Love like this ▬ A

Parfois, Absinthe avait vraiment l'impression que sa vie entière était vouée à la tristesse. A croire qu'elle ne pouvait pas vivre de choses bien. De choses heureuses. Il fallait toujours que le destin la rattrape.
- Je suis tellement heureuse que tu sois là... Souffle-t-elle doucement en pressant ses naseaux contre les siens.
Longtemps, elle avait pensé que ce jour n'arriverait pas. Que jamais elle ne retrouverait Aulia. Et ça avait sans doute été sa plus grande souffrance. Alors, même si la mort de Toundra et Draggan lui faisait du mal, elle savait qu'elle se relèverait. Parce qu'elle avait connu pire. Tellement pire.
- Et tu sais... Ces derniers jours, j'ai beaucoup réfléchis. Et je me dis qu'il serait temps qu'on franchisse une étape importante, lui dit-elle en observant attentivement sa réaction.

Et Absinthe l'accueille avec plaisir, un doux sourire naissant sur ses lèvres. Elle aussi aurait ronronné si elle avait pu. Mais elle se contente de l'enlacer avec tendresse. Voilà sa vision d'une vie parfaite ; passée aux côtés d'Aulia.
- Tu n'as pas à avoir peur voyons, rigole-t-elle à son tour.
Surtout qu'en vrai, sa proposition n'avait rien de terrible. Elle était même bien moins difficile à entendre que ses aveux précédents.
- Je me disais qu'il était temps qu'on fonde notre propre famille. Et qu'on arrête de vivre loin l'une de l'autre. Car... On ne peut pas fonder une famille à distance, souffle-t-elle, presque dans un murmure.
Parce qu'elle a un peu peur qu'Aulia refuse.

Absinthe se met à sourire, amusée par la réaction d'Aulia. Sa tristesse est presque oubliée, à cet instant. Et c'est vrai que, pour le coup, elle a sans doute été trop brutale dans sa façon de proposer son projet mais... Elle en avait besoin. Pour elle, c'était clairement la bouffée d'oxygène dont elle avait besoin pour ne pas s'écrouler après toutes ces mauvaises nouvelles qui lui étaient tombées dessus.
- Non Aulia, répond-elle avec sérieux, malgré la lueur malicieuse qui danse dans ses iris bleus. Je veux qu'on fasse nos enfants.
Elle marque une petite pause, observe les réactions de sa douce... Puis se lance dans les explications plus détaillées de son souhait ;
- Je veux qu'on porte chacune un enfant Aulia. Pour que nos enfants s'épanouissent ensemble et qu'ils ne se sentent jamais seuls. Même lorsqu'on ne sera plus là. Il suffira de trouver des géniteurs et les convaincre de ne jamais s'intéresser à l'enfant. Parce que ce ne sera pas leur enfant. Ce sera les notre. A nous deux et rien qu'à nous deux. Ils auront deux mères.
Et le projet semble carré, non ? Elles ont la chance de pouvoir porter la vie et même si elles n'ont pas la chance de pouvoir faire un bébé rien que toutes les deux, elles sont capables d'enfanter malgré tout. Alors pourquoi s'en priver ?
- Je sais. Mais on ne peut pas avoir des enfants et vivre loin l'une de l'autre. Pour cette raison, je suis prête à rejoindre l'Erg, si jamais j'y suis la bienvenue, souffle-t-elle.
Ca aussi, elle y avait réfléchit longtemps. Très longtemps.

Au fond d'elle, Absinthe voulait y croire, elle aussi. Elle se raccrochait sans cesse à l'espoir d'une vie meilleure. D'une vie qui serait plus douce et avec moins d'ombres.
Le sourire de la palomino s'efface lorsqu'elle voit les tourments qu'elle vient d'affliger à Aulia. Intérieurement, elle se condamne. Vieux reflexe du passé. Pourquoi être si conne ? Pourquoi en vouloir toujours plus ? La culpabilité lui mord les tripes.
- Tu n'es pas obligée d'accepter si tu ne te sens pas prête. Et ce n'est pas grave si ce moment n'arrive jamais. Je t'aimerai toujours, avec ou sans enfants. Tu seras toujours mon âme-sœur. Ca ne changera jamais, répond-elle simplement.
Un sourire se dessine de nouveau sur ses lèvres. Ce projet, c'était le sien. C'était le projet d'une vie. Fonder une famille. Avoir ce qu'elle n'avait pas pu avoir étant petite ; une famille unie. De son côté, Aulia était chanceuse ; elle avait connu la magie d'une famille unie. Tant du côté de ses parents fou amoureux l'un de l'autre que par la présence de ses frères et sœurs. En bref, elle avait eu tout ce qu'Absinthe aurait aimé avoir mais qu'elle n'avait pas eu. Alors peut-être qu'elle ressentait moins le besoin de combler ce "vide".
- Et pourquoi pas ? Ma mère à rejoint le clan de Njörd pour fonder sa famille. Pourquoi n'en ferais-je pas autant ? C'est toi ma famille Aulia.

La réponse d'Aulia lui brise le cœur. Pourquoi se mettait-elle cette bêtise en tête ? Avec douceur, elle effleure ses naseaux des siens.
- Tu ne me décevras jamais. Je sais ce que ça fait de perdre un bébé. Et aussi de perdre un fœtus, Lui confie-t-elle finalement.
Car elle l'avait vécu, elle aussi. Et elle n'avait pas envie de se mettre la pression. Elle voulait simplement réessayer. Qui ne tente rien n'a rien après tout.
- Non. Je pensais... Prendre le premier venu, avoue-t-elle avec une pointe de malice. Et je préfère le terme de géniteurs. Parce qu'ils n'auront pas à endosser le rôle de père, précise-t-elle.
Parce que c'est une clause non négociable du contract.

A la réponse de son aimée, Absinthe se met à rire. Elle n'a pas tord. Beaucoup d'étalons apprécient les juments indépendantes qui n'ont pas spécialement envie de les enchaîner dans une vie de famille monotone. Et puis surtout, beaucoup aiment s'envoyer en l'air sans pour autant devoir assumer les responsabilités qui s'ensuivent. Absinthe l'avait vécu avec Draggan. Une fois pleine, il l'avait subitement abandonnée et c'est à peine s'il avait daigné être présent le jour où Azel est née. Cette journée avait été terriblement douloureuse pour la blonde et encore aujourd'hui, elle en souffrait.
- Bizarrement, moins ils s'impliquent et mieux ils se portent. Donc j'imagine qu'il serait triste de tomber sur les deux seuls mecs désirant assumer leur paternité, rigole-t-elle.
Pour Absinthe, le plan était clair ; trouver un inconnu pendant les chaleurs, le faire succomber et le planter là. En clair, aucun sentiment, pas même de l'amitié. Et ainsi, aucun risque qu'il veuille s'impliquer dans la vie de son bébé.
- Evidemment. Tu verras. Bientôt, nous serons quatre, lui souffle-t-elle à l'oreille avant de lui caresser avec tendresse la joue.