l'œil de Faucon ne la rebute pas. Bien au contraire, il l'intrigue et la passionne. Il lui fait penser au sage de son ancien clan, au détail près qu'il n'était pas borgne mais aveugle. Et pourtant, il y voyait mieux que la plupart des autres sorciers. Les apparences sont souvent trompeuses.
- Certains préfèrent la magie noire, répond Niylah avec tristesse mais sans aucun jugement.
Chez elle, les sorciers qui usaient de leur magie dans de mauvais but étaient tués. Parce que son clan refusait de voir la magie utilisée à mauvais escient. Mais peut-être que d'autres ne fonctionnent pas ainsi. Niylah serait incapable d'émettre un jugement puisqu'elle n'a jamais connu de sorciers étrangers à son clan.
- Ce n'est pas pour autant qu'elle était une mauvaise personne. Certains se perdent dans leurs tourments... Et leur magie s'en imprègne.
Elle ne cherche pas à la protéger. Simplement à rétablir une vérité à laquelle personne ne pense, préférant blâmer les sorciers qui, malheureusement, sont un jour sortis du sentier.
- Je suis née dans un clan de sorciers. J'ai appris aux côtés de mes parents et de la matriarche, répond-elle, sans aucune crainte.
De toutes manières, elle a son améthyste qui la protège. Et elle connait un sort de protection. Elle n'est pas sans défenses.

Et seul les Dieux et Déesses peuvent savoir à quel point l'attention et le respect dont il fait preuve font plaisir à Niylah. Pour un premier confident, elle ne pouvait pas mieux rêver. Elle ne pensait pas que ce serait si facile. Si limpide. Surtout que durant toute son enfance, on lui avait intimé le silence à tout prix. Pour sa sécurité mais aussi celle du reste de son clan. Le secret devait impérativement être bien gardé. Niylah se referme un peu sur elle-même lorsqu'il répond que parfois, une âme n'a pas besoin de sorcellerie pour faire le mal autour d'elle. C'est pas faux. Hélas, elle aimerait oublier. Elle en a déjà vu quelques uns se perdre dans les méandres de la magie. Elle en a vu quelques uns se noyer dans la colère et la haine. Un sorcier n'a pas le droit de perdre le contrôle. C'est ainsi.
- Des visions. De terres qui se trouvent ici. Cette cabane, entre autres, dit-elle calmement en désignant le vieil atelier se trouvant à quelques mètres d'eux.

Niylah n'a jamais songé au fait qu'il pouvait sembler étrange d'avoir des visions. C'est pour cette raison qu'elle en parle aussi ouvertement ; pour elle, il n'y a rien d'anormal. D'autant plus qu'elle a apprit à vivre avec. Finalement, ça fait partie d'elle, au même titre que sa magie.
- Oui. Enfin, si ce n'est pas cette cabane, elle y ressemble fortement en tous cas. Je ne peux pas dire que j'en suis sûre à cent pourcent. Il y a toujours une marge d'erreur possible, d'autant plus que mes visions ne sont pas toujours très claires, avoue-t-elle finalement.
A vrai dire, elle s'y perdait aussi, quelques fois. Il lui arrivait aussi de ne pas y croire et de douter.
- Est-ce que tu l'as connu ? Demande-t-elle.
Niylah est autant intriguée qu'intéressée. Elle ne peut s'empêcher de se sentir concernée par cette information. Un sorcier... Comme elle ? Un vrai ? Elle aimerait que ce soit le cas. Ca expliquerait la raison pour laquelle cet endroit l'attire autant. Peut-être que c'est simplement un endroit dédié aux personnes comme elle. Aux sorciers.