qu'on soit l'ombre des cieux

Edderkopp avait les naseaux dans les fraises, visiblement un peu troublé d'en trouver un champ - c'était bien la première fois qu'il en voyait autant ! L'ébène profitait de l'odeur sucrée avant d'ouvrir la mâchoire, s'apprêtant à en mordre une à pleines dents avant d'entendre un bruit significatif de présence : le noiraud s'immobilise alors dans son geste et part à la recherche de la source de ce dérangement.

Calliope s'était éloignée du Midi, qu'elle ne quittait désormais plus beaucoup. La jument baie avait trouvé de quoi se sustenter au milieu de ce champs de fraise, et s'en donnait à cœur joie. Si bien qu'elle dut finir par se faire remarquer, comme elle en prit conscience lorsqu'un bruit de pas la tira de sa dégustation.

 
L'étalon repéra une jument non loin et il s'approcha de cette dernière en l'observant de ses petits yeux noirs, curieux - c'était un des premiers équins qu'il rencontrait sur ces terres. Edderkopp esquissa un petit sourire avant de lancer sur un ton humoristique "eh bien, si c'est pas de la faim ça !"

La voix, provenant de quelque part dans son angle mort, la surprit, et elle se retourna vivement, pour découvrir un étalon ébène. Il ne semblait pas moqueur, taquin à la limite, ce qui lui arracha un sourire amusé. -Ah, que voulez-vous, j'ai toujours été une gloutonne ... Confessa -t- elle sans se formaliser.

Edderkopp jeta un oeil à la ligne de la demoiselle, étonné qu'elle conserve sa finesse si sa gourmandise était telle qu'elle le décrivait. Il haussa cependant ses épaules tout en souriant, s'approchant un peu plus de la jument et chopa une fraise entre ses dents pour la dévorer par la suite. "j'en avais jamais vu autant ! un vrai paradis"

Callie surprit l'œillade de l'inconnu sur ses flancs, et retint un gloussement mutin. -Oui, en contrepartie ça demande un peu de sport ! Fit-elle pour toute justification, malicieuse. -C'est vrai que c'est démesuré... Disons que c'est la magie de Galop Sauvage ! Confirma la brune en riant.

L'ébène agita ses oreilles pour signe d'amusement, avant de saisir une autre fraise - son sport, lui, il le fera plus tard, en tout cas ! "je viens d'arriver" dit-il en prenant un nouveau fruit "j'ai décidé de m'installer ici après avoir bien voyagé. vous êtes née sur ces terres ?"

Elle lui offrit un large sourire ; elle savait bien qu'elle n'avait jamais vu cet étalon dans le coin. -Dans ce cas, bienvenue sur Galop Sauvage, j'espère que vous vous y plairez ! Répondit-elle avec sincérité. -Pas vraiment... Je suis née sur ce que l'on appelait anciennement Galop Sauvage aussi, des terres en tout point similaires à celles-ci. Malheureusement, après une série de cataclysmes, toute la population a dû migré, et nous sommes arrivés ici !

Edderkopp écouta attentivement la petite histoire de l'inconnue, un peu étonné de savoir qu'il y ait eu des problèmes capables de faire quitter de grandes terres à un troupeau ! "ces terres sont mieux que les anciennes ? c'était comment à l'autre ? vos connaissances et vos amis vous ont suivis alors ?"

Le regard de la jument se fit un peu vague, alors qu'elle repensait aux terres de son enfance, et aux circonstances troubles qui avaient entraîné leur destruction. -Je ne suis pas du genre nostalgique, alors oui je vous dirai que celles-ci sont mieux ! Surtout ça faisait de nouvelles terres à explorer. Elle embrasa du regard l'ensemble du champs de fraise, qu'elle n'avait d'ailleurs jamais eu l'occasion de visiter auparavant. -Les autres étaient vraiment similaires à celles-ci : séparées en quatre territoires, les Terres Nordiques, l'Egypte Ancienne semblable au Levant aujourd'hui, l'Empire Romain et la Cité Interdite, qui ressemble beaucoup au Territoire Méridional ici. En ce qui concerne les terres, elles étaient, comme ici, très calmes pour certaines, et d'autres étaient bien mystérieuses. Elle fit une nouvelle pause, songeuse. -Et pour ce qui est de mes amis et de ma famille... La plupart d'entre eux ont suivi, oui.

La jument avait une façon de raconter qui plaisait beaucoup à Edderkopp - il écoutait sans rechigner, alors qu'habituellement il s'impatientait quand les détails étaient présents. Les anciennes terres semblaient biens, et le noiraud était un peu déçu de se dire qu'il ne les verrait sans doute jamais. "eh bien, je dois avoir trouvé le bon endroit pour crécher" Il tendit ses naseaux jusqu'à une fraise qu'il mangea en une seconde, bien évidemment ! "comment vous appelez vous ?"

Et l'attitude attentive du mâle était tout à son honneur, car elle plaisait définitivement à Calliope. -C'est sûr, ces terres sont paradisiaques pour qui recherche la sécurité ! Confirma -t- elle en riant. Enfin, il y avait bien le problème des humains à présent, mais il semblait si vague, si lointain, qu'il ne lui vint pas tout de suite à l'esprit. -Je suis Calliope, mais on m'a toujours appelée Callie ! Et vous ? Contrairement à d'autre de ces congénères, elle ne précisa pas qu'elle était à présent la dominante du Midi, du moins pas tout de suite. Elle ne voulait pas passer pour une prétentieuse, et n'était pas encore assez à l'aise avec le titre pour le revendiquer.

L'étalon hoche brièvement la tête, pensif. "on est en sécurité nul part" et il croyait pas si bien dire ! "moi c'est edderkopp, ou edderkopper, comme ça chante" il observe attentivement la jument avant de lancer, en référence aux paroles de Calliope sur les anciennes terres "vous êtes de quel territoire ? j'ai demandé au couchant, mais j'y connais personne, j'espère avoir fait le bon choix !"

-C'est vrai... Nous avons connu quelques périodes sombres, mais il ne faut pas sous-estimer notre ténacité, et c'est là le plus important, n'est-ce pas ? Concéda Callie, éternelle optimiste. -D'ailleurs, certains ont été confrontés aux hommes, ils nous capturent. Finit-elle par avertir.
L'inconnu avait un nom aux consonances plutôt rudes. -Ederkopp... J'aime bien ! La question sur le territoire la fit, en revanche doucement sourire. -Je viens de quitter les Terres du Nord pour le Midi, après y être restée pendant des années ! Avoua -t- elle sans oser se confier davantage quant aux raisons qui avaient entraîné ce départ, avant d'ajouter : -Mais le couchant est un territoire très tranquille, même si je n'y connais pas grand monde non plus.

"en effet, vu comme ça" il appréciait bien le côté positif de la demoiselle - ça changeait du sien, qui était souvent le contraire. Il préférait s'attendre au pire pour éviter d'être brisé par l'optimisme. "des hommes ?" il était un peu moins rassuré, brusquement "que font-il là ?"
Quand elle lui fit une remarque sur son nom, il eut un grand sourire amusé "ça signifie araignée" il écoute le reste sur les territoires, toujours attentif "j'espère pouvoir visiter rapidement toutes les terres, ça m'a l'air bien joli par ici"