Mon chant d'espoir //F//

Satinka ▬ Enfin. Après l'avoir laissée plusieurs jours dans son box, on l'emmène au paddock. Le pas de Satinka est lourd, résigné. Ca fait un petit moment qu'elle a arrêté d'essayer de résister aux cowboys. Avec le temps, elle a comprit que ça ne servait à rien hormis à se faire du mal. Docilement, l'ex jument indienne entre dans le paddock et met aussitôt le nez dans l'herbe. Elle n'a pas l'habitude d'être ainsi mise à la diète alors dès qu'elle a quelque chose d'un minimum appétissant qui lui passe sous le nez, elle ne s'en prive pas.

Satinka ▬ L'appétit de Satinka décline rapidement au fil des bouchées qu'elle avale. Le goût de l'herbe n'est vraiment pas terrible et les verts pâturages du camp indien commencent à lui manquer. Dégoûtée, elle abandonne finalement l'herbe malgré son estomac à moitié vide. C'est limite si la paille de son box n'a pas meilleur goût.
Satinka. Elle relève vivement la tête lorsqu'elle entend son nom. Son vrai nom. Pas l'autre nom ignoble qu'ils lui ont filé en la capturant. Arizona. Comment est-ce possible ? Le cœur serré, elle cherche une silhouette connue. Et quelle n'est pas sa surprise de découvrir le sauvage qu'elle avait aidé à fuir. Pfff, c'était vraiment utile de risquer sa peau pour lui tiens. Ses oreilles se plaquent contre sa nuque alors qu'il la rejoint au galop et elle pivote légèrement pour qu'il puisse voir son flanc blessé.
- Tu t'attendais à quoi en me plantant en plein territoire inconnu ? Grogne-t-elle avec agressivité.

Satinka se maîtrise tant bien que mal pour ne pas tenter de franchir les barbelés et aller le tabasser. Zen Satin, c'est pas une bonne idée de s'emballer comme ça. Déjà parce que les cowboys les surveillent et en plus de ça elle est assez amochée.
- Ce n'est pas une question d'être bon ou pas en orientation. Je ne m'étais jamais réellement éloignée du camp jusqu'à ce que je te suive, rétorque-t-elle sur un ton accusateur, la colère faisant vibrer sa voix.
Elle lui avait fait confiance. Et il l'avait trahie. Alors qu'elle lui avait offert la liberté sur un plateau d'argent.
- Non. Ca, c'est la raison pour laquelle j'ai fini ici. En rentrant vers mes terres, j'ai rencontré un puma. Et juste après, une cowgirl. Elle m'a sauvé des griffes du puma mais m'a capturée. Du coup j'ignore ce qui est le pire. Être dévorée par un putain de gros chat des montagnes ou bien être retenue prisonnière ici ?
Elle ronfle des naseaux. Plus elle passe de temps ici et plus elle peine à rester calme.
- Mais franchement, toi qui semblait tant tenir à ta liberté... Je vois que tu es sacrément con. Tu ne retiens pas les leçons en fait ? Tonne-t-elle.

La colère et la peur qu'elle ressent ne l'aident pas à compatir au sort de l'étalon caramel. Au contraire, plus il s'énerve et plus elle se sent furieuse après lui. Et pourtant, ses mots lui font mal. Vraiment mal. Il n'a rien compris...
- Mais putain Filao - miracle, elle se souvient de son nom - ouvre les yeux. Regarde où nous sommes. Regarde bien, gronde-t-elle sans pouvoir se contenir.
Son regard glisse sur les environs. Les prés barbelés, le rond de longe, les écuries au loin... Cet endroit respire le mal. C'est l'enfer sur terre pour Satinka.
- Si MON peuple cherche à vous capturer, vous les sauvages, ce n'est pas pour le plaisir de vous torturer. C'est pour SURVIVRE. A ces barbares de cowboys, siffle-t-elle en tapant violemment son antérieur contre le sol.
Si seulement il pouvait le comprendre. Sérieusement, le campement indien et les indiens lui avaient réellement fait aussi mauvaise impression ? Satinka refuse d'y croire. Elle s'apprête à reprendre la parole lorsqu'il la devance en parlant de sa compagne et pour une raison qui lui échappe, elle sent une pointe de douleur traverser son cœur.
- Je ne savais pas que tu avais une compagne, se contente-t-elle de répliquer d'une voix plus douce. Moins assurée aussi.
Après quelques minutes de silence, Satinka reprend contenance. Son sang bouillonne dans ses veines et les battements de son cœur deviennent frénétiques. Elle pense à Imala qui doit s'inquiéter de son absence... Et à Hyanna qui est ici depuis si longtemps maintenant. Va-t-elle connaître le même sort que son amie ? Ne reverra-t-elle jamais les terres indiennes ? Son cœur se serre douloureusement.
- J'espère pour elle qu'elle ne sera plus ici lorsque la saison des chaleurs débutera, grince-t-elle entre ses dents serrées.
Car visiblement, c'est bien le délire de ces satanés cowboys de forcer des juments à avoir des poulains. Hyanna en avait fait les frais. Lorsqu'elle relève les yeux, ceux de l'étalon caramel les harponnent. Satinka réfrène un frisson.
- Ce n'est pas à moi de décider de lancer - ou non - une offensive contre l'ennemi. Pour mener à bien une mission, il faut y réfléchir. On ne peut pas se lancer bêtement sur un simple coup de tête. Regarde toi. Regarde où t'a mené ton complexe du super-héros... Tu es enfermé ici, aux griffes de ces salauds... Et ta bien-aimée n'est pas sauvée.
Finalement, au lieu d'améliorer la situation, il l'avait dégradée. Tout ça parce qu'il avait été incapable de penser avec autre chose qu'avec son cœur.
- On ne gagne pas une guerre avec son cœur Filao. Tâche de t'en souvenir la prochaine fois, soupire la pie en reculant d'un pas.

La tristesse enserre le cœur de la jument indienne. Cette discussion houleuse l'a éreintée. Elle ne s'est jamais sentie aussi impuissante face à une situation. Et en même temps... Elle n'a jamais connu pareille situation.
- Moi aussi, je suis désolée, soupire-t-elle en baissant les yeux pour observer le sol sec.
Elle est désolée de s'être mise dans une situation comme celle ci. Elle est désolée de mettre en danger Imala. Et surtout, elle est désolée d'avoir cédé à sa jalousie maladive. Sans ça, elle serait encore chez les indiens. Chez elle.
- J'ai été plus conne que toi, rétorque-t-elle d'une voix chargée d'amertume.
Elle s'en veut terriblement. Si seulement elle avait été moins stupide...
- Si Imala vient ici, ils la tueront, s'étrangle-t-elle, alors que les larmes lui montent aux yeux.
Ils avaient tué Magena. Ils n'hésiteront pas à tuer d'autres indiens et obstinée comme elle est, Imala risque d'être imprudente.
- Qu'est-ce que tu veux faire ? Il n'y a aucun moyen de s'échapper d'ici...
Ou si... Mais pas en vie.

De son côté, Satinka est calme. Beaucoup trop calme. Elle semble résignée. Sans doute parce qu'elle l'est réellement. Sans parler de l'angoisse qui lui vrille l'estomac. Si Imala venait à mourir pour elle, jamais elle ne pourrait se le pardonner. La jument pie le laisse effleurer ses naseaux des siens. Parce que ce geste - qu'elle aurait détesté en temps normal - la rassure en ce moment.
- Je te fais confiance, souffle-t-elle simplement, bien qu'elle aurait aimé répondre qu'il ne fallait pas qu'il fasse de promesse qu'il ne saurait tenir.
Le but n'est pas de le décourager. Au contraire. Mais Satinka n'a plus le cœur d'encourager qui que ce soit. La pie s'écarte d'ailleurs brusquement des barbelés lorsqu'elle aperçoit des cowboys qui viennent dans sa direction. Ses oreilles se couchent contre sa nuque. Et pourtant, elle sait qu'elle n'a pas le choix ; elle est forcée de les suivre, où qu'ils l'emmènent.

( Out )