Amour, amour, part et ne revient plus | Miu

Son ventre grogna...en fait, elle mourrait réellement de faim. En venant ici, elle avait d'abord voulu faire taire son estomac. Mais c'était avant que quelques vieux souvenirs ne viennent la tourmenter. "Je devrais manger quelque chose...j'ai des étourdissements...après tout..." Elle se mordilla la lèvre, laissant un sourire soulever les commissures de ses lèvres ; "...on est trois ici..."

Miu acquiesça, souriante. Des pommes, c'est ça qu'il lui fallait ! Depuis la guerre, elle était faible. Elle avait perdu beaucoup de sang et de poids. Ses côtes se voyant sous son poil terne habituellement flamboyant. La roussette dormait bien peu, elle avait simplement peur. Une peur primale que les jumeaux la retrouve et en finisse une bonne fois pour toute. Elle fit quelque pas mais un autre vertige la terrassa. Sans un mot, sans un cri, elle s'étala de tout son long, faible.

Un air chaud réchauffa sa joue. Elle n'était bonne qu'à cela, se montrer faible. Elle voudrait tellement montrer au monde qu'elle pouvait se battre, s'en sortir seule dans la vie. Elle avait toujours fait ainsi. Pourquoi aujourd'hui n'assumait-elle plus cette indépendance ? Une larme coula sur sa joue. La rousse mourrait de faim, c'est ce qui l'affaiblissait le plus. Mais, en parfait battante, elle rouvrit les yeux. Malgré la tête qui lui tournait, elle entama une tentative d'ascension avant qu'un autre vertige la recouche. "Mais pourquoi ? Pourquoi ?" Hoqueta-t-elle. Miu entreprit alors de se calmer pour répondre aux interrogations de l'étalon ; "Je dois manger, je manque de force....j'veux pas mourir. J'veux pas que le petit meurt. J'veux pas, j'veux pas."

Alors elle s'accrocha aux paroles de Topaze, elle n'avait que ça. La rousse ne répliqua pas, elle n'en avait ni la force ni l'envie. Tout ce qui l'importait pour le moment était de se remettre sur pied, de retrouver assez d'énergie. Elle tendit le nez et, fébrilement, entre ses dents, saisie le fruit. D'une pression, elle sectionna la pomme en deux. Ses naseaux ronflèrent de plaisir. Le sucre dans sa bouche réveilla son appétit. "Ch'est incroyable, j'aurais jamais cru appréchier autant une pomme de ma vie..." Le regard encore un peu comateux, elle redressa précautionneusement la tête ; "....Merci de prendre soin de moi Topaze."

Sourire. Combien de sourire offrait-elle ces temps-ci ? Elle se sent mal, a perdu le seul étalon qu'elle ait jamais aimé, se trouve propulsée à la tête de la Banquise et pourtant, elle arrive toujours à dessiner sur sa bouche quelques sourires. C'est un maigre présent pour le remercier. Dans ses yeux, le crème peut voir qu'elle est sincère, touchée par ses attentions. La rousse laisse le silence s'installer le temps qu'elle sustente son estomac qui la tiraille depuis la veille. Prendre des forces et se relever, c'est tout ce qui importe...Il lui faudra du repos pour se sentir à nouveau forte. "Topaze..." La rouquine se lève avec précaution pour se rapprocher d'un arbre. Au pied de celui-ci, elle s'allonge et garde un appuie contre le tronc solide. "...J'pense pas que tu sois au courant mais j'ai réussis à me hisser à la dominance de la Banquise..." Inutile de dire qu'elle porte l'enfant de Kishin, le monde n'est pas prêt à se faire à cette idée. "...Je m'suis montrée assez persuasive, la place était vacante...tu y seras toujours le bienvenue. C'est peut-être bizarre, j'connais à peine cet endroit mais je n'veux pas qu'un autre monstre prenne une place de pouvoir..."

Il était tant d'être persuasive. Elle ne peut pas, de toute manière, cachée son nouveau rôle à un autre dominant. "Citrouille ?" La rousse se creuse un instant la caboche ; "...Je ne me rappelle pas l'avoir croisé mais à c'que j'ai entendu, elle a été méchamment blessée par un autre étalon." Là, elle n'a pas à mentir. "...et quelques habitants de la Banquise font partis de mes proches..." Pas de mensonge non plus. Elle joue simplement à la dissimulation et se tait sur sa réelle relation avec Kishin.

Topaze est intelligent. Ce n'est pas pour rien qu'il est à la tête de la Jungle. Alors qu'elle...elle y est simplement parce qu'elle s'est fait engrosser. Elle ne se sent ni aussi forte, ni aussi vaillante, ni aussi intelligente, à côté de Topaze et Oural elle n'est rien. C'est douloureux mais c'est certainement la réalité. Une place vacante qu'elle a pris. Des proches qui lui font confiance et qui sauront sans doute convaincre les autres. Et puis évidemment, elle porte l'héritier. Elle voudrait le lui dire mais elle ne le peut pas, elle le craint. Non, elle se sent aussi minuscule qu'un insecte, comme si elle pouvait se faire écraser là, d'un coup de sabot. Il doute, elle se sent mal à l'aise. Elle se lève, les forces reviennent même si elle se sent encore faible. Silencieuse, elle cherche à capter le regard de Topaze. Si les mots ne lui viennent pas, elle veut qu'il voit ce besoin de réparer de vielles erreurs, sa sincérité quant à sa seule intention de protéger les autres, d'empêcher que d'autres événements perturbants secouent Galop Sauvage.