/ you found me

Allie n'a pas quitté l'île depuis plusieurs jours, ou plusieurs semaines ? Elle ne se rend pas vraiment compte, ou plus vraiment compte. Le temps passe sans qu'elle ne le voit, et à la fois, il est d'une lenteur infernale. Ses flancs gonflent petit à petit, trahissant sa gestation. On dit que le temps guérit toutes les blessures, atténue toutes les colères. Boréale peut certifier que non, et Faucon, son amour, le certifiera certainement aussi. En silence, elle dessine les contours de sa silhouette, le déshabillant de son regard dépareillé. Aussi légère qu'elle le peut, elle approche sans bruits, pour venir caresser son chanfrein de ses naseaux. Quels tourments habitent ce vif esprit ? murmure t-elle à l'orée de sa peau. Certainement qu'elle connait déjà la réponse, certainement qu'elle n'a pas réellement envie d'aborder le sujet, mais certainement qu'ils en ont tout les deux besoin pourtant.

Malgré toute la gravité de la situation, le sourire de Faucon parvient toujours à attirer celui d'Allie, le faisant trôner sur ses lèvres gourmandes comme si il avait tout les droits d'y être. Il arrache des mots qui font écho à ses propres pensées. Oui, elle se demandait comment il revenait toujours à elle, surtout maintenant, surtout dans l'état dans lequel elle se trouvait, surtout en portant l'enfant d'un autre. Qu'elle l'ait voulu ou pas, c'était la seul condition qu'ils avaient posé à leur relation. Elle se sentait coupable, fautive. Et lorsqu'elle tentait de se raisonner, tout ce qu'elle entendait c'est qu'elle était une victime. Vrai. Mais terriblement insupportable. Elle préférait encore sa culpabilité qu'à cette réalité.
Aimantées, ses lèvres s'avancent vers les siennes à peine perçoivent-elles le signal d'un imminent baiser. Il est douceur, il est subtilité. Est-il amour ? Elle se mord la lèvre inférieure lorsqu'il retire sa bouche de la sienne. Elle n'a pas encore osé dévoiler ses sentiments. Mais ils avaient tant de chose à aborder, il était temps. Son encolure contre son épaule, elle tourne la sienne pour passer ses naseaux dans ses crins ébènes, caressant sa peau se trouvant en dessous. La fatadique question est posée. Comment se sent-elle ? C'est si complexe de le décrire. Le regard de Faucon mêlant vie et mort trouve chemin jusqu'au sien, d'ombre et de lumière. En colère. Terriblement en colère. Dévoile t-elle dans un souffle. Pour des milliers de raisons. Elle aurait pu rester vague, mais pas avec lui. En colère envers moi même de le haïr si profondément bien avant qu'il ose me faire ça. En colère envers lui d'avoir osé essayer de me briser, d'avoir osé me salir, d'avoir osé mêler nos sangs parents. En colère d'attendre un enfant que je ne souhaitai pas. En colère que cet enfant ne soit pas de toi. En colère que mon corps réagissent à un traumatisme alors que mon esprit désire mettre le feu à tout ce que je touche. En colère de m'être laisser avoir, d'être une victime … En colère de ne pas être capable de te dire ce que je ressens pour toi. Cela faisait beaucoup, et en même temps, c'était encore tellement insuffisant. Allie l'observe, penche légèrement sa tête sur le côté. Elle est si en colère et pourtant, sa présence l'apaise étrangement, sa voix étant doucereuse et calme.

Elle savait bien en commençant qu'il faudrait qu'elle livre bien plus de détails que ça mais malgré tout, c'est étrange de devoir se mettre ainsi à nu. C'est étrange mais pas effrayant, parce que c'est lui, parce que c'est eux. Mais elle n'est pas vraiment fière de ce qu'elle s'apprête à dire. Peut être le regard qu'il porte à cet instant sur elle va changer, changera à tout jamais. Elle ne peut plus faire machine arrière. Je le hais parce qu'il a tué ma mère. Elle a donné naissance à des jumeaux, elle est morte en couche. Toute le monde pense que je suis folle, que je n'ai pas à leur en vouloir ainsi, que se sont les risques pour n'importe quelle mère qui met au monde, mais ... Elle s'arrête un instant, quitte son regard pour regarder un instant le sol, la bouche entrouverte, avant de relever ses yeux dépareillés vers lui, humidifié par les larmes sans que pourtant elles ne coulent sur ses joues. Mais qu'est ce que j'en ai à faire, moi ? La finalité des choses c'est qu'elle n'est plus là. Qu'elle était mon monde, et que soudain, plus rien. Ils l'ont tué, volontairement ou pas, ils l'ont tué. Et … Et j'ai croisé Aszio un jour, au Nord. C'était notre terre, ma mère m'a tout montré et tout appris, là bas. C'était Nous. Et lui, il se pavanait là, avec cet air de dégoût peint sur son petit visage d'enfant. Pause. Qu'il assimile bien cette information. Je lui ai demandé de partir, mais il ne partait pas. Pourquoi n'est-il pas parti ?! Elle crie presque maintenant. Parce qu'elle a beau les haïr, cela lui fait plus de mal que de bien. Être une grande sœur pour eux, elle l'aurait tellement aimé. Il suffirait qu'elle mette sa rancoeur de côté mais elle n'y parvient pas, c'est trop dur. D'y renoncer c'est comme de renoncer à sa mère, et elle en est incapable. Je l'ai frappé Faucon … Encore, et encore … Sa voix n'est plus qu'un murmure à présent. C'est difficile de revivre cette scène. Et .. Et je suis partie, le laissant là, dans son sang. Comme il l'a fait pour moi. Je lui ai montré comment faire. Elle serre les dents. J'ai tellement voulu les voir mort, et pourtant quand l'occasion m'a été donné, je n'en étais pas capable. Et si Xander n'avait pas croisé ma route ce jour là, si je ne lui avais pas dis, Aszio serait mort. Cette fois une larme s'échappe de son œil clair lorsqu'elle prononce le nom de son défunt frère. Pas celui qu'elle aurait aimé voir perdre la vie. Ma mère, ma mère était Lovöjka. C'était aussi celle de Xander. Elle redresse le visage, avale difficilement sa salive, ne quitte pas son regard, se donne le courage nécessaire pour prononcer à voix haute ce qu'il en est. Faucon, je suis la demie sœur de ton père potentiel. Et peut être qu'après ces deux explications, il ne voudrait plus entendre parler d'elle, encore moins de cet enfant pour qui il était prêt à devenir un père aimant, et encore vraiment moins d'enfant dont il serait le véritable père avec elle pour mère.

Il reste si neutre et impassible, elle n'a pas l'habitude de voir son visage si fermé avec elle. Mais elle se concentre, pénètre son regard si saisissant, y lit des interrogations sans pouvoir deviner leur teneur, leur ampleur. Elle a envie de dessiner le pourtour de son visage de ses naseaux mais s'empêche de le faire. Peut être lui en veut-il trop pour supporter son contact, peut être aura t-il besoin de temps pour digérer ce qu'elle a pu faire, ce qu'elle n'a pas su lui dire avant aujourd'hui. Du temps ou bien l'éternité ? Est-elle entrain de le perdre ? Elle sent pourtant son âme toujours fermement liée à la sienne, mais peut être est-elle trop endommagée elle même pour parvenir à sentir que peut être, il s'est effrité à mesure qu'elle s'est dévoilée.

Enfin il prend la parole, et cela arrache un soupire presque désespéré à la pie de nacre et d'or. Je ne sais pas si il y a une situation préférable à une autre. Peut être me serais je laisser anéantir par le poids de la culpabilité si j'avais été jusqu'au bout. Elle détourne le regard, le pose sur l'arche parsemé de fleurs, comme si elle pourrait y trouver une réponse. Et pourtant je n'arrive pas à renoncer. J'ai conscience que c'est mal, mais quand je suis confrontée à cette haine qu'ils m'inspirent, peu importe le bien, peu importe le mal, ne reste que la rage. J'ai tellement de frères et sœurs, même si demis, ils restaient mon sang. Seul un s'est intéressé à moi. Et quand j'ai appris que ma mère donnerait de nouveau la vie, j'étais tellement heureuse de devenir grande sœur, de pouvoir m'occuper de cet être et ne jamais le délaisser comme j'ai pu l'être. Et … Et cela ne s'est pas passé comme je l'avais espéré. Lentement, elle dirige de nouveau ses yeux vairons jusqu'aux siens, se perdant dans ses deux yeux comme elle avait toujours eut l'audace de le faire, peu importe que l'un d'eux ne puisse pas la voir. Cela ne l'excuse en rien. Mais au final, peut être suis je autant responsable que lui. Elle ne lui cherchait pas des excuses. Jamais. Elle désirait toujours autant l'anéantir. Mais Boréale avait assez de courage pour affronter ses propres fautes. La haine engendre la haine ... souffle t-elle dans un murmure. Engendrait-elle la haine, chez lui aussi ?

Le sujet de X est sensible. Elle est encore meurtrie de sa disparition, il était le seul de sa grande fratrie avec qui elle avait construit quelque chose de semblable à de l'amour fraternel. Mais de l'autre côté, il était aussi responsable des deux viols de la mère de Faucon. Autant X ne lui avait jamais rien caché, lui avait parlé de son problème, lui avait parlé du premier viol de Mygale mais lui avait assuré qu'il n'était pas le père de l'enfant. Alors elle ne s'en était jamais inquiétée lorsqu'elle s'était considérablement rapproché du mâle brun, c'était Mygale elle même qui avait semé le doute dans son esprit, en lui avouant que finalement, elle n'avait aucune idée de la véritable paternité de son fils. Et tandis qu'elle se torture silencieusement, son regard s'étant perdu dans le vague, un mot, un seul, la fait brusquement river de nouveau ses yeux aux siens. S'aimer. Faucon est trop minutieux pour l'avoir dit hasardeusement, mais en même temps, leur discussion pouvait être perturbante, le flot des informations – et quelles informations!- étant important. Il vient déposer son chanfrein contre le sien et elle ferme les yeux, s'accordent un instant de répit. C'est comme si par ce simple contact il aspirait momentanément tout ses maux. Lorsqu'elle rouvre les paupières, ses yeux sont directement confrontés aux siens. Il n'abandonnait pas la perspective d'avoir des enfants, il n'abandonnait pas l'idée d'être le père de celui à venir. Sans qu'elle n'ait rien sentir venir, une larme lui échappe et vient mourir à leurs sabots. Elle recule légèrement son visage, détache son chanfrein du sien pour pouvoir le regarder pleinement. Je t'aime. Elle ouvre la bouche pour ajouter quelque chose, c'est sorti si spontanément cette fois. Mais rien ne vient, durant quelques secondes, ses yeux se contentant de danser d'un œil à l'autre de Faucon. Il n'y a pas de mots pour pouvoir te dire ce que je ressens pour toi, les seuls qui s'en approchent sont ceux là : Je t'aime Faucon. Mais c'est tellement plus que ça. Tu es mon âme sœur, cela a été une évidence dès le départ et c'est si … Puissant que ça en est troublant. Et je ne te dis pas tout ça pour te retenir, c'est juste que … J'ai trop tardé pour te dire certaines choses, à présent tu sais tout.

Contrairement à la première fois où elle s'était mise ainsi à nu face à lui, il répond presque instantanément, à peine les lèvres d'Allie se referment-elles que celles de Faucon s'ouvrent pour lui dévoiler le fil de ses pensées, les rouages de son cœur, la profondeur de son âme, la solidité de leur lien. Elle voit tout. Elle entend tout. Elle ressent tout. Tant, que son souffle s'emballe à mesure que ses mots caressent ses oreilles. Et alors elle se trouve stupide de douter, de craindre, d'avoir peur. Ils étaient un.

Boréale caresse son visage au fur et à mesure qu'il parle. De ses naseaux, de sa bouche. Son souffle s'est apaisé, elle s'est imprégnée de chacun des mots qu'il lui a dévoilé, ce qui semble faire d'elle un être imperturbable et d'un calme inébranlable. Parce qu'avec lui, tout irait bien. Il braveraient des tempêtes l'un pour l'autre, en créeraient aussi, ou bien encore en affronteraient ensemble.
Doucement, il détache son visage de son contact, ce qui lui permet de plonger dans son regard, dans son iris glacée qui pourtant la réchauffe. Allie ferme les yeux au contact doux et délicieux de leurs bouches. Mais ce baiser à un léger goût … D'appréhension. Ses paupières se rouvrent et ses yeux peuvent de nouveau se mêler aux siens. Elle penche légèrement la tête sur le côté, curieuse. N'aie jamais peur de te confier à moi. Plus que le pardon, c'est la compréhension dont je ferai toujours preuve avec toi. Elle emprunte exactement chaque mot qu'il vient de lui dire. Un petit sourire naissant à la commissure de ses lèvres tandis qu'elle replace sa tête droite. Elle n'est pas moqueuse, pas du tout, simplement, chacun de ses mots elle les pense également pour lui. Elle n'aurait pas mieux dit. Allie effleure ses naseaux des siens, ajoutant dans un murmure : Ce lien indéfinissable est déjà ancré profondément en moi. Sans détourner son regard du sien, une lueur déterminée y dansant habilement, elle embrasse la base de son chanfrein avant de reprendre la parole. Quels sont tes secrets Faucon ?

Elle n'a aucune idée d'à quoi elle doit s'attendre. En réalité, elle ne s'attend à rien, son esprit est vide d'éventualités et suggestions. Elle l'écoute avec une attention particulière, comme toujours chaque fois qu'il lui parle, mais encore plus à cet instant. Apprendre tout l'un de l'autre, sans aucuns détours, sans rien enrober ni enjôler. Que les masques tombent, il ne s'agit plus que d'eux, tels qu'ils sont vraiment.
Elle ne peut empêcher ses muscles de se contracter en entendant le nom de sa mère, Mygale. Même si certains de ses apprioris sur elle sont tombés, certains ont encore la vie dure, sa mère lui a transmis la haine qu'elle avait pour elle, tel un héritage. Même si la haine s'en est allée, la méfiance envers l'akhal reste malgré tout. Victime. Cible. Elle ne détache pas ses naseaux des siens, encore moins ses yeux, qui observent les siens de manière inquisitrice. Boréale comprend qu'il parle de mort. La mort ne l'effraie pas, ne la dégoute pas, ne la dérange pas. Chez les Nayatis ils grandissent en apprenant qu'elle fait partie de la vie. Bien que lorsqu'elle l'a personnellement touché en emportant sa mère, elle n'avait pas su gérer le manque et la douleur. Malgré tout, ils ont aussi un adage : Une vie pour une vie. Une vie ne doit pas être prise inutilement, sinon les conséquences tomberont. Et au fur et à mesure qu'il lui raconte son histoire, sa part de lui cachée, elle se rend compte qu'il suit cet adage, à sa façon. Elle sursaute malgré tout en attendant le nom de Bailey, du sort qui lui a été réservé. Pourquoi avoir commencé en brisant sa première ligne de conduite ? Une innocente. Elle ne peut s'empêcher de ressentir une once de tristesse. Pas pour elle, pour Njörd, pour Winterfell. Elle connaissait que vaguement la baie, mais elle savait qu'elle était appréciée et chérie par des gens à qui elle tenait.
Tout se passe vite dans son esprit. Ses yeux jonglent entre celui vivant puis mort de Faucon. Jamais elle n'a délogé ses naseaux des siens, jamais elle n'a détourné sa bouche de son souffle chaud caressant ses lèvres. Tu ne dois jamais dire ce qui est arrivé à Bailey, que tu es responsable. ordonne t-elle, pourtant avec douceur, une douceur ferme. Malgré le pincement au cœur qu'elle a eut pour l'innocente, qu'elle a eut pour ses proches, c'est son désir ardent et incontrôlable de le protéger lui qui prend le dessus sur tout. Pourquoi avoir choisi une innocente ? Ne peut-elle s'empêcher de demander, pour pouvoir comprendre. Son ton n'est pas accusateur, ni réprobateur, il est plutôt … Curieux.
Elle l'observe un instant en silence, détache enfin ses naseaux des siens mais pour caresser de nouveau son visage, sa joue, dans un geste tendre. J'avoue avoir du mal à comprendre pour Bailey, mais pour ce qui est du reste, je trouve cela noble, admirable. Les opprimés ont besoin de quelqu'un pour veiller sur eux, sans qu'ils aient à avoir à le demander. Elle vient flirter à l'orée de sa bouche. Une vie pour une vie. murmure t-elle, lui dévoilant sa ligne de conduite à elle, semblable à la sienne. Elle trouve peut être encore plus désirable qu'avant. Allie effleure ses lèvres, jouent quelques secondes avec elle, les aguichant sans leur accorder de baiser. X devait mourir.Par lui même ou par quelqu'un d'autre. C'était le seul moyen de le libérer, même si toi ce n'est pas ce que tu aurais cherché à faire pour lui. Même si sa mort l'avait attristé, car elle l'aimait, elle était lucide quant à ce point. Il était tout autant victime que ses victimes. L'aveu de Faucon concernant les plans qu'il avait pu avoir pour lui ne lui fait donc ni chaud ni froid. Peut être même l'aurait-elle aidé.
Le nom de son autre demi frère lui arrache un frisson désagréable. Une fois encore, le concernant, elle n'est pas aussi lucide qu'elle devrait l'être, tout ce qui tourne autour de sa mère semblant hors de toute logique. Aszio est son fardeau. Elle avait tant voulu le voir mort, et après ce qu'il lui avait fait, elle ne le souhaitait plus. Car la mort serait trop douce pour lui. Elle voulait tant qu'il souffre. Elle voulait le briser physiquement et mentalement. Elle aspirait à toutes sortes de tortures. Je veux qu'il souffre. avoue t-elle, honnête, ne lui masquant plus rien. Je veux qu'on le brise comme il a tenté de me briser. Sa rancoeur et son désir de vengeance l'aveuglaient surement, mais c'était ainsi avec lui depuis sa naissance, depuis la mort de sa mère. Elle ne peut s'empêcher de poser un regard désolé dans celui de Faucon. Mais si j'agis ainsi, c'est moi que tu devras tuer, n'est ce pas ? Parce qu'elle ne vaudra pas mieux que ceux à qui ôtera la vie pour leurs fautes ? Elle n'avait pas peur de mourir, mais elle ne voulait pas lui imposer ça. Elle soupire, détourne pour la première fois ses yeux des siens pour les faire choir sur le sol dans un léger soupire. Il va falloir que tu m'aides à me défaire de ce désir de vengeance qui me poursuit et me hante depuis si longtemps.

Son rire et son ton sec la piquent au vif, et peut être est ce les hormones qui ne lui font pas prendre de mesure, qui la poussent à répondre du tac au tac impulsivement en pinçant ses fins naseaux et en laissant son regard se courroucer légèrement. Elle ouvre la bouche pour répondre tout aussi sèchement mais de justesse, elle parvient à se contrôler. Elle referme la bouche en se mordant le bout de la langue avant de la faire claquer. Elle soupire. Foutus hormones, foutus sautes d'humeur. Un peu plus et elle aurait certainement regretté amèrement ce qui serait sorti de sa bouche. Alors elle préfère abdiquer et ne pas répliquer, laisser courir. Elle était d'accord et en phase avec les règles actuelles qu'il suivait, autant ne pas revenir sur le passé et ses regrets.

Elle se laisse bercer par le flot de ses paroles, se surprend à croire qu'il parviendra à chasser la noirceur qui a gagné son âme à la mort de sa mère, à croire qu'elle arrivera à apprendre et devenir plus forte encore. Si la vengeance est si traîtresse, cela veut-il dire qu'il faut tout pardonner ? Ses mots sortent de sa bouche dans un murmure, tandis que ses yeux ne quittent pas son regard. Au mot pardonner, sa voix s'éraille, se casse légèrement, comme si … Il lui faisait peur. Le pardon, elle trouve si inaccessible, si irréaliste. Mais elle a confiance en lui, il lui apprendra.
Ses yeux se détachent un instant des siens, tandis que son esprit est affublé de nouvelles pensées. Vengeance. Haine. Pardon. Amour. Tout ça lui fait penser à … Elle arque l'encolure et observe ses flancs ronds, sans les toucher, juste les observer avec la distance qu'elle avait à l'égard de cet enfant depuis le départ. Nouveau soupire. Il va aussi falloir que je trouve la force de pardonner à cet enfant de ne pas être ce que j'aurais voulu, il va falloir que je trouve la force de l'aimer. Allie prononce ces mots avec un léger désarroi, un léger désespoir. Sans doute cela serait-il le plus gros combat qu'elle devrait mener de son existence. Tout la pousse à rejeter et renier cet être qui grandit en elle.