hear me roar ∆ A

Elle n'entendait plus rien. Ni le bruit du vent de sa course folle, ni les aboiements des chiens sauvages qui suivaient sa piste. Il n'y avait plus que le tambourinement de son coeur qui résonne dans ses oreilles gelées. Astrée avait longtemps hésité à s'aventurer dans le bois des spectres en cette fin de journée ; ce genre d'endroit, bien que splendide à sa manière, regorge la plupart du temps de danger en tout genre. Ses yeux vairons observent très rapidement les alentours, mais pas d'issu de secours. Elle finit par piller net lorsqu'un lac lui coupe le chemin, avec un son centre une île étrange. Mourir mangée vivante, ou noyée ?

B O R E A L E

Les hurlements des loups l'avaient attiré. Allie avait toujours aimé le bois des spectres, y rodant lorsque les autres jeunes de son âge préféraient s'amuser sur les plaines verdoyantes. Le temps était passé et pourtant, ce lieu était toujours aussi mystique et attrayant.
Sa silhouette bicolore zigzague entre les arbres nus. Il ne lui faut pas longtemps pour retrouver la trace de la meute, sans encore parvenir à voir ce qu'ils poursuivent aussi avidement et désespérément. L'Île. Ils prennent sa direction et elle sait comment arriver au rivage avant eux.
Allie fait demi tour et galope de manière effrénée, l'adrénaline la booste et la pousse. Bientôt elle arrive sur la rive morne des bois et y découvre une silhouette blanchâtre. Elle la toise un instant, la bouche légèrement entrouverte pour laisser filer son souffle emballé. Ses yeux vairons détaillent l'inconnue lorsqu'un hurlement retentit. Ils sont tout proche. Boréale avance vers elle pour se placer à ses côtés et fait face à l'île. Nage, emprunte ce couloir sans en dévier sinon les courants t'emporteront. lui conseille t-elle. Elle tourne le visage vers elle. Je te suis. Un grognement menace s'élève de derrière elles, de justesse, Allie décoche une ruade dans le prédateur qui s'apprêtait à attaquer la jument. Mais bientôt en viendront de nombreux autres. Maintenant ! lui crie t-elle.

Comme d'habitude, Astrée ne peut pas en vouloir aux loups, de vouloir lui ôter la vie. L'hiver, bien rude, n'offre pas grand chose à se mettre sous la dent pour les carnivores. Et alors qu'elle se détend, doucement, prête à rejoindre sa défunte mère, elle croise un regard vairon, presque identique au sien. Mais un regard qui abrite bien plus de tourments. Euh, d'.. d'.. Elle n'eut pas le temps de répondre, que l'inconnue envoie valser un loup qui s'apprêtait à planter ses crocs dans son joli derrière. Et puis, un ordre.
Sans attendre, gardant en tête les conseils de la courageuse, Astrée nage en force droit devant, essayant de garder un souffle régulier pour ne pas se fatiguer trop vite. Elle n'ose pas regarder derrière elle, de peur d'y voir un tableau à faire froid dans le dos.

L’espace d'un instant, qui lui semble pourtant interminable, Allie pense devoir la pousser elle même dans l’eau pour la secouer un peu, pour lui faire prendre conscience de l'urgence du moment. Mais au moment où elle prend la décision de le faire, l’inconnue se lance enfin, nageant vers l’île. Boréale la laisse prendre un peu d'avance, s’assurant qu'elle emprunte bien le chemin indiqué et au moment où elle s’apprête à la rejoindre un loup lui saute sur le dos et plante sauvagement ses crocs dans son épaule. Elle ne peut contenir un cri mêlant douleur et rage. Comme une forcenée elle se met à ruer pour se libérer du prédateur avant que d'autres n'arrivent pour s'en prendre également à elle. S’épuisant vainement, elle finit par se jeter au sol, du côté où le loup est fermement accroché à sa chair meurtrie. Elle a cette fois raison de lui, l’assomant sur le coup. Difficilement, Allie se relève en grimaçant et se dirige en clopinant vers l'eau. Elle laisse une traînée de sang dans son sillage, à la surface de l'eau. Essoufflée, elle arrive enfin à atteindre la berge de l’île, où elle se couche, ayant puisée dans ses forces offerte par son adrénaline, forces puissantes mais éphémères.

Une fois arrivée sur le sable mêlé à la terre de l'île, Astrée s'empresse de retrouver ses esprits ainsi que son petit souffle. Elle inspire et expire profondément, se tournant ensuite pour s'assurer que sa sauveuse est derrière. Mais cette dernière ne vient pas seule, et se retrouve accompagnée par une belle traînée de sang et une plaie profonde à l'épaule. Elle piétine le sol, impatiente que la jument vienne à elle et se mette en sécurité après un tel combat. Le regard qu'elle pose sur la pie est un mélange de respect, et de tristesse. Comment peut-elle l'aider ? Mon dieu, ne bougez plus ! dit-elle très inquiète, inspectant le corps entier de la jument. Les sourcils froncés, elle a presque envie de pleurer ; ça aurait pu être elle, à sa place. Comment puis-je vous aider ? Je ne connais rien en la médecine.. elle pose sur elle un regard de chien battu, désolé de ne servir à rien.

Très distinctement, Allie perçoit l'angoisse de la jument percer dans sa voix, mais elle ne prend pas directement le temps de la rassurer, se traînant tant bien que mal le plus loin possible de l'eau. Y avait surement des crocos là dedans, enfin, elle ne tenait pas spécialement à vérifier sa théorie. Boréale ne peut ni atteindre, ni voir sa plaie, elle allait devoir s'en remettre exclusivement à l'inconnue mais elle ne lui serait pas d'une grande aide dans l'état dans lequel elle se trouvait, elle devait déjà essayer de la calmer. Calme toi, ce n'est pas mortel mais il faut nettoyer avant que cela ne s'infecte. Ça va aller, je vais te guider, ok ? Comment tu t’appelles ? souffle t-elle, ses mots parfois entrecoupés de piques douloureuses qu'elle tente de maitriser pour les laisser le moins possible transparaître.

Les paroles de la jument rassurent légèrement Astrée, qui décide de l'écouter. Elle inspire profondément et expire de manière identique, son corps étant un peu plus détendu, même si il grelotte légèrement à cause du froid et de l'eau encore présente sur son corps. Plus calme, bien que pas sereine, elle se reprend. Je suis Astrée, et vous ? demande-t-elle en retour, par habitude, même si le moment était mal choisit pour des présentation. Elle dresse ses oreilles vers la pie, impatiente de l'aider.

Allie grimace, la douleur lancinante de plus en plus compliquée à maîtriser, contrôler. Ses traits se tirent, sa bouche se crispe. Lorsqu'elle tente de regarder une nouvelle fois alors qu'elle sait pertinemment qu'elle n'y parviendra pas, elle ne voit que le sang qui coule le long de son épaule et jusqu'au sol. Cela coulait plus abondement qu'elle ne le pensait. Ok Astrée, moi c'est Boréale. L'échange des noms crée un lien, Allie perd du temps à s'assurer que cette dénommée Astrée s'intéressera assez à elle maintenant qu'elle avait un nom à mettre sur un visage, pour pouvoir l'aider, pour pouvoir lui sauver la mise. Il faudrait que tu ailles chercher de l'argile, un peu plus loin dans la forêt de l'île. Il faudra l'appliquer en couche épaisse sur la plaie. Nouvelle grimace, avec un gémissement qu'elle contient dans sa gorge mais qui s'entend. Tu penses y arriver ?

ASTRÉE a écrit:

Il n'en fallait pas beaucoup à Astrée pour qu'elle accorde son attention pleine et entière à un.e blessé.e, sans avoir besoin de poser un nom sur un visage. Néanmoins elle accepte les présentations, et un sourire doux et amical survol ses lèvres, se voulant rassurant. Bien sûr ! comment refuser une telle demande, alors qu'elle se trouve dans cette situation à cause d'elle. Astrée n'attends pas plus longtemps, et s'empresse de rejoindre le centre de la forêt. Bien heureusement pour Boréale, l'île n'est pas grande, et il ne faut pas attendre des heures pour voir revenir la petite colombe, traînant péniblement une feuille remplie d'argile. Chespere que ch'est cha ! Sans attendre, elle se couche près de sa sauveuse en analysant un instant de quelle manière elle pourra procéder. Tant pis, à l'arrache. Elle rapproche la feuille au plus près, s'aidant ensuite de ses naseaux pour appliquer du mieux qu'elle pouvait le pansement.

Pendant qu'Astrée part chercher l'argile, Boréale sert les dents et se traine tant bien que mal plus loin encore de l'eau pouvant regorger de dangers pire que cette meute de loup affamés. Il lui semble que le saignement s'est calmé mais ça continue de couler. La jument revient assez rapidement et semble avoir trouvé ce qu'il faut. Allie ne lui explique pas comment faire, finalement Astrée le fait instinctivement. Elle sent l'épaisse couche d'argile se former sur sa peau tel une carapace. Au moins, cela ne saigne plus. Elle se ferait soigner correctement à l'île, son île. Merci. Cela ira comme ça pour le moment. souffle t-elle en tentant d'apercevoir l'oeuvre de la grise. N'y parvenant qu'à moitié, elle abdique en tournant son visage plutôt vers celui de sa compagne de mésaventure. Elle lui sourit doucement. D'où viens tu ? Nous ne nous étions jamais croisées auparavant. demande t-elle en tentant de se relever, en vain. Elle grimace, plus d'agacement que de douleur.

Astrée s'arrête et observe son œuvre, s'assurant de ne plus voir de sang couler ou même un bout de chair. Et même si l'objectif est atteint, elle ne peut retenir une grimace déçue d'avoir fait un travail si bâclé ; mais pas le choix, au vue de l'urgence de la situation. Je ne suis pas d'ici, et c'est pour cette raison que je vais rester plus longtemps pour payer ma dette. ses oreilles tombent en avion, molles. Vous m'avez sauvé la vie.

Allie laisse un sourire amusé glisser sur ses lèvres face à l'air penaud d'Astrée. Elle la trouve adorable. Craquante aussi, elle doit l'avouer. Je pense qu'avec tout ce qui vient de se passer en si peu de temps, tu peux me tutoyer ? Je pourrai même me risquer à dire que tu es devenue en quelques minutes à peine une amie précieuse, Astrée. Elle se laisse aller à rire un peu, d'un rire cristallin et doux. Elle exagère, mais peut être peut elle faire en sorte que ses mots deviennent véridiques. Je t'ai peut être sauvé la vie, mais tu as toi aussi préservé la mienne. lui rappelle t-elle en laissant ses yeux tomber sur le cataplasme. Tant bien que mal, Boréale tente de se relever. Ses premiers essais sont infructueux, mais à force de persévérance, elle y parvient enfin. Sa tête tourne légèrement et elle doit se camper fermement sur ses quatre pieds pour ne pas vaciller. Tu connais un peu les terres et ses habitants ? questionne t-elle par curiosité, tournant de nouveau ses yeux dépareillés vers elle une fois qu'elle est à peu près stable sur ses sabots.

Tutoyer ? C'est vrai que ça ne lui a pas traversé l'esprit jusqu'à maintenant. C'était une habitude, une manière de vivre à vouvoyer quiconque croisé son chemin. Et avec ce qu'il vient de ce passer, oui, elle peut la tutoyer. Son rire mélodieux fait son sourire, éphémère lorsqu'elle essaye de se lever. Non arrête tu vas te blesser ! dit-elle avec précipitation, jetant son frêle corps en avant pour la rattraper si elle venait à tomber. Ses yeux dépareillés ne quittent pas les membres de Boréale, essayant d'anticiper la moindre chute. Un peu oui, ça fait déjà un moment que j'ai fais ma halte. ses yeux de biche se lèvent vers son beau visage. Tu es d'ici n'est-ce pas ? après tout, elle ne pouvait pas être une voyageuse et connaître ce passage secret.